« Marion Maréchal-Le Pen a fait un retour remarquable, elle a su trouver les mots ! »

Robert Ménard réagit au retour de Marion Maréchal-Le Pen.

"Elle n'a pas donné une image caricaturale de la droite nationale française ! Avec un bémol : Marion a tort de se mettre dans ce corner de la droite catholique un peu réac sur l'euthanasie, etc. Ce sont ses positions personnelles, mais cela la coupe d'une grande partie de l'opinion. Il faut aussi savoir tisser des alliances."

Sur son recul métapolitique : "Qu'on ait des envies de métapolitique et de bataille culturelle à la Gramsci, c'est bien. Mais on a aussi des devoirs. La France exige d'autres engagements. Les gens qui ont des problèmes concrets attendent des réactions urgentes."

Robert Ménard, vous avez suivi comme tout le monde le discours de Marion Maréchal-Le Pen aux États-Unis. Qu’en avez-vous pensé ?

J’ai trouvé que c’était tout à fait remarquable à plusieurs titres.
Elle a su trouver des mots qui touchent le cœur de son public américain. Elle ne donne pas une image caricaturale d’une partie de la droite nationale française. Elle sait qu’aux États-Unis, il ne faut pas demander aux Américains de se mettre au service de l’Europe, mais au service de leur propre pays, comme on demande aux leaders de notre pays d’être au service de la France.
J’ai donc trouvé que c’était très bien.
Je mettrais un bémol sur les questions de société, comme toujours quand j’entends Marion. Elle a tort de se mettre dans ce corner de la droite catholique un peu réac, sur l’euthanasie par exemple ou d’autres sujets du même type. Ce sont certes ses opinions personnelles, mais elles la coupent de toute une partie de la droite au sens large.
J’ai vu que tout cela aller déboucher sur une école de commerce et de management. Je le comprends à titre individuel, mais je pense que la France exige d’autres engagements en ce moment.

Y a-t-il une incohérence selon vous à appeler à un conservatisme des deux rives en se concentrant sur la métapolitique ?

Même si 11 millions d’électeurs ont voté pour le Front national l’année dernière, n’en déplaise à sa tante, c’est quand même une sacrée défaite. Il est peut-être temps de reprendre les choses à la base. Il faut réfléchir, remettre un certain nombre d’idées noir sur blanc et voir pourquoi ce qu’on dit continue à faire peur à une partie de la population. Pourtant, une bonne partie des mesures que nous avançons ne sont que des mesures de bon sens.
Il faut aussi savoir tisser des alliances. Pour tisser des alliances, il faut respecter les gens qui pensent différemment. Je pense que Marion est prête à le faire, mais que son parti l’est nettement moins. Qu’elle souhaite se tenir à distance de tout cela, je la comprends totalement. Il reste que cela ne suffit pas aujourd’hui. Il y a des échéances et gens qui ne peuvent pas attendre. Si à Béziers, je disais aux gens que je croise dans la rue que je vais faire un peu de métapolitique et réfléchir, car je suis un peu jeune, et que j’ai un peu le temps de voir venir, ils me demanderaient si je ne me fiche pas d’eux. Les gens en difficulté, ceux qui ont des problèmes concrets, ont envie qu’on les aide à se sortir de là.
Je veux bien la métapolitique, il faut réfléchir, je veux bien Gramsci et la bataille culturelle, je l’entends fort bien. Je comprends que chacun ait des envies. On a des envies, mais aussi des devoirs.

Selon vous, il faudrait du concret tout de suite.

Il faut répondre aux attentes des gens. Il faut faire preuve à la fois de réalisme, de bon sens et de pragmatisme. Beaucoup de gens, comme Marion ou moi, n’ont pas le souci des 2 ou 3 euros qui manquent à la fin de mois. Je rencontre de nombreuses personnes dans ma ville qui sont à 20 ou 30 euros à la fin du mois. Il faut répondre dès aujourd’hui à leurs soucis.
On ne peut pas dire qu’il y a urgence à sauver ce pays, n’exagérons pas, il n’est pas moribond, mais il faut à tout le moins trouver des solutions, et se donner tout le temps de la réflexion.
Je rappelle à Marion Maréchal-Le Pen que Gramsci se présentait comme un intellectuel organique. Il était un intellectuel certes, mais il était lié à ce qu’il appelait à l’époque le prolétariat, nous pourrions parler aujourd'hui du peuple, et qui essayait de trouver des solutions au jour le jour pour ces gens-là.

Robert Ménard
Robert Ménard
Maire de Béziers, ancien journaliste, fondateur de Reporters sans frontières et de Boulevard Voltaire

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