[Point de vue] Transition énergétique : le saccage de nos paysages, un objectif écologique ?

éoliennes mer

« La mer ! partout la mer ! des flots, des flots encor. […] Toujours des flots sans fin par des flots repoussés ;/L'œil ne voit que des flots dans l'abîme entassés/Rouler sous les vagues profondes », écrit Victor Hugo dans son poème Le Feu du ciel. Désormais, contemplant l’horizon marin, le regard du poète butera sur de longues tiges de métal hérissées. Il lui faudra oublier l’espace infini où le ciel et la mer semblaient se confondre. Dressés face à lui, les parcs éolien « offshore » vont se multiplier au large de nos côtes. Ils raviront les écologistes et feront la fortune de ceux qui ont flairé le bon filon d’un business prometteur.

Le 22 septembre dernier, Emmanuel Macron était à Saint-Nazaire pour inaugurer le premier d’entre eux. Objectif présidentiel : une cinquantaine de parcs d'ici 2050. Alors que les poètes ne tardent pas à trouver l’inspiration car le temps leur est compté. L’heure est au « développement massif des énergies renouvelables », annonce l’Élysée. Et, donc, au saccage accéléré de nos paysages. Les pylônes métalliques fleurissent dans toute la France et se répandent donc désormais dans un des derniers espaces préservés : la mer.

Le professeur Jean-Robert Pitte, éminent spécialiste de géographie culturelle et auteur d’une Histoire du paysage français, note que « les paysages sont impermanents et même mortels, comme les civilisations dont ils sont l’expression perceptible par les sens ».

L’écologie d’extrême gauche ignore les paysages et contribue à leur effacement car, du passé, elle veut faire table rase. Elle se préoccupe d’intersectionnalité des luttes et met la question écologique au service de son combat anticapitaliste. Elle prétend « sauver la planète » mais, en réalité, sa matrice révolutionnaire la conduit à vouloir détruire le « monde ancien », c’est-à-dire le monde réel, pour faire émerger sur ses ruines un « monde nouveau ». Plus juste, plus « sobre » et plus solidaire, bien entendu.

L’écologie, dans sa version libérale progressiste célébrée par Emmanuel Macron, si elle ne s’inscrit pas dans un discours révolutionnaire régénérateur, n’en est pas pour autant moins indifférente à l’esthétique de nos paysages et aux enjeux civilisationnels. Que faudrait-il d’ailleurs conserver puisqu’« il n’y a pas de culture française », aux dires du Président ? Quatre-vingts éoliennes déployées en face des côtes du Pouliguen et du Croisic, voilà qui nous conduit assurément vers un monde meilleur.

Aussi, il y a urgence, à un moment où l’écologie s’impose dans le débat public comme le thème dominant, à penser et à faire émerger une écologie enracinée soucieuse de préserver le patrimoine culturel et naturel qui nous a été transmis. L’identité de la France, ce sont aussi ses paysages. Comme elle, ils se transforment sous l’effet du temps et du labeur des hommes, mais ils témoignent néanmoins d’une continuité et bien souvent d’une ambition : embellir le monde.

Nos beaux paysages sont le visage de la France. Une chapelle romane édifiée sur plus d’un siècle dont la silhouette se découpe dans la lumière du matin. Des toits de tuiles qui affleurent au détour d’un sentier provençal. Ou encore les falaises de craie blanche d’Étretat qui ont séduit le regard de Monet, Courbet et Delacroix. Ces paysages, nous avons la responsabilité de les préserver pour les transmettre à notre tour.

L’écologie révolutionnaire ou progressiste est une écologie « hors-sol » qui se gave d’un vocabulaire technicien désincarné. La transition énergétique pour EELV est « une démarche Territoire à énergie positive ». Pour Sandrine Rousseau, c’est « faire en sorte que la France soit le pays de la lumière renouvelable ». Quant à Emmanuel Macron, il s'agit d'engager une dynamique collective autour d’un objectif commun : « Make Our Planet Great Again ». Des mots, des slogans et, au bout du compte, l’enlaidissement du monde qui accompagne l’ensauvagement des mœurs et la déconstruction de notre langue.

« Un beau paysage, écrit Jean-Robert Pitte, est celui qui ravit ses habitants et ses visiteurs, dans lequel il leur plaît de vivre et qu’ils comprennent sans même l’habiller de mots. » De la beauté naît l’attachement et de l’attachement la volonté de protéger et de cultiver avec amour. Non pas « recréer » ou « fabriquer » mais « faire croître » et continuer à embellir. Dénoncer le saccage de nos paysages, c’est combattre l’imposture de cette écologie libérale-libertaire qui dénature ce qu’elle prétend sauver.

Frédéric Martin-Lassez
Frédéric Martin-Lassez
Chroniqueur à BV, juriste

Vos commentaires

40 commentaires

  1. Je partage totalement les propos de cet excellent article, et comme dit le Sieur Evariste. : « Les étendards de la bêtise » brassent du vent, mais la production sera elle au RDV… Notre penseur Jupitérien fait comme ces étendards, sans cependant ne rien produire, il brasse du vent et des mots, sans être malheureusement d’une énergie salutaire pour notre beau pays. ✌️

  2. Comme le dit si bien « ann wels »
    bon et alors les tonnes de béton armé coulé sur les fonds marins on en parle ? les milliers d’oiseaux fracassé sur les pâles de ces moulins monstrueux, et je ne vous parle même pas des conséquences sur l’activité des pêcheurs ! le coût d’installation, mais aussi d’entretien, puis fatalement de démantèlement un jour, bref QUE DU BONHEUR !
    Alors vous savez quoi, vos calculs je ne vous dis pas où vous pouvez vous les mettre

    Evariste dit :
    Ces éoliennes sont l’étendard de la bêtise humaine et une insulte à l’intelligence scientifique.

    J’approuve ces propos de très bons sens

  3. Il paraît que tout le littoral français sera pollué par ces brasseuses d’air … Sauf …? Sauf au large du Touquet , résidence des Macron … Tiens pourquoi ? Brigitte n’aime pas leur vue ? ou c’est lui ?

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