Arnaud Florac a démonté la grossière imposture de ces Conseils de défense auxquels se shoote littéralement la présidence Macron. Cette institution (le Conseil de défense et de sécurité nationale, CDSN, créé en 2009) présidée par le président de la République et qui rassemble le Premier ministre, les ministres de l'Économie et de la Défense ainsi que ceux concernés par la crise du moment et tout expert désigné par le Président, a été réactivée par François Hollande après les attentats de 2015. Cela pouvait se comprendre. Mais réuni dix fois en 2015, trente-deux fois en 2016 et quarante-deux fois en 2017, il le sera quarante fois entre mars et octobre 2020 pour le Covid-19. Et c'est là que le bât blesse : il ne s'agissait plus de défense. Et le secret sur les raisons justifiant des restrictions de liberté considérables (confinement, passe sanitaire, etc.) pose toujours question. Donc, rebelotte pour la crise énergétique. On peut comprendre, après tout, qu'Emmanuel Macron ne jure que par ce mode de gouvernance, pour contestable qu'il soit : n'a-t-il pas été réélu malgré cela (et, pour beaucoup de ses électeurs, grâce à cela) ? Donc, pourquoi se priver d'un outil qui dramatise, apeure, tout en donnant une illusion de sérieux, mais qui surtout limite les explications et le débat démocratique ?

C'est ce petit caillou de la démocratie dans la chaussure présidentielle qu'a secoué Marine Le Pen dans sa lettre à Élisabeth Borne. La présente du groupe RN à l'Assemblée a mis en garde l'exécutif contre la tentation de rejouer le scénario Covid : « Les députés du Rassemblement national, comme je crois des millions de nos compatriotes, refusent que les élus de la nation ne soient pas pleinement associés à la résolution de la crise comme l'exigent tous les principes républicains. Nous contestons que le président de la République contourne le Parlement pour gérer la crise avec un Conseil de défense énergétique. » L'exécutif, qui ne dispose plus de sa majorité absolue, serait bien inspiré d'entendre ces évidences démocratiques.

Qu'est-il donc sorti de ce premier Conseil de défense « énergie » ? C'est bien tout le paradoxe et l'enfumage du machin : « chut ! », secret, il ne doit justement rien en sortir. Mais le problème, c'est que nous nous demandons tous : alors, le prix du kWh, et ma chaudière ? Et mes factures ? Donc, le CDSN se doit de parler un peu, pour maintenir l'addiction du public à la chose, et c'est Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique, qui a été chargée de lâcher quelques paroles sibyllines. Elle avait dû lire Georges Michel et, si elle n'a pas osé le général Hiver, elle a quand même filé la métaphore : « Mobilisation générale ». Rien que ça... Cela devient lassant, cette dévaluation systématique des mots : nous savons bien que l'effort qui nous sera demandé avec nos thermostats n'aura rien de commun avec le sacrifice de l'arrière-grand-père ou du grand-père notifié par l'affiche placardée devant la mairie, un beau jour de l'été 14 ou de l'été 39... Et puis la Macronie devrait se méfier : à ajouter à son incompétence et son imprévoyance - patentes dans cette crise énergétique - une com' outrancière, elle pourrait un jour être prise au mot, justement. Il ne faudrait pas que certains esprits mal placés, ou tout aussi outranciers, quand nous aurons gagné cette nouvelle guerre, aient l'idée de chercher des responsables, voire des coupables, à ces crises. Le vocabulaire de nos guerres est riche : les embusqués, les planqués, les profiteurs, les collabos... Je me disais cela en écoutant la longue séquence où Elisabeth Borne tentait maladroitement, il y a trois jours, avec moult gestes (plus nombreux que ceux de son traducteur en LDS) et une phrase sans queue ni tête, de répondre à la question de sa responsabilité dans la fermeture de Fessenheim et l'abandon du parc nucléaire français.


Beaucoup d'internautes, comme Laurent Alexandre, n'ont pas manqué de souligner le « mensonge » d'Élisabeth Borne, faisant porter le chapeau au seul François Hollande.

Je me suis égaré. Je me suis égaré parce qu'Agnès Pannier-Runacher n'avait rien à dire : « Solidarité européenne », « Nous avons activé tous les leviers à notre main pour préparer l’hiver », « Nous suivons la situation au plus près avec des points hebdomadaires ». Du vent. Ce qui reste quand on n'a plus ni électricité ni gaz ni boussole.

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03 septembre 2022 à 10:00

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44 commentaires

  1. Étrange manière de gouverner sans demander l’avis du parlement élu !!! Vive la macronerie ….
    Elisabeth BORNE est une menteuse avérée c’est simple !!!!

  2. De la fumée ou de l’enfumage quand il s’agit de chaudières alimentées au fuel (prononcez fioul), ce serait presque cocasse si le chauffage hivernal des Français n’était entre les mains d’enfumeurs.
    Quoi de plus normal également que des enfumeurs émettent de la fumée, rien que de la fumée. Ils ont fait leurs preuves ces dernières années de la nullité dont ils sont capables, ainsi que de la production de fumée qui tente de masquer cette incapacité.

  3. Les prédicats d’Elisabeth Borne montrent qu’elle est devenue amnésique en devenant Premier Ministre !

  4. Va falloir s’y faire. Nous allons ressortir les bougies et les antiques lampes à pétrole de nos grands-parents. Et attention aux patrouilles en soirée, après l’extinction des feux, les balles pourraient siffler dans les volets clos laissant filtrer perfidement quelques rais de lumière.

  5. Le seul responsable de cette situation est Macron . La responsabilité des français est d’avoir voté Macron et surtout de ne pas bouger pendant que ce président et toute son equipe détruisent la France.

    1. Et combien d’autres avant lui,a commencer en 1972!!!!!il me semble que « des scientifiques »pourront a l’avenir faire état d’une dégénérescence programmée,ou a l’inaptitude des soit dits dirigeants!

  6. merci au journaliste et á boulevard Voltaire pour cet article … les ceux dont la vision serait trouble , ou porteurs de verres de lunettes embués, y trouveront une aide précieuse sur la compréhension de l’inaction politique, d’une gouvernance de communication peu démocratique et mensongère … au secours, la France est un bateau ivre qui a démâté, sur une mer agitée …

  7. Toujours la même lancinante rengaine qui consiste à attendre la solution de ceux qui ont créé le problème.
    Et la solution semble désormais être toujours de même nature. Des décisions prises sans consultation des représentants du peuple et des dispositions aussi inefficaces que dramatiquement coûteuses qui enfoncent le pays dans une dette colossale.

  8. Si le vent brassé par ce gouvernement, responsable en grande partie de la crise de l’énergie, pouvait faire tourner ses chères (un pognon de dingue !) éoliennes, il n’y aurait plus de crise énergétique en vue !!!

  9. « les embusqués, les planqués, les profiteurs, les collabos… »

    Excellente qualification de nos personnages politiques -tous partis confondus, même si certains sont pires que d’autres- et de certains électeurs de cette engeance.

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