[ENTRETIEN] « Il faut cesser d’utiliser les Français comme moyen de négociation »
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C'est le marronnier de la SNCF : Noël rime désormais avec grèves. Si la mobilisation de ce jeudi 21 novembre semble moins suivie que prévue, les syndicats de cheminots n'excluent pas de reconduire les actions en décembre. Ce jeudi, le ministre des transports François Durovray demandait à la SNCF de reporter les négociations en janvier pour « ne plus vivre sous la menace d'une grève ». C'est aussi pour cette raison que Véronique Besse, députée non inscrite de Vendée, a déposé une nouvelle proposition de loi en ce sens, s'inspirant notamment du modèle italien.
Iris Bridier. Vous venez de déposer une proposition de loi transpartisane visant à interdire les grèves dans les transports pendant les vacances scolaires et jours fériés. Ce texte ne serait-il pas contraire au droit de grève ?
Véronique Besse. Pas du tout. Le droit de grève est un principe constitutionnel que je respecte pleinement. Cependant, comme tout droit, il n’est pas absolu et doit coexister avec d’autres droits fondamentaux, comme celui d’aller et venir librement. Ce que propose ma PPL, ce n’est pas de supprimer le droit de grève, mais de fixer des limites pour protéger les Français dans des périodes clés, comme les vacances scolaires et les jours fériés, où les déplacements sont essentiels.
Aujourd’hui, les grèves dans les transports durant ces périodes ciblées paralysent des millions de familles, isolent des proches et mettent en péril des projets planifiés de longue date. Cette situation est devenue insupportable et il est de la responsabilité du législateur d’instaurer un juste équilibre entre le droit des travailleurs à faire grève et celui des Français de vivre et se déplacer sereinement. Ce texte s’inspire, d’ailleurs, d’exemples étrangers comme l’Italie, où de telles régulations existent depuis des années sans remettre en cause le droit de grève.
I. B. Le syndicaliste SUD Rail Fabien Villedieu a déclaré, au micro de Sud Radio, qu’il « y a eu trois grèves à Noël en 86 ans » et demande par là même d’arrêter le « cheminot bashing ». Que lui répondez-vous ?
V. B. L’expression « cheminot bashing » me fait bien sourire. Ce n’est pas un procès contre les cheminots mais une réaction légitime de millions de Français excédés d’être pris en otages par des grèves à répétition dans les transports, souvent lors des périodes où les déplacements sont prévus de longue date. Si M. Villedieu veut redorer l’image de sa profession, je lui conseille de commencer par encourager ses collègues à faire leur travail avec responsabilité et à respecter les usagers, plutôt que de systématiquement choisir Noël ou les vacances pour faire pression.
Le vrai problème, c’est l’impact concret des grèves sur la vie quotidienne des Français. Lorsque des milliers de familles se retrouvent séparées pendant les fêtes ou voient leurs vacances remises en cause, ce n’est pas du « cheminot bashing », c’est un cri de ras-le-bol face à des méthodes de lutte syndicale qui pénalisent toujours les mêmes. La meilleure façon de changer cette perception est simple : cesser d’utiliser les Français comme moyen de négociation.
I. B. C’est la deuxième proposition de loi que vous déposez pour faire interdire les grèves dans les transports pendant les vacances. Au Sénat, Philippe Tabarot (LR) a interpellé le ministre des transports, François Durovray, sur cet encadrement du droit de grève, la semaine dernière. Ce dernier lui a répondu avoir « confiance dans la responsabilité et la capacité de dialogue de l’entreprise et des organisations syndicales ». Avez-vous espoir, dans ces conditions, de voir cette proposition de loi inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée ?
V. B. La réponse du ministre n’est pas à la hauteur des attentes des Français. Bien sûr, le dialogue social est essentiel, mais il doit s’inscrire dans un cadre clair qui protège l’intérêt général. Les appels à la « responsabilité » des syndicats, sans réelle contrainte, ont montré leurs limites à de nombreuses reprises. Combien de fois les Français doivent-ils encore subir des grèves qui paralysent le pays à des moments cruciaux, comme les fêtes de fin d’année ou les vacances scolaires ?
Ma proposition de loi, si elle est adoptée, permettra enfin de mettre fin à l’incertitude pour des millions de familles. Elle offre une solution équilibrée : garantir le droit de grève tout en fixant des périodes où il sera interdit de bloquer les transports, comme lors des vacances scolaires et des jours fériés. Cela permettra aux Français de retrouver leurs proches ou de partir en congés sans crainte d’une annulation de dernière minute.
Le dialogue, c’est important, mais il doit s’accompagner de règles claires. C’est ce que propose ce texte : un cadre législatif qui concilie les droits des salariés et les besoins des usagers. À un moment où les coûts des déplacements explosent, il est temps de répondre aux attentes des Français en assurant leur liberté de se déplacer sereinement.
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20 commentaires
Qui négocie ? Un des « partenaires » ( curieuse expression ) sont les syndicats. Comment subsistent ces syndicats ? Par les cotisations de leurs adhérents ou par des subventions ? Bon ! A partir de là, inutile d’aller plus loin dans le lamento…
Bien sûr puisque la réussite d’une revendication dépend toujours et essentiellement du pouvoir de nuisance du syndicat qui la mène A ce titre on peut citer, outre les cheminots champions de cette catégorie, les chauffeurs de bus ou de métro, les enseignants, les chauffeurs routiers, les employés des raffineries de pétrole ou les contrôleurs aériens. D’autres catégories dont personne ne se soucie vraiment n’ont en général que très peu de chance de voir aboutir leur revendications. Au premier chef bien sûr les retraités mais aussi les petites exploitations libérales comme les autos-écoles. Une exception intéressante concerne les infirmières qui ont un vrai pouvoir de nuisance dont une vraie grève enverrait les malades ad patres. Mais celles-ci respectent leur déontologie.