Non, tout n’est pas glauque et sordide… il y a aussi une actu triste mais belle !

Capture d'écran ©Twitter
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Bien sûr, je pourrais vous parler des turpitudes d’Olivier Duhamel, connues, selon Ariane Chemin, par « toute l’élite bourgeoise de gauche qui côtoyait les Pisier-Kouchner, les Pisier-Duhamel », ou encore de la promotion d’Agnès Buzyn à l’OMS - on ne change pas une équipe qui perd. Je pourrais évoquer la campagne de vaccination - pour la rater si magistralement, le gouvernement, ne lésinant pas sur les moyens, a dû faire appel à un cabinet de conseil américain -, et aussi cet autre bad buzz d’importance qu’est le lissage brésilien de Marlène Schiappa sur Instagram - en attendant les implants capillaires de Jean Castex sur TikTok. C’est pourtant une autre actualité, humble, triste, mais belle celle-là, que je ne voudrais pas laisser passer. Parce que la France, si elle existe encore, s’y réfugie tout entière.

Qui connaît Thierville-sur-Meuse ? Enfin, qui connaissait Thierville-sur-Meuse, avant que les chaînes d’information continue ne retransmettent, mardi, la cérémonie d’hommage aux soldats tués au Mali, en direct du 1er régiment de chasseurs, sis à la périphérie de cette ville de la France périphérique qu’est… Verdun ? Florence Parly avait la voix étranglée par l’émotion, comme pour illustrer son discours : « Aujourd’hui, la France pleure, elle pleure dans le froid glacial du mois de janvier en se souvenant de la chaleur de vos âmes. » Puisqu’on liste volontiers les échecs de ce gouvernement, on peut aussi - c’est vite fait - relever ses réussites : ses discours sont à la hauteur de ce genre de circonstances, il se trouve toujours sans doute un épigone de Sylvain Fort ou de Camille Pascal pour prêter sa plume, et le résultat fait mouche. Dans un contexte d’hygiénisme échevelé, on notera que le mot « âme » a été lâché. Ouf, il n’est donc pas rayé du dictionnaire.

« Le froid glacial » de l’est de la France en hiver, les trois soldats de Lorraine l’ont sûrement éprouvé. Comme les deux soldats d’Alsace - du régiment d’Haguenau - auxquels hommage est rendu, ce jeudi. Le rythme, terrible, s’accélère… à peine le temps d’enlever les tréteaux de la cour des Invalides qu’il faut remettre le couvert. L’Alsace et la Lorraine ont le sol encore martelé des combats d’autrefois. Des régiments - clairsemés, à la localisation un peu décalée, tant on sait bien que le danger, aujourd’hui, ne vient plus de là - y demeurent. Peut-être parce que les déménager serait, pour l’armée, inutile et coûteux. Peut-être parce que détricoter le tissu social qu’ils constituent serait, pour ces petites villes, trop douloureux.

Sur Boulevard Voltaire et ailleurs, la controverse fait rage : faut-il, ou non, rester au Mali ? Je n’en sais fichtre rien. Mais la grandeur des soldats se mesure-t-elle exclusivement à l’utilité de leur mission ? Puisqu’on parle de Verdun, la boucherie consanguine que fut la guerre de 14 nous fait l’effet, aujourd’hui, d’un grand gâchis, on ne déboulonne pas pour autant l’ossuaire de Douaumont. On pourrait même oser dire, pour rester sur les bords de Meuse, que le sacrifice de la bergère de Domrémy était un peu superflu : les Anglais ne sont, somme toute, pas si antipathiques. À l’époque, ils n’étaient même pas anglicans, et le comble est qu’aujourd’hui, le gouvernement français déplore qu’ils nous quittent par le Brexit !

Parmi ces soldats, un Tahitien : le brigadier chef Tanerii Mauri. Né le 26 mai 1992 à Papeete, engagé le 2 août 2011 au sein du régiment d’infanterie de marine du Pacifique, il a demandé, par la suite, son affectation au 1er régiment de chasseurs. Il faut être fou, ou héroïque, pour choisir Verdun plutôt que Tahiti. Il faut aussi, et surtout, être fou ou héroïque pour accepter, en s'engageant, de marcher résolument vers une mort possible en vertu d’un bien commun supérieur à sa propre personne.

Si l’on ne craignait pas de faire son Tertullien de comptoir ou son Psichari grandiloquent, on dirait que le sang des soldats est aux Français ce que celui des martyrs est aux chrétiens : une semence. Cela seul a du sens.

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

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