Mourir en direct sur Facebook, le dernier combat d’Alain Cocq

Cet homme de 57 ans est atteint d’une maladie dégénérative orpheline. Alité et entièrement dépendant de machines pour s’alimenter et s’hydrater, il décrit son quotidien sur les réseaux sociaux comme un « immense fardeau » et témoigne de son corps « perclus de douleurs ». Ayant sollicité Emmanuel Macron pour obtenir « le droit de mourir dans la dignité », le Président lui a répondu dans une lettre : « Parce que je ne me situe pas au-dessus des lois, je ne suis pas en mesure d’accéder à votre demande », rappelant qu’il ne peut « demander à quiconque d’outrepasser notre cadre légal actuel ».

Face à ce refus de l’Élysée, Alain Cocq annonce choisir de se laisser mourir en arrêtant, ce vendredi soir, son hydratation et son alimentation. Il cessera également son traitement, hormis la morphine comme soins de confort. En outre, il diffusera sur Facebook sa lente agonie afin de faire évoluer la législation sur la fin de vie. « Je ne me bats plus pour moi mais pour les autres, ceux qui vont suivre », déclare cet ancien militant du Parti socialiste.

Quels sont les faits ? Bien qu’atteint d’une maladie incurable, Alain Cocq n’est pas en fin de vie. Or, la loi Claeys-Leonetti n’autorise la sédation profonde et continue que si le pronostic vital du patient est engagé à très court terme. S’il convient de ne pas juger cette personne dont les douleurs physiques et psychiques sont certainement insupportables, pour autant, notons que son combat est militant, au nom de la liberté de l’individu à disposer de sa vie et de sa mort. Accepter sa demande de suicide assisté ouvrirait la porte à de nombreuses dérives. La médecine doit soigner, accompagner ou soulager, mais en aucun cas donner la mort. « Si une société commence à dire qu’il y a de “bons suicides”, alors les personnes fragiles se trouvent comme poussées vers la sortie », alerte Tugdual Derville.

Éric Vermeer est infirmier éthicien en soins palliatifs. Il rappelle qu’en Belgique, « 65 % des demandes d’euthanasie sont liées à des douleurs non soulagées. Or, les soins palliatifs jouent précisément ce rôle d’abroger les souffrances. S’agit-il de mourir ou de ne plus souffrir ? » Il apparaît donc comme prioritaire de renforcer les soins palliatifs et la présence humaine des soignants afin que l’euthanasie ou le suicide assisté n’apparaissent plus comme les réponses aux vrais besoins des personnes souffrantes.

Trop souvent, et sûrement parce que notre société en quête d’une humanité augmentée juge inutile la vie de personnes diminuées, le malade vulnérable pense que sa perte d’autonomie le rend indigne. Et si c’était le regard que nous portons sur la maladie et le handicap qui était à changer plutôt que la loi ?

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Iris Bridier
Journaliste à BV

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