Les évêques et l’élection présidentielle : neutralité ou parti pris ?

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La Conférence des évêques marche sur des œufs. Plus question, comme en 2002, de mettre en garde les électeurs contre les thèses soutenues par ce diable de Jean-Marie Le Pen, ni même, comme en 2017, montrer discrètement leurs préférences pour Emmanuel Macron contre Marine Le Pen. À l'approche du prochain scrutin présidentiel, dans un texte publié le 18 janvier, sous le titre emprunté à l'apôtre saint Paul « L'Espérance ne déçoit pas », elle se garde de toute consigne de vote, mais a du mal à rester neutre.

Les évêques savent que les catholiques ont des positions politiques diverses et qu'il faut en tenir compte, fût-ce par pragmatisme, pour ne pas vider davantage les églises. En 2017, au premier tour, beaucoup de pratiquants avaient voté pour François Fillon, une majorité avait préféré Macron, sans compter Marine Le Pen, qui avait aussi attiré des suffrages. Cette fois, ils ont choisi d'encourager chacun à « voter en conscience à la lumière des critères de discernement qu’enseigne le Magistère de l’Église ».

La Conférence des évêques rappelle effectivement sa doctrine quand elle défend « le respect inconditionnel de toute vie humaine » ou rappelle que la véritable humanité exige « le respect et l’accompagnement attentif et bienveillant de chaque personne à tous les stades de son existence ». Elle rejette l'euthanasie, tout comme l'acharnement thérapeutique, et dénonce l’élargissement du droit à l’avortement. Elle souligne, enfin, la nécessité de respecter la « structure familiale » et la « vérité de la filiation ». Elle ne va pas jusqu'à dire que les récents gouvernements, dans ces domaines, ont failli.

L'Église est dans son rôle quand elle défend des principes sans lesquels elle se dénaturerait. Mais quand, dans un chapitre intitulé La France n’est pas une île, les évêques réaffirment leur attachement à la construction européenne, qui ne doit pas « tomber dans l’impuissance, la dérive libertaire, l’excès technocratique, le renoncement à promouvoir de vraies valeurs morales, au risque de contribuer à susciter des replis nationalistes », on est en droit de se demander s'ils ne sortent pas de leur champ de compétences : ils se comportent plus comme des Macron en soutane que des vicaires du Christ.

De même, quand ils expriment leur souci de favoriser l’accueil des migrants, un « accueil ajusté », fondé sur la « légitimité de la régulation juridique des flux migratoires », ou rappellent que « la peur est toujours mauvaise conseillère » et que « le repli sur soi ne mène ni à la paix ni au bonheur », à défaut de donner des consignes de vote, ils révèlent où vont leurs préférences. Ils semblent même, quand ils précisent que « toutes les initiatives d’inclusion des personnes en situation de handicap dans le monde scolaire ou du travail contribuent à la santé de l’ensemble de notre société », critiquer expressément le propos récent d'Éric Zemmour.

À moins de trois mois de l'élection présidentielle, la Conférence des évêques de France, sous les apparences de la neutralité, peine à se soustraire aux préjugés. Paradoxalement, elle met plus en garde contre des candidats qui défendent les racines chrétiennes de la France et de l'Europe que contre ceux qui les négligent ou les nient. Sans doute reste-t-il quelques rares évêques qui ne sont pas contaminés par cette bien-pensance ; mais si, au second tour, Marine Le Pen ou Éric Zemmour se retrouve face à Emmanuel Macron, il n'est pas difficile de savoir pour qui beaucoup prendront parti.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

Vos commentaires

101 commentaires

  1. Je ne comprends pas la position de l’église. Pourquoi ne pas parler des profanations, des menaces sur les processions. Mais avec un pape qui ne s’intéresse qu’aux migrants !

  2. Il est temps pour les catholiques de se réveiller car c’est leur religion qu’on assassine en ce moment en France et dans le Monde entier. La seule solution est que « la fille ainée de l’église » retire d’abord tous les voiles dont les progressistes l’ont affublée en trahissant la laïcité. Ensuite, qu’elle prenne la tête d’une croisade pour libérer ses ouailles opprimées. Il me semble que seul Eric Zemmour aura le courage de rétablir la civilisation judéo chrétienne en France.

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