Pap Ndiaye et Macron revalorisent les salaires des professeurs : vraiment ?

Pap Ndiaye
En entendant Emmanuel Macron dévoiler son plan de revalorisation des salaires pour les enseignants, annonçant des hausses inconditionnelles se situant « entre 100 et 230 euros nets en plus par mois » et, pour ceux qui signeront le « pacte », un gain supplémentaire pouvant aller « jusqu’à 500 euros nets », on pourrait se dire que les professeurs ont bien de la chance et auraient tort de se plaindre. Mais, à y regarder de plus près, on s'aperçoit que Macron, une fois de plus, abuse l'opinion.

Car les traitements des professeurs n'ont pas suivi le rythme de l'inflation depuis les années 1980 et les rares augmentations de la valeur du point d'indice, entre 2010 et 2023, sont loin de compenser la perte de pouvoir d'achat qu'ils ont subie. En outre, cette revalorisation s'est fait attendre si longtemps qu'elle est déjà réduite par les effets de l'inflation durant cette période. Sans entrer dans les détails techniques, il faut savoir aussi que cette augmentation, toute relative, est exclusivement indemnitaire et se déprécie donc au fur et à mesure que l'inflation se poursuit.

À côté de cette « revalorisation socle », abusivement présentée par le chef de l'État comme « un changement de vie, une petite révolution copernicienne », le « pacte » censé permettre aux professeurs volontaires de mettre du beurre dans les épinards ressemble beaucoup à un marché de dupes. Comme si les professeurs, dont la charge de travail est évaluée à 43 heures hebdomadaires en moyenne, avec les cours, les préparations, les corrections et les réunions incessantes, étaient tous facilement disponibles pour des tâches supplémentaires.

Sans compter que ces nouvelles missions que le ministère veut leur confier révèlent une profonde méconnaissance du fonctionnement des établissements scolaires de la part des technocrates de la rue de Grenelle. Ainsi, le remplacement, « du jour au lendemain », des professeurs absents, dont se vante Macron, est impossible à réaliser systématiquement. À moins qu'on ne considère comme pédagogiquement efficace qu'un professeur, au dernier moment et dans une classe qu'il ne connaît pas, puisse remplacer un cours de français par un cours d'anglais ou un cours de mathématiques par un cours d'histoire. Au mieux fera-t-il de la garderie.

Si vous ne vous laissez pas séduire par ces discours trompeurs, si vous ne succombez pas non plus au mythe des « profs fainéants, toujours en vacances », vous aurez compris que Macron, ses ministres et les parlementaires qui le soutiennent encore ne visent, par ces annonces, qu'à plaire à l'opinion publique en lui faisant croire que, demain, tout ira pour le mieux dans le meilleur des enseignements possible. La Macronie, fidèle à ses habitudes, se paie de mots et se fiche éperdument des vrais problèmes que sont la crise du recrutement des professeurs et la dégradation du niveau scolaire. Elle a les bonnes adresses pour que sa progéniture puisse échapper au désastre.

Certes, comme dans tous les métiers – y compris chez les prétendues élites qui nous gouvernent –, il existe des fumistes parmi les professeurs. Mais la majorité d'entre eux, dans des conditions souvent difficiles, avec un salaire médiocre, une autorité contestée, un « pas-de-vague » qui sévit toujours, essaient, malgré tout, de faire correctement leur métier et d'accomplir leur mission qui est, en premier lieu, d'instruire les élèves, de les amener à leur plein développement. Si l'on veut de bons professeurs, qui dispensent un enseignement de qualité, il faut les rémunérer à leur juste valeur, à la hauteur de leur niveau d'études et du service qu'ils rendent à la France.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

Vos commentaires

39 commentaires

  1. Seule attitude que comprenne Macron face aux mécontentements: distribuer l’argent du contribuable. Le problème des enseignants n’est pas uniquement financier. Nos instituteurs en blouse grise étaient mal payés, eux aussi. Mais ils nous ont néanmoins enseigné efficacement la lecture et l’écriture, et ce avant l’âge d’entrer en sixième! C’était un autre monde, demandons pourquoi à nos indécrottables progressistes!

  2. Décidément, ce gouvernement fonctionne en dépit du bon sens. C’est une bonne chose de revaloriser le salaire des Prof. mais ça ne va pas améliorer pour autant la qualité de l’enseignement qui s’est dégradée depuis la mixité sociale et ethnique, ni résoudre le sérieux problème de fond plus inquiétant encore qui gangrène depuis longtemps la France. C’est comme Darmanin, qui croit que tout sera résolu en multipliant les effectifs des Services d’Ordre au lieu de faire preuve d’autorité en expulsant pour commencer manu-militari tous les nuisibles en prison et tous ceux en liberté qui nous pourrissent l’existence et qui ruinent notre pays.

  3. Je me souviens avoir fait des remplacements de prof y a quelques années et chaque revalorisation finissait en baisse de revenu car les charges augmentaient davantage… attendons voir ce coup ci mdr…

  4. Propos de Brigitte Macron dans le magazine Elle : « je suis arrivée dans une classe de collège où l’on devait étudier les subordonnées conjonctives. Et moi, les conjonctives, les relatives, les circonstancielles, je n’en avais aucune idée, je n’avais étudié que la littérature « ! Chacun y fera sa petite idée !

  5. « Sauter sur sa chaise comme un cabri, en disant : l’Europe, l’Europe », etc…N’empêche…ne pourrait-on se tourner un peu vers la rémunération du travail en Europe, ailleurs qu’en France, aidés en cela d’ailleurs par une monnaie unique, pour faire une comparaison honnête ? Pensons peut-être aux enseignants…mais aussi à toutes les professions médicales et paramédicales : on serait peut-être surpris…

  6. Fifre et tambourin ! Le plus fort dans cette course à l’enfumage a été Jospin dans sa réforme de la profession des instits’ devenus des soi-disant Professeurs. Beaucoup ont vu leur salaire diminuer au bout du compte mais les enseignants ont continué de voter à gauche, comme un troupeau de mouton.
    Citez-moi le nombre de grèves que les enseignants ont faites pour des vraies augmentations de salaires, la revalorisation des carrières, en 60 ans ?
    Et avec des profs qui terminent leur année scolaire en fin avril, (il y en a cette année) ça ne va pas arranger l’opinion que l’on a de la profession !

  7. Il n’a pas modifié le contenu des Livres d’Histoire, de Français, de Sciences, etc…les récentes moutures annonçant au fil du temps le Wokisme, donc la disparition des Valeurs qui avaient fait la France, et enfonçant la Françe aux catacombes du classement Pisa….Bien sûr ! 10 % des citoyen(ne)s bien éduqués, formés jusqu’en en hautes écoles, même à l’étranger, par leur volonté et sous contrôle de leur « Club » du wokisme leur suffit pour asseoir leur hégémonie…les 90 % restant se suffisant de Pains et de Jeux, comme en Rome Antique mais qui a chuté dépendant de plu en plus des autres…(pour nous l’ U.S. O T A N, La Chine de l’Industrie, l’Ukraine les céréales, l’Afrique main d’oeuvre, etc…)

  8. Après la réforme des retraites il est urgent de distribuer quelques sussucres. La presse vante déjà ce geste magnifique. Et toujours mon fric lancé par le roi depuis son carrosse.

  9. La revalorisation « socle « , qui profite à tous ( les titulaires, pas les contractuels ), représente environ 100 euros, imposables et ne comptant pas pour la retraite ( car c’est une prime ). Le reste ( le pacte ), c’est du travailler plus pour gagner plus. Et c’est tout. Mais le corps enseignant français est tellement famélique ( financièrement parlant ) que beaucoup, je n’en doute pas, signeront le pacte quand même.
    Quant à la qualité de l’école, elle tient à 2 choses : la qualité des cours, donc à des professeurs solides dans leur discipline et formés pédagogiquement ( dont les salaires ne font pas pitié à l’ensemble de la société ) et le rétablissement de l’exigence scolaire qui engage élèves et enseignants ( avec ses conséquences : l’autorité, le mérite, bref, toutes ces vieilles lunes dont on s’est débarrassé à l’école avec le succès que l’on voit ).
    Quant au wokisme, ne tombons pas dans la naïveté: l’école a toujours été idéologisée. Ce n’est malheureusement pas un sanctuaire. Et élèves et parents sont les premiers à y apporter tous les débats et toutes les dérives de la société.

  10. Je ne comprends pas cette augmentation de salaires : sur le plan mondial, la scolarité Française est avant dernière avant le chili ; sur le plan européen, elle est en dessous de la moyenne européenne. Les enseignants sont les seuls fonctionnaires de catégorie A, de la fonction publique, à ne pas être soumis aux 35 heures et ne pas avoir simplement 5 semaines de congés payés. Leur recrutement n’est pas non dans la bonne moyenne et ajoutons à cela les changements constants des programmes d’enseignement, ce qui donne le résultat que nous connaissons.

  11. La grande majorité des français a toujours juger un enseignant sur son efficience. Cette efficience est la conjonction d’un certain nombres de facteurs qui concourent au résultat attendu. Dans ces facteurs, le courage. Exemple : l’apprentissage de la lecture par la méthode globale s’est rapidement révélée catastrophique. Les courageux, malgré les instructions imposées, ont introduit une dose de méthode analytique, didactique. Ce qui a porté leurs élèves au niveau attendu. Le courage d’affronter . Beaucoup d’autres actions de ce type contribuent à l’efficience.

  12. Les salaires, d’accord, mais remettre l’enseignement dans la ligne normale est urgent . Re instaurer le redoublement quand l’enfant ou le jeune n’a pas le niveau voulu serait élémentaire ! Rétablir l’enseignement de l’Histoire avec la bonne chronologie des faits, de la géographie, instruction civique comme autrefois …supprimer l’éducation séquelle des enfants. ( qui est le rôle des parents)….Rétablir les dictées !.. on veut instruire, apprendre notre langue aux enfants étrangers alors que les nôtres ne savent même plus écrire en bon français et sans fautes!
    Remarquez que même à la tv tous ceux qui nous parlent ne font même plus les liaisons entre les mots!! C’est nouveau ça.
    Et toujours cellezetceux…la priorité du masculin est une règle de notre langue et orthographe.
    Pauvre langue française pourtant si riche !!

  13. Le salaire net d’un certifié débutant équivalait à 2,07 SMIC en 1980 (Bac +3). Il était tombé à 1,16 SMIC en 2020 (Bac + 5). Source « Stupéfiant voyage à travers l’Education nationale ». On comprend qu’avec 100 à 230 €, on est très loin du compte.
    Par contre le remplacement immédiat des professeurs absents est une bonne idée. Elle est en application dans certains pays étrangers, la Hongrie par exemple. Et ça fonctionne bien. 23 heures (séquences de 50 minutes) inscrites à l’emploi du temps dont 21 devant les élèves et 2 en salle des professeurs dans l’attente d’être appelé (si nécessaire) pour un remplacement.

    • Mais ils ont bac+2 en réalité ! Le coup du bac+5 n’est qu’un camouflé pour les passerer à la catégorie supérieure et satisfaire les vieux syndicalistes.
      C’est un emploi PUBLIC, leur traitement et leurs primes sont consultables sur internet et ils sont TRÈS BIEN PAYÉS compte tenu de leurs 4 mois de vacances par an, de leur emploi à vie et de leur très faible travail hebdomadaire (quoi qu’il en disent).
      Alors arrêtons avec la rémunération car ça n’a JAMAIS arrangé les problèmes de fond.

  14. Depuis quand est-ce qu’on augmente des salariés qui ont un bilan aussi catastrophique ?
    On devrait commencer par réparer l’éducation nationale avant de penser à récompenser ceux qui l’ont envoyé dans les abysses du classement PISA.
    Qu’on augmente seulement les bons éléments, notés sur des critères indiscutables et non complaisants et surtout qu’on vire les mauvais !

  15. Ils distribuent notre fric pour se faire aimer …peine perdue .c,est foutu pour vous messieurs ..encore 100 jours .

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