Maths : deux mois avant les élections, Blanquer contre Blanquer

blanquer

Après la « séquence Ibiza », la nouvelle séquence de Jean-Michel Blanquer s’est déroulée en deux temps : le 6 février sur CNews face à Jean-Pierre Elkabbach et le 8 février lors de la séance de questions au gouvernement de l'Assemblée nationale. Objectif : annoncer une réforme de l’enseignement des mathématiques tel qu’il est conçu… dans la réforme du bac de Jean-Michel Blanquer. La réforme de la réforme, Blanquer contre Blanquer, la schizophrénie en marche.

Car même si Emmanuel Macron n’est toujours pas descendu de son Olympe pour prosaïquement annoncer sa candidature à l’élection présidentielle, des bribes de bilan de son quinquennat s’efforcent, ici ou là, de se frayer un chemin malgré cette absence bien opportune. Et au passif de ce bilan, il y a cette bizarre réforme du bac, qui a rendu fous proviseurs, parents d’élèves et lycéens.

En effet, pourquoi une telle annonce de Jean-Michel Blanquer ?

La disparition des sections L, S et ES du bac général a eu des effets pervers, notamment sur l’enseignement des mathématiques : cette discipline a ainsi disparu du « tronc commun » et sa pratique subsistante s’est répartie entre l’option mathématiques complémentaires et mathématiques expertes. Les élèves les plus brillants s’orientent évidemment vers les « mathématiques expertes », ce qui peut leur assurer un accès aux études scientifiques pures. L’APMEP, l’Association des professeurs de mathématiques de l’enseignement public, explique, dans une note de synthèse sur la répercussion de la réforme du bac sur l’enseignement des mathématiques, que les filles ont décroché, en mathématiques : ainsi, la part des filles qui font plus de 8 heures de maths/semaine est passée de 41 %, en 2019 – dernière année de l’ancien bac –, à 31 %, en 2021. Il y aura sans doute beaucoup moins d’étudiantes en école d’ingénieur, et peut-être même en médecine : « Dans toutes les configurations, un décrochage de la part des filles apparaît après la réforme de 2019 (2019 étant la dernière année de l’ancien système), et il est d’autant plus prononcé que le volume de maths suivi est important. »

On attend encore la réaction de Marlène Schiappa…

Pour ce qui est des élèves, filles et garçons ayant poursuivi l’étude des mathématiques après la seconde, la comparaison avant/après la réforme montre bien les failles du nouveau système.

En chiffres, cela donne : avant la réforme, 50.574 élèves (13,1 % des élèves) ne faisaient pas de maths en lycée général, contre 169.982 aujourd’hui (45,3 % des élèves). « Près de la moitié des élèves ne fait plus de maths et le nombre d’heures de formation en mathématiques baisse de façon importante […] La durée moyenne de formation en maths par élève chute de 36 %. Alors 1 heure de plus en option maths expertes [nouveau bac, NDLR] pour 8 % des filles et 22 % des garçons, c’est peu en comparaison de ce qui a été perdu. »

Ce n’est donc pas par hasard si 12 % des postes en CAPES de mathématiques sont restés vacants en 2020…

Et la petite dose supplémentaire de mathématiques dans le « tronc commun » promise par Jean-Michel Blanquer lorsqu’il a été interpellé à ce sujet à l’Assemblée nationale n’y changera pas grand-chose. Pour Jean-Rémi Giriard, président du SNALC, Syndicat national des lycées et collèges, interrogé dans Le Figaro, « il faut absolument revoir cette réforme du lycée, en conservant trois spécialités en terminale, voire en créant un certain nombre de “menus”, qui proposeraient notamment des mathématiques adaptées à des parcours moins axés “sciences pures” [...] cette logique de l’“open bar” de la réforme, où chacun se forge son propre parcours par le choix d’options et de spécialités à la carte, empêche par exemple la poursuite d’études en économie et sciences sociales ceux qui n’ont pas fait des maths renforcées au lycée. »

Cette réforme est, en fait, une réforme de la déconstruction du savoir en une discipline aussi fondamentale pour l’avenir et la grandeur d’un pays que les mathématiques. Et c’est insulter le réel que d’oser dire, à la tribune de l’Assemblée, comme l’a fait Jean-Michel Blanquer, que « la réforme du lycée est populaire chez les lycéens, ils savent qu'il y a à la fois plus de liberté et plus d'avenir avec ce que nous avons fait ».

En réalité, la réforme du bac a du plomb dans l’aile. Entrée en vigueur en 2019, voulue, promue par Jean-Michel Blanquer, elle devait être l’une des mesures phares de la révolution macroniste : elle est l’un des symboles de son échec.

Sur le dos de nos enfants.

Marie d'Armagnac
Marie d'Armagnac
Journaliste à BV, spécialiste de l'international, écrivain

Vos commentaires

15 commentaires

  1. Blanquer, le ministre de l’Abrutissement national, qui fait un demi tour à…
    … « 360° » !
    Si, si, il a osé !
    Et après nous devrions prétendre être étonné que les universités françaises sont très très loin derrière les universités asiatiques, britanniques, américaines…

  2. Qu’il retourne à Ibiza et qu’il y reste . Juste bon à tout démolir et abêtir les étudiants .Quand on voit le niveau dans nos écoles on pleure .

  3. Ils détruisent tout pendant 5 ans et à a veille de présidentielle critiquent mollement ce qu’ils ont fait. Combien de temps les Français vont-ils se faire avoir? Combien de temps vont-ils considérer les paroles au lieu de constater les actes?
    Il est évident qu’un faible niveau en maths préparent des citoyens dépourvus de sens de la logique, de rigueur intellectuelle, sans compter la charge de la preuve.
    Reconnaissons que NVB avait, avant Blanquer, saboté les programmes de maths de collège…

  4. Cette haine des socialistes pour l’intelligence est assez fondée, car c’est précisément l’intelligence qui sera l’obstacle éternel devant lequel se briseront leurs idées égalitaires. (Gustave Le Bon)

  5. N’en déplaise aux égalitaristes à tout crin, il existe bien des différences entre les aptitudes des filles et des garçons, les premières étant meilleures dans certaines disciplines et les seconds dans d’autres.

    L’essentiel est pourtant simple : faire en sorte que les programmes scolaires soient captivants et inculquer le goût de l’excellence aux élèves, bref tout le contraire de ce qui est pratiqué.

  6. Les math ne servent à rien, sauf savoir compter et rendre la monnaie pour les petits dealers. Quant à former des ingénieurs qui feront la richesse de la France, …
    En supprimant les Grandes Ecoles, trop chères par rapport aux Universités, on fera des économies gigantesques, ce dont a besoin le ministre.
    Parions qu’ils y pensent dans la macronie de demain ! On y pensait déjà sous Mitterand.
    Le désastre est annoncé. On a bien torpillé l’industrie !

  7. 12% de postes non pourvus au CAPES de maths, c’est pas grave on recrute des contractuels, parfois parlant difficilement le français (la nationalité française n’est pas exigée). Deux raisons : le vivier qui s’assèche avec la baisse du nombre d’étudiants en mathématiques surtout le salaire. Le point indiciaire est bloqué depuis 2010, c’est-à-dire depuis Sarkozy, à l’exception d’une petite hausse de 1,6% en fin de quinquennat Hollande. A comparer à l’inflation au cours de ces 12 années.

  8. Pour tous ces beaux messieurs …et ils sont nombreux ..c’est hôpital psychiatrique ou prison ..casser le pays dans tous les domaines mérite des SANCTIONS ..eux connaissent très bien ce mot ..espérons .

  9. Il n’aura pas osé avouer qu’Ibiza était la terre de ses ancêtres quittée pour Alger, terre ingrate avant sa colonisation germanique! Les médias montrèrent leur inculture s’il en était besoin!

  10. J’ai fait une TC en son temps, mes 2 filles ainées ont fait une TS il y a 10 ans: j’ai été effaré de ce qu’on demandait à nos bacheliers en sciences. On a les scientifiques que l’Education Nationale mérite.
    Ce qui me fait réagir dans votre post, c’est le décrochage des filles. je crains alors qu’au nom de l’égalité on abaisse encore le niveau pour permettre aux filles de raccrocher le wagon et rééquilibrer les forces en présence.
    Blanquer est dans le déni comme tous le reste du gouvernement.

  11. Il avait fait illusion quand on disait qu’il remettait du bon sens à l’Education nationale, mais en fait, il a contribué à sa démolition.

    • Je n’ai jamais été illusionnée par cet individu et je sais comment j’ai pu être traitée pour cette prise de position.

      Ceci était pourtant vident pour celui qui avait des oreilles pour entendre et des yeux pour voir.

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