Une semaine après la défaite de Marine Le Pen, un vent de sédition souffle sur les troupes frontistes. Florian Philippot serait-il sur la sellette ? Sa ligne politique semble, en tout cas, avoir du plomb dans l'aile. Le départ soudain de Marion Maréchal-Le Pen et les déclarations de plusieurs figures du nationalisme montrent un réel mécontentement quant à la stratégie du parti, prié de revenir aux fondamentaux (questions identitaires) et de modérer sa position sur l'Europe.

Des voix s'élèvent même pour demander que la sortie de l'euro ne figure plus dans le programme. "Pour nous, la question de l'euro, c'est terminé ; le peuple a fait son référendum dimanche dernier", déclare le député Gilbert Collard. Invité sur RTL, Robert Ménard a également fait savoir son opposition à toute sortie de l'euro, ce qu'il avait déjà affirmé au Figaro en avril 2016, jugeant le FN actuel "trop colbertiste". Selon le maire de Béziers, le FN devrait prendre un tournant plus libéral et renoncer à l'idée de monnaie nationale, "la victoire est à ce prix", écrit-il sur son compte Twitter. Une position partagée par l'intellectuel Laurent Ozon, qui pointe du doigt "l'échec" de la ligne Philippot.

Le principal intéressé n'a pas tardé à régir, déclarant qu'il n'hésiterait pas à quitter le Front national si celui-ci revenait sur sa proposition de quitter la zone euro. Une sortie qui lui a valu les reproches de Nicolas Bay et de Bernard Monot, le conseiller économique de Marine Le Pen qui juge l'eurodéputé "trop radical" dans son positionnement sur l'euro.

Depuis la scission de 1998, la discorde a rarement été aussi abyssale dans les rangs frontistes. La fracture entre le "FN du Nord", social-souverainiste, et le "FN du Sud", libéral-conservateur, clamée par les médias depuis de nombreuses années, en dépit des efforts du parti pour donner une image d'unité, éclate à présent au grand jour et menace le travail de longue haleine accompli par Florian Philippot, qui s'est évertué à faire du FN un parti de gouvernement. À croire que, comme en 98, certains préfèrent rester cantonnés au rang de contestataires.

À n'en plus douter, l'ennemi le plus redoutable du FN, c'est le FN lui-même. Il aura fallu une défaite (certes décevante) pour que renaissent querelles d'ego et de chapelles idéologiques, querelles que l'on pensait éteintes mais qui n'étaient en fait qu'en sommeil, attendant le moment propice pour resurgir. Marine Le Pen, dont l'autorité a pris un coup après sa piètre prestation, doit en effet se ressaisir au plus vite pour reprendre la main sur son parti et calmer les ardeurs des ténors de l'aile droite qui ne cachent plus leur mécontentement.

Renvoyer le numéro deux du FN serait une erreur funeste. Une telle concession de Marine Le Pen face à son aile droite (sur laquelle elle garde encore le contrôle et dont elle jugule les élans) marquerait le retour en force de ces sudistes dont le national-libéralisme (oxymore, s'il en est !) est un véritable repoussoir pour les classes populaires.

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13 mai 2017 à 12:48

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