[Point de vue] « Intraitable » : ce mot qu’on ne peut plus entendre
Il y a des mots qu’on ne supporte plus d’entendre, tant ils sont vidés de leur sens. C’est le cas du mot « intraitable », répété machinalement après chaque fait qui ensanglante notre quotidien.
Ce fut, bien sûr, le cas après l’attaque du fourgon pénitentiaire qui transportait le détenu Mohamed Amra par un commando lourdement armé et qui s’est soldée par la mort tragique de deux agents pénitentiaires et de trois blessés graves. Emmanuel Macron a terminé son post, publié sur X, par cet affichage de fermeté implacable.
Il faut dire que le Président apprécie drôlement ce mot qui rentre dans sa rhétorique guerrière déployée aussi bien pour faire peur à un virus qu’à Vladimir Poutine.
Déjà, en mars dernier, lors de la cérémonie des 80 ans du CRIF, il avait déclaré, sur un ton martial : « Nous serons intraitables envers l'antisémitisme », en pleine recrudescence dans notre pays depuis les attaques du Hamas en Israël, le 7 octobre, avec 366 faits enregistrés au premier trimestre de cette année, soit une augmentation de 300 % par rapport aux trois premiers mois de l’année précédente. Quelques jours après, Sciences Po était bloquée par des militants en keffieh hurlant des slogans niant l’existence d’Israël avec, à leurs côtés, les orchestrateurs du chaos : les députés de La France insoumise et la très pro-palestinienne Rima Hassan, candidate aux élections européennes. Face à ces représentants d’un antisémitisme décomplexé qui nazifient Israël et héroïsent le Hamas, la direction de Science Po ne s’est pas, quant à elle, montrée « intraitable ». Bien au contraire, par lâcheté et complaisance, elle a traité avec les manifestants en se couchant devant leurs revendications. Les militants ont donc eu leur débat et n’ont pas été inquiétés par des procédures disciplinaires. Peu importe si des étudiants de confession juive se sentent menacés, comme très certainement cette jeune fille ostracisée de l’amphi historique de Sciences Po Boutny, rebaptisé Gaza, parce qu’elle était juive.
Intraitable… En avril, Macron a encore une fois utilisé son adjectif belliqueux préféré qui, seul dans la bouche d’un Clint Eastwood, peut paraître crédible. Cette fois, c’était lors d’un déplacement dans une école parisienne après les agressions de la jeune Samara, lynchée parce qu’elle voulait vivre à l’européenne, et de Shamseddine, tabassé à mort pour avoir envoyé des textos à la sœur de l’un de ses assassins.
Intraitable… intraitable… intraitable, ce n’est pas en sautant comme un cabri sur l’estrade de l’autorité qui tombe en ruine que ce mot se transforme en acte. Le gouvernement est tout, sauf intraitable. Si, vraiment, il l’était, Éric Dupond-Moretti n'aurait pas recadré les magistrats du tribunal judiciaire de Marseille qui alertaient sur l’insuffisance des réponses pénales face à l’ampleur du trafic de drogue qui s’étend, corrompt et sème le chaos chaque jour.
Si le gouvernement était intraitable, les forces de l’ordre ne sanctionneraient pas le port d’une arme blanche d’une simple amende de 500 euros alors qu’il y a 120 attaques au couteau par jour.
Si le gouvernement était intraitable, le garde des Sceaux n’aurait pas proposé des flyers pour rappeler aux parents de mineurs délinquants leurs « obligations » au lendemain des émeutes de juin dont les dégâts ont coûté quatre fois ceux de 2005, avec un montant s’élevant à un milliard d'euros. Emmanuel Macron n’aurait pas, non plus, mis une pièce dans la machine de la culture de l’excuse en mettant sur le compte de l’oisiveté la cause du déchaînement de violence.
Si le gouvernement était intraitable, il ne passerait pas son temps à accuser ceux qui nomment le réel de faire le jeu du Rassemblement national.
L’an dernier, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, martelait qu’il serait « gentil avec les gentils et méchant avec les méchants ». Aujourd’hui, les gentils sont tués par des méchants, faute d’une réponse pénale impitoyable.
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57 commentaires
A ce mot, nous pouvons ajouter « condamner avec la plus grande fermeté » !
Et à chaque fois, le résultat est d’une efficacité remarquable !
J’oubliais le « celles et ceux » qui me sort par les trous du nez !!!
Je n’ai pas bien compris. L’article défend les bons contre les méchants et réclame justice..et dans le même temps affirme que en Palestine les bons à protéger ce sont les Israeliens qui vident Gaza manu militari. Et les « bons » ce sont les personnages corrompus mis en place par les Anglo-saxons qui ont acculé l’Ukraine à la guerre en sacrifiant son peuple? J’ai du mal avec la définition des « bons » en France. C’est plutôt un deux poids deux mesures qui traduit toujours les intérêts de la classe dirigeante et de sa communauté. Sans compter l’usage de la drogue, car s’il n’y a pas de clients haut placés, et de corruption, il n’y a pas de réseaux maffieux.