Et ils osent parler de démocratie !
La démocratie libérale était devenue le régime obligatoire de l'Union européenne. Face à l'URSS, cette obligation de la liberté ne paraissait pas contradictoire. Elle ne menaçait pas l'identité des nations européennes, mais au contraire la fondait.
Depuis la désintégration du bloc soviétique, la contradiction entre la liberté et l'obligation est devenue évidente. Les droits, les libertés ont été brandis comme les valeurs de sociétés ouvertes au monde entier, au mépris du maintien de l'identité des nations. Les anciens satellites soviétiques qui aspiraient à accéder au statut démocratique, dont jouissaient les États de l'Europe de l'Ouest avant la chute du mur de Berlin, s'estiment donc à juste titre floués. Pendant quarante-cinq ans, le communisme les a empêchés d'être eux-mêmes, et voilà que l'Union européenne leur joue le même tour en leur imposant des règles, notamment en faveur des migrations, dont ils ne veulent pas parce que cette politique porte atteinte à leur volonté de sauvegarder leur unité et leur identité, au souhait légitime des citoyens de préserver leur manière de vivre, et leurs libertés, dont la première est la sécurité, garantie de toutes les autres.
On en arrive à ce paradoxe : des "commissaires européens", non élus, et souvent repêchés à Bruxelles après avoir été battus chez eux, osent faire la leçon à des dirigeants qui bénéficient d'une réelle légitimité démocratique. Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán, qui est à la tête du gouvernement de Budapest pour la quatrième fois, et qui est soutenu par une majorité absolue de députés, n'a évidemment pas à se plier aux admonestations de gens qui ne possèdent pas ses titres. C'est pourquoi il a parlé de "démocratie illibérale" en évoquant la situation de la Hongrie. Elle est avant tout un pays où le peuple est maître de son destin.
Le fait même que l'on puisse contester une vérité aussi éclatante en dit long sur la pathologie de la démocratie en Europe. Des gouvernements issus d'élections difficiles aux résultats douteux, appuyés sur des coalitions de compromis, oseraient fustiger l'attitude d'un pouvoir dont la légitimité ne laisse place à aucun doute ?
Le Fidesz, le parti de Viktor Orbán, a obtenu plus de 49 % des voix et 133 députés sur 199. À sa droite figure, en deuxième position, le Jobbik, avec 20 % des voix et 26 députés. C'est dire à quel point sa politique de fermeté sur l'identité nationale et les migrations, qui s'accompagne de résultats économiques très positifs, reçoit une large approbation populaire. La contester, c'est injurier la démocratie.
De façon semblable, mais plus modérée, le gouvernement polonais s'appuie sur une majorité absolue obtenue pour la première fois par un seul parti depuis la chute du communisme, le PiS (Droit et Justice).
La coalition conservatrice autrichienne, conduite par un jeune Premier ministre, Sebastian Kurz, est tellement logique qu'elle a fait cesser le concert de critiques qui fustigeait l'alliance entre la droite de l'ÖVP et l'extrême droite du FPÖ. Cette majorité est très claire parce qu'elle est fondée sur une convergence politique, notamment sur les questions migratoires. La mettre en cause consisterait à interdire l'accès aux responsabilités d'un parti qui représente un quart des électeurs.
En Italie, l'alliance des deux partis populistes majoritaire en sièges est, certes, d'une cohérence discutable, mais les deux formations sont géographiquement complémentaires et ont conclu un contrat de gouvernement. Là aussi, celui-ci englobe un durcissement de la politique migratoire. Or, le président de la République, dénué de légitimité populaire, a tenté de censurer le gouvernement avant même son entrée en fonction. Il a fallu qu'un commissaire européen allemand, Günther Oettinger, révèle la pensée de l'oligarchie européenne en disant que "les marchés allaient apprendre aux Italiens à bien voter" pour que la colère populaire oblige le président à cesser son obstruction.
Les nations européennes sont-elles donc condamnées à être conduites par des élus qui ne sont plus l'expression d'une véritable volonté populaire ? Il n'y a, pourtant, pas de démocratie sans qu'il y ait un peuple conscient de son identité, désireux de la conserver et attaché à maîtriser le choix de son avenir !
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