Le recteur de la grande mosquée de Paris incite à voter contre le RN : ça passe crème !

C’est tout de même curieux, la laïcité. C’est une sorte de principe de neutralité politique qui contraint les religions, en France, à ne pas s’afficher publiquement et à ne se mêler que de la foi. Ça pourrait ne pas être si mal, mais voilà : ça ne marche que dans un sens. Quand ce sont les évêques de France qui, en 2002, appellent à voter contre Jean-Marie Le Pen pour faire barrage à la haine, ça passe. Quand les mêmes évêques osent accueillir des communautés traditionnelles (à Toulon ou Bayonne), ça ne passe plus. Quand c’est pour le pèlé de Chartres, on n’en parle même pas : voyez la réaction de Laura Jovignot, à deux doigts de la convulsion quand elle a croisé des scouts, mais incapable de dire un mot sur le niqab.

Là aussi, on dirait que ça ne marche que dans un sens, d’ailleurs : pour l’islam, il y a une forme de tolérance encore plus grande. Chems-Eddine Hafiz, recteur de la grande mosquée de Paris, a ainsi appelé à lutter contre le RN aux élections européennes. Et pas dans n’importe quel média : il a publié sa tribune dans Iqra, le magazine officiel de la grande mosquée, le 22 mai. L’imam veut une « société inclusive et respectueuse des droits de tous ». Pour cela, il appelle l’électorat musulman à se mobiliser massivement, car une victoire du RN (désormais plus que probable) « pourrait exacerber les tensions sociales, renforcer les stéréotypes négatifs et marginaliser davantage cette communauté, compromettant ainsi les principes fondamentaux de liberté, d’égalité et de fraternité ». Rien que ça.

Une leçon parfaitement « récitée »

On peut dire que l’imam connaît son métier, il déroule les éléments de langage de la République comme personne. Pour ceux de nos lecteurs qui ne connaîtraient pas l’origine du titre de ce magazine, on signale que « Iqra » veut dire « Récite ! » en arabe, et que ce fut, d’après le Coran, la première parole qu’adressa l’archange Gabriel (Djibril) à Mahomet. On peut dire que M. Hafiz a pris ce titre au pied de la lettre : sa tribune sent le réchauffé. La Conférence des évêques de France n’aurait même pas osé un tel enfilement de clichés sur le vivre ensemble.

Les réactions politiques ne se sont pas fait attendre, du côté du RN : Jean-Philippe Tanguy signale, sur X, que le gouvernement algérien finance la grande mosquée à hauteur de deux millions d’euros et que la grande mosquée est depuis longtemps sous emprise algérienne. Ce coup à plusieurs bandes ne trompe pas davantage Thierry Mariani, qui ironise sur le fait que ni Macron ni Glucksmann n’ont demandé d’enquête sur cette ingérence étrangère avérée. Mais que voulez-vous, l’ingérence étrangère, c’est comme la laïcité ou le chasseur dans le sketch des Inconnus : il y a la bonne ingérence (l’Algérie contre le RN) et la mauvaise (l’Azerbaïdjan en Nouvelle-Calédonie). La vérité, c’est que toute ingérence d’un pays hostile a pour but de nous détruire à plus ou moins long terme, a minima de nous nuire, avec des outils plus ou moins raffinés, et qu’il ne faut absolument rien céder à ces gens-là.

Avec cet appel, la mobilisation des musulmans de France profitera probablement à la gauche et à Renaissance, donc on ferme les yeux. Pour l’islamisation du territoire, on verra plus tard, après les élections. Et, comme disait Vialatte, c’est ainsi qu’Allah est grand.

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