« Je crois aux forces de l’écrit » : Gabriel Attal, un beau parleur ?
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Comme il se qualifie lui-même, dans une tribune publiée dans Le Monde, Gabriel Attal est « un ministre lucide ». Comment ne pas l'approuver quand il déclare que « les savoirs fondamentaux, et singulièrement la lecture et l’écriture, sont ceux qui rendent possibles tous les autres », que « près d’un élève sur trois ne sait pas lire ou écrire convenablement à son entrée en sixième » et que remédier à cette baisse alarmante de niveau constitue « une urgence républicaine » ? Mais il ne suffit pas d'afficher ses ambitions pour la lecture, l'écriture et la culture à l'école : il faut aussi se donner les moyens de les mettre effectivement en œuvre.
Force est de constater que les solutions qu'il préconise sont loin de permettre d'enrayer le déclin de l'enseignement, encore moins d'inverser la tendance, et que ses annonces, fragmentées, manquent d'une vision d'ensemble. Vouloir un « choc des savoirs » est une formule publicitaire qui sonne haut et fort mais qui est vide de substance. Tous les ministres, ou presque, depuis des décennies ont prôné un « retour aux fondamentaux » sans que rien ne change. Quand Gilles de Robien osa, en 2006, inviter à abandonner la méthode globale dans l'apprentissage de la lecture, il fut aussitôt contesté et sa circulaire resta lettre morte.
Il est beau de croire « aux forces de l'écrit », en paraphrasant Mitterrand (« Je crois aux forces de l'esprit »), de déclarer qu'« il n'y a pas de pensée libre, de pensée complète et complexe sans pratique entière de l'écrit » ; il est beau d'abolir « les textes à trous » et de recommander la dictée, la production de récits d'invention, de textes artistiques ou de réflexions argumentées ; il est beau d'instaurer « un test de rédaction intégré aux évaluations nationales pour l’ensemble des élèves à l’entrée en sixième » – encore qu'il vaudrait mieux rétablir un examen, avant l'entrée en sixième, pour vérifier les acquis… Mais toutes ces mesures ne sont que des rustines qu'on colle tour à tour pour tenter de réparer le système, alors que c'est le système tout entier qui doit être remplacé.
Qu'attend Gabriel Attal pour supprimer les INSPE, ces avatars des IUFM où les futurs professeurs sont infantilisés et formés – déformés, plutôt – aux théories pédagogiques qui placent l'élève au centre du système éducatif et le rendent égal aux maîtres ? Qu'attend-il pour redonner aux concours de recrutement des professeurs des écoles (CRPE) ou des collèges et lycées (CAPES) des épreuves disciplinaires et exigeantes qui garantissent que tous les candidats retenus dominent la matière qu'ils enseigneront, au lieu d'épreuves prétendument professionnelles où les candidats doivent répéter un catéchisme bien-pensant ? Qu'attend-il pour prendre la taureau par les cornes et dénoncer les idéologies qui règnent, depuis des décennies, dans l'Éducation nationale ?
À 9 ans, Gabriel Attal, élève de l'École alsacienne, rêvait de devenir comédien. On ne sait si son goût pour le théâtre l'a rapproché d'Emmanuel Macron, mais on souhaiterait qu'il ne se contentât pas, comme son maître dont il salue la « détermination », de se donner en spectacle et de faire illusion. Si l'on peut approuver la conclusion de sa tribune – « Soyons exigeants vis-à-vis de l’écrit ou de l’école. En n’oubliant jamais que, si nous sommes exigeants, c’est avant tout pour l’avenir de nos enfants, et donc de notre nation » –, on ne saurait admettre que ce ministre, qui prétend incarner la rupture et le renouveau, ne fît que prolonger les erreurs du passé en endormant les Français par de belles paroles.
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26 commentaires
Paroles paroles et après ?
Rien!…Comme d’habitude. Du vent! De l’esbroufe!
A bon école sans jeu de mots, monsieur le nouveau ministre de l’éducation joue du langage. Certes il démontre une présence et une autorité flagrante mais le mal est fait depuis des décennies et la reconstruction ne se fera pas sans mal. Il faut gagner du temps jusqu’aux élections.
C’est la politique du en même temps de macron, un coup je te mets Pap Ndiaye et si je vois que ça ne marche pas, je te mets Attal, qui semble plus consensuel en façade, mais l’un comme l’autre ne font qu’appliquer la politique du « en même temps » de macron. C’est de l’enfumage.
Beau constat, mais sera-t-il suivi d’effet ? Nous sommes au pays des flots de mensonges quotidiens et du « en même temps « . Ne nous a-t-il pas abreuvé de carabistouille quand il était porte-parole du gouvernement. ?
Tout le monde sait comment l’on doit enseigner, mais il faut être honnête, les pires ennemis de la bonne façon de faire, sont d’abord les syndicats d’enseignants qui en fait dirigent le ministère de l’éducation nationale avec les clones de Meirieu qui a réussit à tuer l’éducation nationale.
Parler pour ne rien dire et ne rien dire pour parler sont les deux principes majeurs et rigoureux de ceux qui feraient mieux de la fermer avant de l’ouvrir ! (Pierre Dac)
Excellent !
J’adore le « républicaine » de l’urgence !
Autrement dit, obligé de souscrire à ses propos, même s’ils nous changent de ceux de Pap Ndiaye !
Avec la plantation d’arbres en 6ème, les cours de cuisine et autres sujets étrangers à la scolarité qui ne font que grignoter du temps d’apprentissage pour les fondamentaux, il faudrait ajouter des cours de pipo et de trémoussage…
Nous voyons bien que tous ces ministres pléthoriques ont plus un penchant de comédien que de générateur de politiques efficaces. Ils forment un vrai petit théâtre (de boulevard) de l’Élysée !
Bien entendu, comme beaucoup , même dans les métiers « manuels » : mais c’est ça qui compte, non ?
Le voilà maintenant qu’il singe Mitterand , rien ne nous sera épargné …
Cela me sidérera toujours. Fils d’une institutrice je savais lire à 4 ans (méthode Boscher). Mais alors vite, très très vite et cela a pris trois semaines.
Attal c’est la version groupe des minimes de son pote Macron.
Il étale les mots le p’tit doigt en l’air, comme on étale la marmelade, pour que ça fasse beau, et autant que faire se peut un peu de buzz.
Mais au final, il n’y a que lui qui se comprend, comme Manu.
Comme les autres , il déplore les effets dont il chérit les causes.
Le bel « Archange » , messager de Jupiter , a tous les talents de la création ….
Que votre subjonctif de la fin me régale. Merci.