Louis Bonnet : « Ne pas parrainer, pour un maire, c’est comme être abstentionniste pour les électeurs »

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Alors que certains candidats pesant plus de 10 % dans les intentions de vote ne sont pas assurés de pouvoir participer au scrutin présidentiel en raison du manque de parrainages, certains maires ont décidé d'organiser des consultations citoyennes, visant à faire choisir à leurs populations le nom d'un maire à parrainer.

De son côté, Louis Bonnet, maire de Mazan, commune rurale de 6.000 habitants dans le Vaucluse, près de Carpentras, propose que les maires s'entendent entre eux pour se répartir les parrainages. Il explique son action au micro de Boulevard Voltaire.

Vous êtes le maire de Mazan, en Vaucluse, à quelques kilomètres de Carpentras. Devant la difficulté pour certains candidats dont Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et Éric Zemmour d’obtenir leur parrainage, vous avez une proposition à faire. Vous proposez de les tirer à la courte paille. Pouvez-vous revenir sur les détails de cette proposition ?

Ce n’est pas vraiment à la courte paille. J’avais prévu de ne parrainer aucun candidat parce que j’ai une liste affichée sans étiquette avec des sensibilités différentes. Certains électeurs m’ont fait remarquer que pour un maire, ne pas parrainer, c’est un peu être abstentionniste pour les électeurs. C’est d’ailleurs ce que l’on reproche souvent aux électeurs.

Je me suis donc retrouvé avec mes collègues pour voir ce que nous pouvions faire pour satisfaire toute la population. Si on considère qu’il y a trois candidats qui dépassent les 10 % d’intentions de vote et qui n’ont pas encore les 500 signatures, on peut se répartir ces trois candidats entre les trois maires qui sont dans la même situation que moi, sans étiquette, et qui ne veulent pas prendre une position politique. Dans la mesure où on s’entend à trois, on se répartit les candidats.

Comment expliquez-vous que, cette fois-ci, les candidats aient du mal à avoir le soutien des maires et cette apparente réticence, vu de l’extérieur, des maires à parrainer un candidat à l’élection présidentielle, hormis la raison que vous avez avancée, de volonté d’appartenir sans étiquette ?

Les maires sans étiquette qui se retrouvent avec des équipes de plusieurs sensibilités ont des difficultés à prendre une position pour l’une ou l’autre des candidatures. Automatiquement, on vexe des collègues qui ont d’autres sensibilités. La facilité est de se dire qu’on ne parraine pas. Mais, finalement, le contexte fait que si on ne parraine pas, on pénalise une partie de la population. Si ces trois candidats de bord politique très différents qui représentent à eux trois 40 % des intentions de vote ne sont pas présents lors du premier tour, c’est grave. C’est ce qui m’a donné l’envie de proposer à des collègues maires de se regrouper et de dire que l’on se répartit les parrainages à trois ou à six ou à neuf.

Il y a la volonté symbolique de David Lisnard, le président de L’AMF, de parrainer Jean-Luc Mélenchon, a priori un candidat à l’opposé de ses idées. Il y a aussi eu la volonté de François Bayrou de créer une espèce de banque des parrainages. Cette situation et votre initiative sont assez inédites.

Le président de la région PACA, M. Muselier, a écrit un courrier en disant que si des maires prennent position pour tel ou tel candidat en les parrainant, cela n’engage pas l’avenir de la commune par des soutiens financiers de la région. Cela rassure les maires ruraux comme je suis.

Ce chantage aux subventions, c’est une réalité que vous observez ?

C’est toujours la crainte. Lorsque la commune investit sur des projets de 3 à 4 millions d’euros, on sait qu’il faut rassembler un certain nombre de financements du département, de la région et de l’État. On ne veut pas du tout se mettre en porte-à-faux vis-à-vis des financeurs. Le fait que le président de la région PACA annonce qu’il ne tiendra pas compte du positionnement des maires et de leur parrainage nous rassure et va inciter un certain nombre de maires ruraux de venir pour parrainer.

C’est à la fois rassurant et inquiétant. Il y a une « prise d’otage » des maires et des élus locaux. Rendre des comptes de leur parrainage à leurs électeurs c’est une chose, mais aux différentes collectivités, on appellerait cela du chantage.

C’est davantage une crainte qu’autre chose. Le chantage n’existe pas, au contraire. M. Muselier a annoncé le contraire et a fait cela pour désamorcer les craintes que certains maires pouvaient avoir. C’est très bien qu’il ait fait ce courrier à tous les maires.

Marc Eynaud
Marc Eynaud
Journaliste à BV

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