Contre la radicalité, une seule solution : la culture. Mais pas celle des « quartiers » !
Le retrait de Mennel Ibtissem de "The Voice" a agité la blogosphère puis les médias pendant des jours. C’est l’histoire d’une gamine ballottée dans notre société à fleur de peau, une adolescente nourrie aux raccourcis idéologiques des furieux qui se disputent le marché des têtes creuses. Elle ne méritait sans doute pas de devenir l’objet de tant de hargne ni d’autant d’intérêt, les deux camps qui se l’arrachent – celui de Tariq Ramadan ou la "fachosphère" – se disputant la palme des propos haineux crachés sur les réseaux. Triste temps de l’impulsivité et de l’anonymat qui ne va pas en s’arrangeant.
Avec retard sur l’actualité en question, Christiane Taubira est sortie de son silence pour adresser à la demoiselle une longue missive sur Facebook. Au menu : flatterie, compassion et petite leçon de maintien.
Christiane Taubira écrit bien, c’est un talent qu’il faut lui reconnaître. De là à bien penser, c’est autre chose, et dans cette (pseudo-)affaire comme dans tout ce qu’elle a approché, on sent poindre l’idéologue. J’entends par là que toutes ses analyses sont marquées d’une lecture systématiquement passée au crible du racisme dont elle et ses semblables ne sauraient être que les victimes.
Notre ex-ministre félicite la jeune femme pour son turban, pour sa reprise de Leonard Cohen, ce qui prouve sa grande ouverture d’esprit. Elle l’entraîne dans une longue complicité musicale, étalant dans ce domaine du "cohenisme" une culture dont on n’est pas sûr que l’autre la partage. La félicite, surtout, de chanter l’œuvre d’un juif. Ajoute : "Vos références intellectuelles [Dieudonné et Tariq Ramadan, NDLR] étaient loin d'être recommandables. Je ne me situe pas dans le champ moral, il est le moins fécond. [...] Le souci, c'est la fascination qu'ils parviennent à exercer sur de jeunes esprits, même brillants. C'est cela, le seul sujet, pour nous autres adultes." Dommage que Mme Taubira ne s’interroge pas sur sa propre responsabilité dans tout cela, sur les crispations qu’elle-même a pu susciter par son sectarisme…
Elle offre de notre pays "d’agressions antisémites, de défiance et d’injures à l’encontre des musulmans, d’actes et de propos racistes, de déchaînement xénophobe, de résurgence homophobe, d’arrogance sexiste" une vision réductrice qui fait froid dans le dos, même si elle conclut que "la France reste une terre de passion et de générosité" et que "c’est bien là qu’il faut vivre".
Dans cette veine de « l’entre-soi des victimes » qu’illustre si bien Christiane Taubira, l’une des pistes explorées pour combattre la radicalisation des jeunes musulmans est de faire tourner dans les quartiers des pièces de théâtre sur la thématique du djihad. Dans un papier qu’il consacre au sujet, Le Figaro écrit :
Plutôt que de tenter de faire vibrer la corde patriotique auprès de jeunes peu réceptifs, le parti pris est celui de mobiliser des “influenceur” issus de l'immigration et des musulmans, afin d'infuser la bonne parole au cœur des quartiers.
Au programme, la pièce Djihad, d’Ismaël Saïdi, qui sera donnée prochainement dans la région de Lille, Nour, pourquoi n'ai-je rien vu venir ?, de Rachid Benzine ou encore Un muslim qui te veut du bien, la websérie de Farid Abdelkrim.
Peut-être ai-je tort, mais j’éprouve face à tout cela un malaise certain. Tout comme me met mal à l’aise l’idée qu’on lutte contre le racket à l’école en animant des ateliers-théâtre sur… le racket ; comme me scandalisa, suite aux émeutes de 2005, l’exposition organisée au Plateau (centre d’art contemporain dans le XIXe arrt de Paris) qui présentait une carcasse de voiture brûlée… réalisée en céramique, ce qui change tout, bien sûr.
J’y vois, moi, contrairement à l’objectif annoncé, une expression très aboutie du racisme : laissons tous ces jeunes dans les limites de leur ghetto mental et culturel. Pour eux, pas de grands textes universels, de "grande musique", de beauté. Toutes ces choses qui pourraient les élever au-dessus de leur condition !
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