L’icône woke Kamala Harris brille à Paris mais dégringole aux États-Unis

Kamala Harris

Après le fiasco du dossier des sous-marins australiens et l’humiliation infligée par Joe Biden à la France lors du G20, il fallait bien recoller les morceaux entre les alliés historiques. Quoi de mieux que d’envoyer dans l'Hexagone l’icône Kamala Harris pour renouer les relations diplomatiques ? Les journalistes les plus téméraires se sont aventurés à une interprétation : vu l’âge avancé du président Biden, Kamala Harris serait venue rencontrer Emmanuel Macron pour préparer « l’après Joe ».

Mais le passage de la vice-présidente des États-Unis à Paris, où elle est reçue en grande pompe, n’a visiblement pas été à la hauteur des espérances de cette « opération reconquête ». Nos journalistes français ont avoué leur déception face au manque de popularité de Mme Harris aux États-Unis. Car les enquêtes d’opinion ne sont pas bonnes. Début novembre, un sondage USA Today/Suffolk révélait que seuls 28 % des Américains approuvent son mandat, soit dix points de moins que Joe Biden, qui n’est lui-même qu’à 38 %. En cinquante ans, ces chiffres n’ont jamais été aussi bas pour un vice-président.

Les commentateurs français y voient la « rançon de la gloire ». Tous conviennent désormais que la colistière de Joe Biden n’a pas été choisie pour ses qualités politiques mais parce qu’elle est une femme et qu’elle est métisse. Issue de la grande bourgeoisie californienne, la vice-présidente est effectivement fille d’un économiste originaire de Jamaïque, professeur à l’université Berkeley, et d’une biologiste indienne.

« Kamala Harris a eu tous les postes. Elle n’a jamais connu de plafond de verre », explique l’un de ses biographes, Olivier Piton, qui publiait, en septembre dernier, Kamala Harris : la pionnière de l’Amérique. Femme ambitieuse, elle fut procureur général de Californie de 2011 à 2017, puis sénatrice du même État jusqu’en 2021. Ses faits d’armes ? S’être vite positionnée sur les questions sociétales et progressistes, les droits des femmes et des minorités, jusqu’à devenir l’égérie du « wokisme ». En témoigne, d’ailleurs, sa biographie Twitter, où elle s’affiche comme « she/her ».

En conséquence, elle est systématiquement critiquée par le camp conservateur. Pour Mike Pompeo, secrétaire d’État du président Trump et ancien directeur de la CIA, « la vice-présidente déshonore les États-Unis sur la scène internationale ». Le mot est sévère mais non sans vérité lorsqu’il pointait, le 11 novembre dernier, son manque de consistance. Face aux regards chinois, ne parler que du genre, des inégalités ethniques et du climat n’est pas sérieux, estime le républicain. C’est même une preuve de faiblesse.

La désillusion Harris est patente, tant cette femme de 57 ans accumule erreurs et maladresses. La principale relève de l’immigration, dossier extrêmement difficile que lui a confié Joe Biden. Kamala Harris a attendu plusieurs mois avant de se rendre à la frontière mexicaine, plaisantant même lorsque les journalistes l’interrogeaient à ce sujet. Elle s’est également attirée les foudres de l’extrême gauche quand, lors de son voyage au Guatemala, elle a conseillé « Do not come » [« Ne venez pas », NDLR] aux potentiels futurs clandestins.

La vice-présidente est désavouée jusque dans son propre camp médiatique. Fin juin dernier, le journal de gauche Politico publiait une enquête appuyée sur de nombreux témoignages de membres de son équipe sous un titre choc : « Le cabinet de Kamala Harris en proie à la dissidence ». Depuis quelques mois, même le Los Angeles Times avoue ses doutes quant à la Californienne. Dernière polémique en date ? En octobre, la vice-présidente apparaissait dans une vidéo de la NASA occupée à discuter de manière informelle avec de jeunes enfants. Mais il s’est avéré que la vidéo n’était qu’une mise en scène, et les enfants des acteurs recrutés pour l’occasion. Pas très chic.

Pour relativiser la « chute » de leur égérie, ses soutiens préfèrent arguer que la Constitution américaine ne donne aucun rôle à la vice-présidence. Kamala Harris profiterait ainsi de son voyage en Europe pour créer son réseau dans l’optique de sa future carrière… Un naufrage.

Gaëlle Baudry
Gaëlle Baudry
Chroniqueuse à BV, spécialiste des Etats-Unis, consultante indépendante

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