Raphaël Enthoven, en progressiste « sûr de lui », est venu faire sa petite leçon à la droite

ENTHOVEN

« Le retour en arrière fait-il un programme ? » Aucun titre ne pouvait mieux convenir au discours de Raphaël Enthoven, invité, samedi, à parler à la Convention de la droite. Son but était de « déconstruire » le mouvement à naître d’une nouvelle droite en le projetant dans un passé révolu. Un vrai poncif ! Du « Radeau de La Méduse » au pré carré, des impasses où l’on s’engouffre à la lune au bout d’une échelle, « de la nostalgie qui ne fait pas un projet au retour en arrière qui ne fait pas un avenir, de la restauration qui n’est pas un plat de résistance », tout y était du plat attendu. Jusqu’à la phrase sublime qu’il fallait oser sans rire : « J’en prends l’avenir à témoin. » Mazette ! Quelques minutes papillon avec Descartes et Badinter, Camus et Gary. Ce fut dense et convaincant. Sans rendre compte de tout, ni des propos brûlants sur l’identité qui n’existe pas, et la guerre d’Algérie, contentons-nous ici de remarques sur les questions sociétales.

« Les Républicains achèvent de mourir sur des questions sociétales. » Le parti pris de l’orateur est net. La défense de la vie est appelé « leur lot de consolation ». Décidément, de Schiappa à Buzyn en passant par Théry, comme on n’a pas d’arguments contre les lois à venir, on assène. On amalgame. Le credo du parti au pouvoir est « le progrès irréversible. » On se croirait revenu aux romans du XIXe siècle.

« Le mouvement en avant de la société libérale est irréversible », martèle le philosophe. Le droit d’avorter pour les femmes si elles le désirent, le droit de disposer de son corps, tout cela est irréversible. Revenir sur l’IVG, la PMA (la GPA, si elle arrive ), l’euthanasie, le cannabis, tout cela est impossible car c’est ir-ré-ver-sible. Et le philosophe de lancer : « Votre idée de la famille ne protège pas des vices. » On reste baba devant tant de rigueur. S’agit-il de vices dans la défense du « droit » d’un orphelin, programmé, à connaître son père ? Quant à l’amalgame (ou le raccourci) avec « les exécutions furtives au petit matin », il n’était pas digne d’un philosophe, fût-il de salon.

« Ce qui m’autorise à être sûr de moi, c’est la nature humaine en personne », dit sérieusement, à un moment, notre orateur. Cette perle vérifierait, à elle seule, et si besoin était, cette vérité banalisée que, décidément, la droite a gagné la bataille des idées. À ce morceau involontaire d’autodérision de Raphaël Enthoven, Paul-Marie Coûteaux, de son arche de Noé, répondit magistralement, ainsi que Fabrice Hadjaj, non moins magistralement, de son « Radeau de La Méduse » (en ralentissant, lors d’une table ronde, le tempo frénétique du discours d’Olivier Barbeau). Pour lors, méditons la phrase citée par Raphaël Enthoven, de Descartes, invitant les esprits à « changer leurs désirs plutôt que l’ordre du monde ». Et disons à celui qui eut la bonne grâce de venir exorciser les démons ambiants : « Merci, Monsieur Enthoven, pour ce quart d’heure philosophique. »

Marie-Hélène Verdier
Marie-Hélène Verdier
Agrégée de Lettres Classiques

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

L'intervention média

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois