Dans son récent débat avec Zemmour, Philippe de Villiers disait l’importance du « roman national » parce qu’il est indispensable à la construction d’un imaginaire collectif, et que celui-ci est nécessaire pour qu’il y ait un peuple, un « démos », conscient de son unité et de sa continuité.

Face à ce roc, il y a eu l’inconsistant Président que les Français subissent. Entré dans un véritable délire de la repentance par rapport à l’Algérie ou au Rwanda, Macron a prétendu, dans les pages du Figaro, qu’il n’était « ni dans la repentance, ni dans le déni ». Dans le plus « pur » style mitterrandien du ni-ni, c’est-à-dire d’un mélange de rouerie et d’impuissance, il a voulu rassurer l’électorat modéré dont il souhaite bénéficier de l’aveuglement une nouvelle fois. Mais il est, au contraire, passé aux aveux sur la chaîne américaine CBS en osant proclamer qu’il fallait « déconstruire » l’Histoire de France, autrement dit, qu’il fallait passer notre roman national, notre identité à la grande lessiveuse de cerveaux.

La première réaction devant une telle énormité est la stupeur. Comment les Français ont-ils pu élire un homme qui trahit à ce point la mission qui lui a été confiée ? Un homme d’État à la tête d’une nation se doit de viser à l’unité et à la continuité de celle-ci, à la fierté de ses membres fondée sur la richesse d’une Histoire capable de soulever l’espérance, de générer un avenir commun. Les Français découvrent leur « Président » allant sur une chaîne étrangère dire qu’il faut jeter leur Histoire par-dessus bord parce qu’elle est vraiment trop moche.

Emmanuel Macron est le porte-parole local d’une idéologie, le mondialisme progressiste, qui prétend unifier le monde en l’américanisant. Pour aller dans cette direction, il faut faire sauter le verrou des exceptions françaises, et le culte de l’Histoire en est une. Criminels en Algérie, complices du génocide au Rwanda, héritiers de l’esclavage et de la colonisation, il faut que les Français dégurgitent leur Histoire, n’en conservent qu’une mémoire souffrante et coupable afin de devenir de simples humains dans un espace juridique sans frontière pour l’instant plus ou moins limité à l’Europe. L’arrivée massive d’autres humains facilitera le mélange et le broyage des identités.

Avec le terme de « déconstruction », le « Président » se gargarise comme d’habitude d’un mot précieux, philosophique dont il doit être ravi, et sans songer, semble-t-il, que ce n’est pas du tout ce qu’on lui demande. Mais derrière ce mot, il révèle une ignorance, une incompétence qui font frémir. Ainsi donc, la France souffrirait comme les États-Unis du racisme, mais elle n’y aurait pas répondu de la même manière parce qu’elle est une ancienne puissance coloniale qui n’est pas libérée de son passé colonial.

Il est vrai que la France subit l’influence actuelle des modes idéologiques américaines du « wokisme », de la cancel culture, du racialisme. Cette importation est artificielle car, précisément, les États-Unis et la France sont totalement différents. La France a été marginalement coloniale, les États-Unis sont une colonie où les colons sont devenus la population.

Les Noirs sont des descendants d’esclaves, pour la plupart, qui ont subi longtemps une discrimination y compris juridique alors qu’ils n’ont pas choisi d’être là. Leur « identité » réside, au premier chef, dans la couleur. À part dans les îles, où les Noirs sont majoritaires et occupent souvent le pouvoir local, rien de tel n’existe en France. La couleur n’est pas une identité. En revanche, dans la diversité des immigrations, qui n’ont rien de nécessaire, il y a des identités différentes, avec une difficulté principale qui repose non sur l’apparence physique mais sur la culture, essentiellement déterminée par la religion. Et c’est en ne saisissant pas cette différence que Macron se trompe lourdement : on peut lutter contre le racisme lorsque celui-ci est univoque. Lorsqu’il s’agit d’un séparatisme qui dresse des communautés mues par des cultures opposées, l’action unilatérale aura un effet destructeur.

Comme le montre Malika Sorel, lorsque l’Occident chrétien croit faire preuve de compassion en se battant la coulpe et en s’agenouillant, beaucoup d’autres civilisations y voient une faiblesse contraire à la fierté et à l’honneur qui les animent. Qu’un chef de l’État ne comprenne pas ça est affligeant !

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20 avril 2021 à 11:08

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