Rôle de l’URSS dans la victoire de 1945 : réponse à Patrick Robert
Dans votre publication du 6 juin, M. Patrick Robert donne une vision que je trouve assez partielle et partiale sur le rôle de l’URSS dans le second conflit mondial. D’après ce qu’il décrit, les alliés occidentaux auraient eu un rôle secondaire sur le champ de bataille européen et le succès final serait principalement dû aux Soviétiques « vainqueurs de la Wehrmacht », ce qui reprend la version officielle de la Russie actuelle qui parle de SA victoire, aidée par les alliés occidentaux.
Je voudrais vous donner une version moins manichéenne et, je pense, plus proche de la réalité.
Staline a été l’allié de Hitler de septembre 1939 jusqu’au début de l’attaque allemande en juin 1941. La France s’est même, un moment, posé la question de savoir s’il fallait lui déclarer la guerre. Par des livraisons de toute nature, le prêt de camps d’entraînement à l’armée allemande, il a contribué à l’effort de guerre allemand ; il a envahi conjointement avec elle la Pologne, attaqué la petite Finlande (qui, ensuite, s’est naturellement trouvée du côté allemand), félicité Hitler lors de l’entrée des Allemands dans Paris.
Ensuite, il a dû payer le prix des purges sanglantes qu’il a exercées dans l’Armée rouge dans les années trente (plusieurs dizaines de milliers d’officiers exécutés, surtout officiers supérieurs et généraux). Les faiblesses résultantes du commandement ont aggravé une situation qui n’a pu être sauvée in extremis que grâce au sacrifice de masses de soldats russes ; et aussi grâce à l’effort colossal de soutien matériel par les Anglais et les Américains, qui ont consenti des pertes importantes pour les livraisons à l’URSS, car ce sont leurs marines qui les effectuaient : plusieurs centaines de milliers de matériels majeurs : Jeep, camions, chars d’assaut, chasseurs, bombardiers, mais aussi munitions, matières premières, denrées diverses, etc.
Et, enfin, on ne peut pas laisser dire que les Alliés ont seulement « aidé » la Russie à vaincre. Les opérations menées par les Alliés de l’Ouest n’ont pas joué qu’un rôle supplétif en Afrique, en Italie et en France. Et en Allemagne, car le matraquage aérien incessant de l’industrie allemande pendant près de quatre ans n’a été le fait que de leurs aviations. En outre, le Royaume-Uni, toujours invaincu en 1941, a immobilisé une partie des forces allemandes à l’Ouest. Enfin, rappelons que ce sont les Soviétiques qui, depuis des mois, demandaient l’ouverture d’un second front en Europe pour les soulager.
Rappelons, enfin, que même quand les choses allaient mieux pour lui, Staline s’est gardé de porter des forces sur l’Asie où, pourtant, ses alliés américains étaient aux prises avec le Japon, qui n’était pas non plus un mince adversaire. Il ne l’a fait que le 8 août 1945, au moment où le Japon était virtuellement vaincu, puisque la bombe sur Hiroshima avait déjà été larguée.
En fait, il s’en est failli de peu que les Russes soient battus ; et peut-être, ensuite, nous avec.
L’évocation du nombre effrayant de victimes russes de ce conflit suffit, en général, à occulter tout le reste et à interdire de parler de « détails » indécents. Mais n’oublions pas, non plus, que si ce triste bilan doit beaucoup aux envahisseurs allemands, il a été aggravé par le mépris de Staline pour la vie humaine, qui a eu aussi sa traduction sur les champs de bataille.
La victoire fut celle des Alliés dans leur ensemble. Et c’est vrai que la présence de M. Poutine aux cérémonies du 75e anniversaire du Débarquement aurait été normale.
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