[POINT DE VUE] 8e RPIMa de Castres : ne pas oublier l’excellence de nos soldats

Le 8e régiment de parachutistes d’infanterie de marine (8e RPIMa), situé à Castres, dans le Tarn, est l’un des meilleurs régiments de l’armée de terre française. Né en Indochine, intégralement détruit à Ðiện Biên Phủ, puis recréé pour servir sous la belle devise « Volontaire », il a été de tous les coups durs des quarante dernières années. Ses soldats ont payé le prix du sang, notamment dans la terrible embuscade d’Uzbin, en 2008, en Afghanistan. Les « gars du 8 » sont étroitement liés à la ville de Castres, dont ils portent l’emblème sur leur tenue de défilé. C’est donc tout un écosystème qui est dans la tourmente.
Des accusations graves
Depuis quelques jours, en effet, le 8e RPIMa fait face à des accusations graves et particulièrement sordides. Quatre anciens engagés ont témoigné, dans Le Parisien et sous les caméras de L'Œil du 20 heures, de la violence qu’ils ont subie au sein de leur section, durant leur formation initiale. Coups de poing, claques sur la nuque, insultes, humiliations, menaces, étranglements, incitation au suicide : les anciens militaires, qui sont aujourd’hui en arrêt maladie, dénoncent des faits honteux. La hiérarchie militaire, et notamment le général commandant la 11e brigade parachutiste, a fait son travail (le fait-on aussi vite et bien dans d'autres institutions ?) : le général vient d’être informé des faits, il a diligenté une enquête de commandement interne - sans même attendre une éventuelle judiciarisation - et il y a fort à parier que l’armée se séparera sans pitié des cadres concernés, s’il est avéré qu’ils ont commis ces actes. Dans ce cas, elle fera bien…
Certes, il y a souvent une confusion, dans l’esprit du public, entre la formation militaire et la dureté sadique. Sont-ce des traumatismes d’un service militaire mal digéré ? Une vision caricaturale de la « virilité martiale », souvent défendue avec extrémisme par des gens qui n’en ont pas un échantillon en eux ? Ou encore le prolongement de l’une des phrases les plus bêtes du monde : « Il nous faudrait une bonne guerre » ? Ceux qui ont fait la guerre, ou même connu des engagements opérationnels difficiles, savent que la guerre n’est jamais bonne et qu’elle ne tire pas toujours (et même presque jamais) l’âme humaine vers le haut. Dans le même esprit, le discours qui consiste à dire que, pour former des guerriers, il faut les traiter comme des cloportes n’est pas excessivement pertinent - surtout quand ce sont de futurs frères d’armes. Après tout, quand on risque vraiment de mourir, on ne peut confier aveuglément sa vie qu’à des amis, sans distinction de fonction… ou, en l’espèce, de grade. Bref.
Ils ont parfois donné leur vie
Toutefois, on ne peut s’empêcher de se dire que cette affaire pourrait faire oublier tout le reste. Tout le reste, c’est le Liban (et l’attentat du Drakkar, qui tua d’autres paras), l’ex-Yougoslavie, le Kosovo, la Côte d’Ivoire, l’Afghanistan, le Mali puis le Sahel et, aujourd’hui, la Roumanie, aux marches orientales de ce qu’il reste de l’Europe. C’est d’ailleurs en Roumanie que l’un des engagés du « grand 8 » a fait une tentative de suicide. Sur tous ces théâtres d’opérations, il y avait des parachutistes du 8e RPIMa. Ils ont parfois donné leur vie pour que la nôtre se poursuive tranquillement, de correspondance de RER en déclaration de revenus. Notre armée est aujourd’hui la seule de l’Union européenne qui ait l’expérience récente du combat et soit capable de s’y engager de manière autonome. Une partie des parachutistes français sont soumis en permanence, par rotation, à un régime d’alerte très contraignant qui peut leur imposer d’être projetés en 24 heures pour défendre notre pays.
L’encadrement d’une section compte apparemment une dizaine de personnes, au sein d’une force opérationnelle qui représente 77.000 combattants (chiffres clés de l'armée de terre 2024, ministère des Armées). Soyons aussi impitoyables dans la condamnation de ces agissements misérables, s’ils sont avérés, que dans la défense de notre armée en tant qu’institution, car il n’est pas impossible que des esprits mauvais utilisent cette affaire pour discréditer l’un des rares piliers encore solides, dans un État qui hésite par ailleurs entre le Mexique et l’Afrique du Sud…

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53 commentaires
Je rejoins ceux qui invitent à la retenue : le dossier d’instruction et rien que lui.
Si rudesse il y a il faut en mesurer le niveau ; si invitation au suicide il y a eu une sanction significative doit être infligée. Je n’ai pas à avoir honte de mon parcours, blessé une fois par balle et cinq fois par éclats : je n’ai jamais insulté quelqu’un et moins encore porté des coups à un subordonné. Donc le dossier et … le flegme.
Exact. Attendre la fin de l’enquête et le parcours personnel des 4 engagés, et voir le temps effectué, à quelle époque, et leurs engagements sur le terrain s’ils ont eu lieu.