
Entretien réalisé par Philippe Randa
Que pensez-vous du FMI ?
Le FMI a été très utile lors de sa création en 1947 avec la Banque mondiale et les accords de Bretton Woods. Depuis, son utilité est plus contestable. Actuellement, il y a dans le monde une quantité prodigieuse de liquidités disponibles, tandis que les banques, sur le plan national et surtout international, ont pris une importance extraordinaire comme bailleurs de fonds potentiels. Si bien que le FMI en est réduit à un rôle très marginal sur le plan financier… En fait, le FMI ne joue plus que celui de conseiller. Sur le plan des financements, les États peuvent aisément trouver l’argent ailleurs. Certes, le FMI joue quand même un rôle plus efficace : celui d’un chef de file, d’un juge dans les crédits accordés par des consortiums de crédits, comme dans la crise grecque. Dans le même temps, des pays comme l’Allemagne ou la France "volent" au secours de la Grèce, ils sont très largement incompétents, à la fois sur la nature du mal et la façon de le traiter. Quel que soit le bagout d’un DSK, un ministre des Finances ne connaît rien et ses services pas grand-chose. Le FMI a pour lui d’avoir de la mémoire, des archives et un nombre d’experts de qualité qui ont des choses à dire et qui savent pourquoi les dire. De ce point de vue, le FMI joue un rôle important.
Alors, quel est le problème de cette institution ?
Il tient à ce que sa doctrine n’a pas beaucoup évolué avec le temps. Au départ, il s’agissait d’un monétarisme strict, hérité des Américains. Il a quelque peu changé, mais pas suffisamment. Et ce monétarisme n’a pas forcément grand sens avec la mondialisation des transferts financiers et du rôle énorme joué par certaines banques américaines. On pense naturellement à Goldman Sachs.
Que pensez-vous des présidences DSK et Christine Lagarde ?
La nomination de DSK à la tête du FMI est un véritable scandale, pas seulement pour ses dérapages sexuels, bien que cela joue, mais surtout sur un plan professionnel. Les médias lui ont bâti une réputation de gourou alors que c’est une imposture totale. C’est une création des médias qui ne repose sur rien : il n’a pour tout bagage que quelques mois passés au ministère des Finances, c’est tout. DSK a été le Bernard Tapie de la finance internationale. Quant à Christine Lagarde, elle possède une simple formation de juriste, n’est pas une économiste, ni spécialiste des problèmes financiers. Les présidents précédents étaient des gens de haute qualité intellectuelle… et morale, bien sûr : Pierre-Paul Schweitzer était un "moine". Moi qui ai vécu au Fonds monétaire, je suis surpris de la dégradation des mœurs de cette institution. À l’époque, le FMI était un monastère. Il n’était pas question d’aller pincer les fesses des secrétaires.
Pourquoi DSK et Lagarde ont-ils été acceptés ?
C’est le fantastique culot de Nicolas Sarkozy qui, face à l’inertie de ses partenaires, a réussi à imposer ses choix. Il est scandaleux pour le FMI d’avoir accepté des nominations aussi douteuses.
24 août 2013
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