À LREM comme aux LR, ils ont tous quelque chose en eux de Sarkozy…

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Il était le jeune incontrôlable ? Le voici devenu le vieux sage de la droite, le maître Yoda de LR, l’imam caché du macronisme. Lui, c’est Nicolas Sarkozy, qui déguste son retour en grâce, médiatique comme politique, à petites et voluptueuses gorgées, tel qu’on le ferait d’un cognac millésimé, accompagné d’un cigare issu des meilleures caves.

Passions, son dernier opus sorti l’année dernière, s’était déjà écoulé à plus de 300.000 exemplaires. Le Temps des tempêtes, son petit dernier, connaîtra-t-il le même succès public ? Il est un fait que cet ancien Président, l’un des plus détestés de la Cinquième République, ne ménage pas ses efforts pour réitérer l’exploit.

Dans Le Figaro Magazine, le service après-vente est assuré. En douze pages à forte valeur hagiographique ajoutée – treize en comptant la une –, le divin oracle est rendu. Magie d’une relecture rétrospective de sa propre histoire, Nicolas Sarkozy y transmute ses défauts présumés en autant de qualités avérées. Il était agité ? Il n’était qu’entier. Il était hyperactif ? Son administration n’était composée que de feignasses. Un alchimiste n’aurait pas mieux opéré.

Certes, l’homme à Carla n’est plus aux affaires, même si, faute de diriger, il continuerait de téléguider. Nouvelle figure aux accents christiques, il multiplie les pains – dans la tête des amis de naguère et des ennemis de jadis. Mieux, il conseillerait très souvent son actuel successeur, tel qu’entendu ce lundi sur TF1 : « Quand le président de la République, quel qu’il soit, en l’occurrence Emmanuel Macron, va jusqu’au bout d’une idée, d’une conviction, il ne se trompe pas. »

Certes, mais quand cette idée peut aller jusqu’au bout de la GPA, la conviction peut aussi passer pour de l’entêtement. Car à ce compte, les Khmers rouges étaient aussi des gens très convaincus. Heureusement pour le loustic à Brigitte, Sarkozy fait patte douce en affirmant : « Je suis passé du Président qui voulait détruire tout ce que j’avais fait, qui voulait me faire tous les ennuis possibles et imaginables, M. Hollande, à un Président républicain. » Le jules à Julie a dû apprécier.

Pour autant, si la mécanique intellectuelle de Nicolas Sarkozy n’a rien d’un porte-avions fendant les flots de l’adversité, force est de lui reconnaître un indéniable instinct politique. C’est ainsi qu’en 2007, pressentant déjà un certain besoin d’autorité, il abandonna Jean-Marie Le Pen, dépouillé de ses traditionnels habits de campagne, sur la banquise électorale. Faute d’avoir à nouveau écouté son instinct – dicté, il faut le dire, par un autre maître Yoda, autrement plus performant, celui-là, Patrick Buisson –, il finit par rejoindre cette même banquise.

Aujourd’hui, Nicolas Sarkozy se souvient que l’autorité de l’État n’est supportable qu’à condition qu’il y ait sécurité des biens et des personnes. D’où cette furie actuelle du personnel politique, de gauche comme de droite, mais tous plus ou moins rassemblés dans le giron du parti présidentiel, voulant que tout un chacun puisse avoir vocation à jouer au ministre de l’Intérieur. C’était bien la peine de virer (ou de laisser partir) Gérard Collomb qui, en son temps, alertait déjà l’Élysée contre de possibles risques de guerre civile à venir.

Ni une ni deux, Gérald Darmanin évoque donc l'« ensauvagement » de la France, « élément de langage » dérobé au Rassemblement national. Emmanuel Macron fait la tournée des commissariats, comme Georges Clemenceau autrefois celle des tranchées. Christian Estrosi, maire de Nice, en rajoute dans la surenchère sécuritaire, tandis que Jean Castex aurait un peu tendance à confondre hôtel Matignon et Place Beauvau. Lequel Premier ministre est d’ailleurs tenu par Nicolas Sarkozy pour « homme de qualité » ; logique, il fut son secrétaire général adjoint au Château.

Bref, Nicolas Sarkozy marche sur l’eau, tandis qu’Emmanuel Macron tremble de boire la tasse. C’est l’aveugle au secours du paralytique ; d’où ces inspecteurs Clouseau se prenant pour des inspecteurs Harry. En bonne Miss Marple qu’elle est, Marine Le Pen a dû reprendre deux sucres dans son thé. Juste histoire de savourer.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

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