Interrogé, ce jeudi matin, sur Europe 1 au micro de Sonia Mabrouk, Michel Onfray, comme à son habitude, a pris le contre-pied de quelques évidences médiatiques, dont le rabâchage a pour but de les faire passer pour des vérités insubmersibles. Que l’on soit d’accord ou pas avec le fondateur de la revue Front populaire, l’écouter est parfois (ou souvent ?) agaçant, parfois rafraîchissant, mais stimulant, toujours.

L’une de ces évidences médiatiques est, bien sûr, que Marine Le Pen est d’extrême droite. Olivier Véran ne disait-il pas, récemment, que le RN ne faisait pas partie de « l’arc républicain » ? Au-delà de la formule creuse, si le RN n’était pas un parti « républicain », il aurait été interdit.

Ce jeudi matin, donc, Michel Onfray, à qui l’on peut reconnaître une virile détestation de ces clichés qui sont aujourd’hui le préalable à toute pensée, expliquait à Sonia Mabrouk que Marine Le Pen devrait être Premier ministre. « Vous savez bien que c’est impossible ! » lui rétorque la journaliste. Peut-être sous-entend-elle que c’est moralement impossible d’élever à ce poste une personnalité politique d’extrême droite. À quoi il répond : « Marine Le Pen Premier ministre, ce sont ce que les institutions exigent, demandent. Si vous me dites que c’est impossible, cela signifie que l’on a avalisé le fait que nous n’étions plus en démocratie. » Inversant la charge de la preuve, il éparpille façon puzzle le discours rodé, éprouvé et aujourd’hui éculé de tous les antifascistes de la Terre.

Il poursuit : « Je n’ai jamais pensé que Marine Le Pen soit d’extrême droite, j’ai toujours pensé qu’elle était d’une droite qui ressemblait à celle de Chirac dans les années 70, celle de Pasqua, de Pandraud [ancien ministre délégué à la Sécurité, ami personnel de Jacques Chirac et Charles Pasqua, NDLR], même les bruits et les odeurs pour ceux qui s’en souviendraient chez Jacques Chirac. »

Une façon claire d’expliquer l’artificialité et l’inanité du cordon sanitaire, de l’interdit moral qui a pourtant régulé la vie politique française pendant quarante ans - auquel Jacques Chirac avait d’ailleurs abondamment souscrit.

Alors Marine Le Pen représente-t-elle la droite des années 70-80 ? Il est vrai qu’à l’époque, Jacques Chirac lui-même n’hésitait donc pas à parler de bruits et d’odeurs. Alain Juppé, interviewé en octobre 1990 dans le magazine Lui, parlait de l’intégration des immigrés dans le 18e arrondissement comme d’un « problème permanent et gigantesque ». Toute cette droite RPR à l’époque, de la fin des années 70 au début des années 90, n’hésitait pas à employer un langage de vérité pour parler de l’immigration. Paroles peu suivies d’actes, il est vrai, ce qui, en sus de son anti-gaullisme foncier, explique l’engagement de Jean-Marie Le Pen, endossant ainsi pendant des décennies le rôle de lanceur d’alerte.

Autre similitude avec la droite RPR, qui ne faisait peur à personne, et le RN d’aujourd’hui, c’est l’électorat populaire, rural, et diversifié socialement, bien plus que celui de la NUPES. Comme le remarque Le Figaro, analysant les résultats des législatives : « Après avoir aspiré les électeurs communistes du bassin minier dans les années 2000, puis l’électorat socialiste populaire des Hauts-de-France et de l’Est entre 2012 et 2015, le mouvement de Marine Le Pen pourrait avoir passé, lors de ses élections législatives, un nouveau palier. En ramenant à lui tout un électorat de droite populaire et rurale, jusque-là fidèle au parti Les Républicains. Celui-là même qui lui a apporté la victoire dans quatre circonscriptions sur cinq de l’Eure, dans de nombreuses circonscriptions de Picardie ou de Champagne comme dans le Centre. »

En dehors de la place « géographique » de son groupe dans l’Hémicycle, à droite d’un groupe LR sérieusement racorni, peut-on effectivement encore dire que le RN est d’extrême droite ? Il semblerait que sa géographie aujourd’hui recouvre celle de la France.

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23 juin 2022 à 19:57

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37 commentaires

  1. Il y a une droite patriotique et populaire qui s’appelle RN qualifiée d’extrême droite par la gauche islamo anti-France .

  2. Marine a quitté la présidence du RN.
    Je pense que 2 courants vont apparaitre : « Marinisme et Bardellisme »….
    L’un, d’appareils, l’autre populaire…
    A suivre !

  3. Tout à fait de son avis le RN ce n’est pas l’extrême droite c’est tout simplement la droite qui aime la France .

    1. Il serait bon que les médias « bien pensants » (et les rares autres) apprennent et répètent inlassablement ce mantra…

  4. Heureusement qu’il existe des Michel Onfray pour pratiquer une parole non alambiquée et appeler un chat un chat.
    « Extrême droite » est devenu une ponctuation des discours politiques et médiatiques qui prouve à quel point ces gens n’ont plus d’arguments démocratiques face à une majorité de français qui réprouve l’immigration de masse incontrôlée et les failles de sécurité qui ponctuent les journées qui se suivent et se ressemblent.
    Un p’tit coup d’Onfray vaut mieux qu’un baragouinage de BHL

  5. Cher confrère Véran, qui sut un jour « démocratiquement » tancer les élus – lui qui ne l’était pas – de l’Assemblée nationale en leur demandant de vider les lieux : sait-il qu’un « arc républicain » n’a, à priori, que peu à voir avec un arc électrique ?

  6. Si le RN est un parti d’extrême-droite, vocable banalisé permettant d’éviter celui plus connoté de fasciste, que penser d’un Etat républicain qui tolère en son sein et subventionne légalement une telle abomination, tel un médecin qui entretiendrait volontairement et par machiavélisme le cancer de son patient ! En revanche, ce même Etat protège, voire cultive, l’islamisme avec une telle désinvolture et nonchalance que, pour le coup, il est antirépublicain.

  7. Vous citez des individus dont l’hidalgorytme m’interdit de dire qu’ils sont des chenapans qui craignirent leur perte dès que JMLP eut ses 35 députés grâce à le proportionnelle de Mitterrand que Chirac s’empressa de supprimer craignant pour sa carrière!
    Cohabitation institutionalisée, alternance, front républicain….et fortune amassée par UMP et PS au détriment du FN!
    Honte!

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