[C’est vrai, ça ?] L’ultra-droite, principal risque terroriste selon la DGSI ?

extrême droite

« Le patron de la DGSI alerte sur la résurgence des actions violentes de l'ultra-droite. » Ce titre, choisi le 9 juillet dernier par plusieurs médias, revenait sur l'entretien donné au Monde par Nicolas Lerner, le patron de la DGSI. Basé sur une dépêche AFP, il laissait entendre que la menace terroriste provenant de l'ultra-droite était la principale préoccupation des services de renseignement. Une présentation manipulatoire qui a abusé plusieurs journaux établis.

La menace terroriste d'ultra-droite : principal objet des préoccupations de la DGSI ?

Le Figaro a ainsi choisi de mettre en avant, au début de son article, la partie des déclarations de Nicolas Lerner concernant l'ultra-droite, avant d'évoquer les « autres » menaces terroristes : « Depuis le printemps, nous assistons à une résurgence très préoccupante des actions violentes ou des intimidations de la part de l'ultra-droite, dont une partie s'inscrit en rupture assumée avec le cadre démocratique. »

Même choix éditorial et même titre pour France Info, qui introduit son article par ces propos : « Dans un entretien au Monde, le directeur du renseignement français rappelle que dix projets d'attentat terroriste de l'ultra-droite ont été déjoués depuis 2017 », avant d'évoquer succinctement les autres menaces terroristes citées par le patron de la DGSI : mouvances d'ultra-gauche, cause environnementale et (enfin) le risque terroriste islamiste.

Ouest-France prévient, en introduction : « Si le terrorisme djihadiste reste la principale menace de sécurité intérieure, même si elle a baissé en intensité par rapport à la période 2015-2018, un autre sujet inquiète les services de renseignement » et oriente l'essentiel de son article sur le « recours à la violence de l’ultra-droite » et cette « tentation de vouloir imposer ses idées par l’intimidation » sans même revenir sur la question de la menace islamiste, mais prenant bien soin de préciser que, concernant le mouvement d'ultra-gauche et de ses actions, « le patron de la DGSI réfute le terme d’écoterroriste ».

Le journal Sud-Ouest, qui a choisi un autre titre (« Ultra-droite en France : le patron de la sécurité intérieure alerte sur la résurgence des actions violentes »), prend le parti d'évoquer les attaques de Saint-Brevin et les contestations de l'extrême droite du CADA de Callac pour illustrer des cas de menace terroriste en France.

L'Indépendant, de son côté, annonce d'emblée la couleur avec ce titre : « 10 projets d'attentats terroristes depuis 2017 : l'alerte du patron de la DGSI sur la "résurgence" des actions violentes de l'ultra-droite », et ces sous-titres : « Environ 2.000 personnes au sein de l'ultradroite »« Des risques du côté de l'ultra-gauche » et « Un risque djihadiste moins intense ».

Pour le patron de la DGSI, le risque d’attaque djihadiste reste bien la principale menace

Ces choix éditoriaux de présentation et de commentaires des déclarations du directeur de la DGSI laissent perplexe. Le titre de l'entretien choisi par le journal Le Monde est pourtant sans équivoque, puisqu'il y est question de trois types de menaces terroristes : « Djihadisme, ultra-droite et ultra-gauche : l’appel à la "vigilance" du patron de la DGSI. » La hiérarchie des dangers est claire. « Le risque d’attaque djihadiste reste la principale menace », précise d'emblée Le Monde en introduisant l'entretien.

Nicolas Lerner dresse en effet un tableau des principales menaces parmi lesquelles, prioritairement, « le terrorisme djihadiste qui se maintient à un niveau très élevé du fait de la résilience de l’État islamique en Syrie et en Irak et de la dynamique de croissance d’autres groupes, en Afrique et en Afghanistan, au travers de l’État islamique au Khorasan [...] principalement le le djihadisme sunnite, qui est le seul qui ait tué en France ces dernières années, [qui] reste la principale menace terroriste à laquelle notre pays est confronté, et ce, durablement. »

Concernant la menace terroriste d'ultra-droite, le patron de la DGSI donne ce chiffre : « dix actions terroristes déjouées depuis 2017 en France », avant d'évoquer d'autres sources de préoccupation des renseignements, comme « l’entrée en lice des collectifs d’ultra-gauche, qu’ils soient anarcho-autonomes ou antifas ». Vient ensuite « la manière dont l’ultra-gauche investit la sphère environnementale, en y important ses modes d’action ». S'il réfute le terme « écoterrorisme », Nicolas Lerner estime que cette menace d'ultra-gauche « est un sujet de préoccupation ».

Un entretien, donc, à relire attentivement pour se faire une idée exacte de ce qui menace la France. Loin d'une lecture partielle, arbitraire et orientée qu'en donnent un certain nombre de médias reprenant à leur compte la dépêche de l'AFP.

Reste une question : pourquoi la presse a-t-elle fait le choix éditorial de de concentrer sur la menace d'ultra-droite au risque de détourner les propos du patron de la DGSI ? La réponse semble simple.

Sabine de Villeroché
Sabine de Villeroché
Journaliste à BV, ancienne avocate au barreau de Paris

Vos commentaires

38 commentaires

  1. A force de s’en prendre constamment à une partie des français sous le prétexte qu’ils voteraient mal c’est à dire pour la France de l’état nation , ils anticipent leurs réaction, je dirais même qu’ils la fantasme. Si ils veulent voir des factieux qu’ils balaient déjà devant leur porte . Il y aurait un sacré coup ménage à faire chez eux et leurs amis anti France de tout poil parce que cela sent de plus en plus mauvais!

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