Hidalgo-Macron : règlement de comptes sur fond de tour Eiffel

Macron Hidalgo

On l’appelle « la vieille dame ». Il s’agit de la tour Eiffel, ce « symbole hardi de la République ». D’aucuns y ont même vu un symbole phallique, gage de virilité. Pour Jill Jonnes, historienne qui lui a consacré un ouvrage, la tour marque « le triomphe de la société moderne, cosmopolite et laïque ». C’est pour toutes ces raisons, peut-être, qu’Emmanuel Macron a choisi de fêter sa réélection, dimanche soir, à ses pieds.

Lorsqu’elle sortit de terre pour l’Exposition universelle de 1889, la tour Eiffel devait montrer au monde entier que la France était une puissance au génie inégalé, s’engageant résolument dans la modernité technologique. C’est aussi ce qu’aurait souhaité Emmanuel Macron lorsque, le 7 mai 2017, il accéda pour la première fois à la magistrature suprême.

Pompe pour pompe, il s’offrit le Louvre et sa pyramide. Ca n’était pas son choix : il voulait (déjà) la tour Eiffel. Mais voilà, la vieille dame appartient à la ville de Paris… et Anne Hidalgo, son maire, opposa son veto : la tour Eiffel est à Paris et Paris lui appartient. Enfin, c’est ce qu’elle pense... Elle évoqua, à l’époque, les futurs Jeux olympiques, son heure de gloire pour 2024. Elle attendait alors le Comité olympique et le raout macronien aurait endommagé la pelouse, qu’elle dit. Macron s’en fut donc au Louvre et Hidalgo ne jugea pas utile d’assister à l’investiture du nouveau Président. Elle avait mieux à faire : recevoir ledit Comité olympique.

Cinq ans sont passés, l’eau de la Seine a coulé sous le pont Mirabeau… et nos haines, faut-il qu’il m’en souvienne, la peine venait toujours après la joie… Vienne la nuit, sonne l’heure, les jours s’en vont, il demeure… Qu’Apollinaire pardonne ce mauvais plagiat. Reste qu’il résume bien les rapports extrêmement tendus entre le pouvoir et la mairie de Paris.

Ainsi donc, ce dimanche soir, Emmanuel Macron aurait voulu que la tour Eiffel scintillât de tous ses feux alors qu’il s’avançait sur le Champ-de-Mars pour remercier les électeurs. Problème : il n’était que 21 h 30. D’où le refus de la mairie : la tour scintille à heure fixe dès la tombée de la nuit. Donc, 22 heures ou rien. Pas question d’appuyer sur le bouton.

Le Président, raconte Le Figaro, serait entré dans une colère froide devant ce qu’il considère comme une mesquine vengeance du maire de Paris. Traduction d’un de ses proches : « C’est ce qui s’appelle “1,75 % de pouvoir de nuisance” » - allusion au score d’Anne Hidalgo au premier tour des présidentielles.

Il faut dire que ces deux-là se sont copieusement haïs durant cinq ans et – toute honte bue – le maire de Paris n’a pas l’intention de quitter son poste : les Parisiens l’ont voulu, ils l’ont et l’auront jusqu’au printemps 2026. Soit encore le temps, largement, de finir de massacrer la capitale et de laisser prospérer les camps de migrants et autres collines du crack en accusant l’État d’impéritie.

Emmanuel Macron a rassemblé son monde au Champ-de-Mars devant une tour Eiffel se refusant à pétiller. « Pour des raisons entendables d’ordre public », la préfecture de police de Paris a fait fermer la billetterie à 17 heures au lieu de 23 h 45. Pas question de laisser grimper les touristes. La Société d’exploitation de la tour a chiffré son manque à gagner : « 160.000 euros en billetterie perdus » qui vont faire l’objet d’âpres négociations. Rappelons que le monument tourne autour des 100 millions de chiffre d’affaires annuel, avec près de 7 millions de visiteurs et la « dame pipi » la mieux payée au monde.

Seule question intéressante : qui va payer le manque à gagner, les comptes de campagne du candidat Macron ou les impôts des Français ?

Marie Delarue
Marie Delarue
Journaliste à BV, artiste

Vos commentaires

27 commentaires

  1. Anne Hidalgo n’a pas jugé bon, un certain 14 Juillet, d’annuler un feu d’artifice en signe de deuil, alors que des dizaines de touristes étaient tués ou blessés par un attentat terroriste sur la Promenade des Anglais à Nice. Alors, pour madame 2 %, il ne faut pas attendre de traitement de faveur pour le Président. Qu’il s’estime heureux si on ne lui impute pas une amende pour piétinement des pelouses du Champ de Mars. On sait, à Paris, ce qui est important et ce qui ne l’est pas.

  2. Mais je croyais que Machiavel était soudain devenu sensible à l’écologie ? Alors pourquoi exiger qu’on illumine la tour Eiffel juste parce qu’elle apparaissait en arrière plan de sa mascarade ? Du même niveau que le vote de castex en jet ?

  3. Elle aurait été plus futée de mettre cela sur le risque de black out électrique dû à certaines décisions du susdit et donc de son souci d’économiser l’énergie de notre avenir pour un événement qui aurait plutôt dû susciter une plongée dans les ténèbres.Une forme d’extinction rébellion au final.

  4. Que la lumière soit et la lumière ne fût plus – encore une insulte pour les français qui souffrent et qui auraient souhaité plus de respect plutôt que de voir briller celui à l’origine de tous leurs maux.

  5. Le clivage droite-gauche a changé de costume : de grandes villes peuplées de libertaires drogués par les médias et totalement esclave du Dieu marchand, de l’autre les campagnes et petites agglomérations peuplées par la normalité en colère. Pour l’instant et l’année sera difficile, ils fanfaronnent mais pas pour bien longtemps. La machine économique ne va pas tarder à rappeler à tout ce beau monde le sens des réalités.

    • « de l’autre les campagnes et petites agglomérations peuplées par la normalité en colère. » Et qui nourrissent les premières.

  6. Les mises en scène théâtrales macronienne ont toujours un coût. Tél Robespierre au champ de Mars j’aurais bien vu Macron drapé de blanc couronne de lauriers sur la tête avancer vers l’endroit toutes lumières allumées.
    La science infuse incarnée mérite un moment de gloriole.

    • le Champ de mars a été le début de la chute de Robespierre…beaucoup de Parisiens s’étaient moqué de lui en disant qu’il se prenait pour Dieu

  7. Et qui va payer le faste du champ de Mars et les milliers de policiers déployés pour la protection de « grand petit homme » ? Car quand bien même ils concerneraient les comptes de campagne du président candidat, ces derniers sont remboursés par qui ? Le CONtribuable bien sur !

  8. « qui va payer le manque à gagner, les comptes de campagne du candidat Macron ou les impôts des Français ? »
    J’ai l’impression depuis le début qu’il n’y a pas de différence…

    • Ça ne date pas que « du début ». Il y a longtemps que M. Macron (mais aussi UMPS et LREM) fait la poche des Français faisant main basse sur le moindre cent qui pourrait encore s’y trouver. La cleptomanie est une forme exagérée de la magie !

  9. Voilà, il nous faudra payer encore avec nos impôts cette bataille des lumières. Et quand je dis lumières…

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Revivez le Grand oral des candidats de droite

Les plus lus du jour

L'intervention média

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois