Le syndicat de police VIGI porte plainte contre Édouard Philippe, Christophe Castaner et Laurent Nuñez pour mise en danger délibérée de la vie d'autrui, en raison notamment du manque de masques de protection à destination des policiers sur le terrain.

Explications d'Alexandre Langlois au micro de Boulevard Voltaire.

Au nom du syndicat VIGI, vous portez plainte pour mise en danger de la vie d’autrui contre Christophe Castaner, Laurent Nuñez et Édouard Philippe. Pourquoi ?

Nous portons plainte pour une raison simple. Au mois de mars, nous avons écrit une lettre ouverte au ministre en lui demandant deux choses : de nous donner les moyens de protection pour assurer nos missions – d’avoir tout simplement des masques – et qu’en attendant, nos collègues puissent utiliser leur droit de retrait. Nous n'avons pas eu de réponse. Nos masques ont été réquisitionnés pour être donnés en priorité aux soignants, ce qu'on comprend, mais rien n'a été mis en place pour assurer la sécurité de nos collègues au travail. Concernant le droit de retrait, le service d'information du ministère de l'Intérieur a affirmé qu'il n'y avait pas de droit de retrait pour les policiers, tout en disant que nous avons des missions dangereuses. Or, il faut avoir les moyens de les assurer ! C'est comme si le ministre nous demandait d’intervenir sur un acte terroriste sans arme et sans gilet pare-balles.
Devant l'inaction de ce gouvernement et même notre mise en danger, nous avons déposé plainte, d'autant que nous avons déjà deux de nos collègues qui sont décédés du Covid-19. Nous avons également déposé un recours en référé au niveau du Conseil d'État car, en France, les masques sont détruits après utilisation sur ordre du gouvernement. Dans d'autres pays, notamment aux États-Unis, des méthodes scientifiques permettent de reconditionner les masques pour les réutiliser. Dans un contexte de pénurie, cette méthode pourrait être utilisée en France.

Le préfet de Paris, M. Lallement, a déclaré que les forces de l'ordre seraient extrêmement sévères vis-à-vis de ceux qui décideraient de partir en vacances. Est-ce que cela va dans le bon sens ?

La loi doit être la même pour tout le monde, le confinement n'est pas fait pour partir en vacances, donc il faut être sévère.

N'y a-t-il tout de même pas un deux poids deux mesures de la part du préfet de police, intraitable avec les gens qui partent en vacances, mais qui laisse prospérer des zones de non-droit où les policiers qui veulent intervenir sont régulièrement pris à partie à l'aide d'engins pyrotechniques létaux ?

Certains peuvent faire des discours va-t-en-guerre, mais ils n'appliqueront pas ce qu’ils disent car ils n'ont pas les effectifs. Cela peut faire peur à une certaine partie de la population, notamment la classe moyenne qui sera solvable si elle prend une contravention, mais les contraventions ne touchent pas les populations les plus récalcitrantes au confinement, qui ne sont généralement pas solvables. Plutôt que des discours, ce serait bien de se concentrer sur tous les territoires sans distinction puisque le virus lui-même n’en fait pas. Partout, il faut lutter avec un confinement strict et redéployer les policiers des zones les plus calmes vers les zones les plus difficiles, avec l'équipement adéquat.

Plus de 10.000 policiers seraient à l'arrêt pour suspicion de Covid-19, 257 auraient été testés positifs. Est-ce que cette épidémie pourrait être problématique en termes d'effectifs ?

La police est déjà en sous-effectif depuis des années ! Cela a commencé sous la présidence de Nicolas Sarkozy, qui a supprimé 10.000 postes de policiers sous son quinquennat, et cela n'a jamais été rattrapé. Or, la population augmentant, la délinquance augmente également. Nous avons également eu des attentats, des conflits sociaux et sociétaux de grande ampleur, et le Covid-19 va aggraver les choses.
La difficulté va être la suite. Le gouvernement a rappelé l'armée, le préfet de police parle de « policiers et militaires » dans un de ses discours. Il faut peut-être des mesures exceptionnelles, mais il faut qu'elles le soient parce que nous n'avons pas le choix, pas parce qu'il y a eu une débandade de l'organisation du ministère de l’Intérieur.

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04 avril 2020 à 10:32

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