Marche des imams contre le terrorisme : il n’y avait pas foule

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Samedi dernier à Paris, des imams ont lancé une « marche contre le terrorisme ». Elle doit les mener à travers l'Europe sur les lieux d’attentats récents : France, Allemagne, Belgique... Ces imams d’Europe souhaitent ainsi appeler à « ne pas associer les musulmans aux crimes commis au nom de l’islam ».

Cette marche pourrait vite avoir l’effet d’un pétard mouillé, car si elle porte en elle le parfum en vogue d’un vivre ensemble racoleur, ils n'étaient en fait qu’une trentaine au départ des Champs-Élysées, rebaptisés pour l’occasion "symbole de l’union nationale" et décor d’un des derniers attentats sur le sol français.

C’est là qu’est le hic et que le message envoyé risque d’être plus douloureux dans ses symptômes que le mal qu’il dénonce. "On ne peut associer l’islam à ces barbares et ces assassins qui tuent au nom d’Allah", a déclaré l’imam Hassen Chalghoumi à l’initiative de cette marche. L’ancien imam de Drancy est connu pour sa proximité avec les juifs et Israël, ainsi que pour ses discours contre l’islam radical. Marek Halter, écrivain français, juif d’origine polonaise, défilera à ses côtés, prônant l’entende cordiale entre juifs et musulmans pour un multiculturalisme élargi.

Un cocktail d’idées progressistes portées par l’imam Chalghoumi, qui semble empêcher l’adhésion de la communauté musulmane à cette marche, réduisant comme peau de chagrin une initiative qui aurait dû rassembler une grande partie des musulmans de France derrière sa banderole. Même le Conseil français du culte musulman (CFCM), sollicité pour l'occasion, a refusé de s’y associer, portant à la légitimité de l’initiative le coup de grâce. Un boycott qui a peut-être ses raisons dans les amitiés de l’imam Hassen Chalghoumi.

Ainsi, si le message est clair - distinguer les crimes commis au nom d’un islam radical d’une religion qui, elle, se revendique comme une religion d’amour -, la mise en application commence par des règlements de comptes internes et des relents de guerres fratricides. Sur les Champs-Élysées, une jeune femme, musulmane, s'est arrêtée par curiosité : "Chalghoumi ? Il ne me représente pas du tout. On a tous souffert du terrorisme, mais cette marche, on n'en a jamais entendu parler." En fait, cette marche, pourtant relayée par des médias bienveillants et plus nombreux que les marcheurs eux-mêmes, n’était accompagnée, sur place, que d'une poignée de fidèles pour soutenir l’initiative.

Au final, le message est inaudible et si l’on a pu s’étonner, à l’occasion de chaque attentat commis sur le sol français au cri de "Allah akbar", de l’absence de réaction visible de la communauté musulmane, ce n’est pas cette tentative embryonnaire de contestation qui donnera l’impression d’une unité de la communauté musulmane.

Ainsi, David Munir, imam de Lisbonne, a tenu à préciser le sens, selon lui, de cette marche en déclarant que si "certaines personnes commettent des crimes au nom de l'islam, nous sommes ici pour dire pas en notre nom. Pas pour dire que l'islam est une religion de paix, ce que vous savez, mais pour dire que nous cherchons ici notre identité, une identité européenne."

Plus de 7.000 jeunes musulmans ont franchi les frontières passoires européennes pour aller en Irak et en Syrie, apprendre à combattre au nom d’Allah et revenir commettre des attentats dans leurs pays nourriciers.

Avec 3,5 millions de musulmans en France (chiffre officiel), la communauté musulmane française est la plus importante d’Europe. Ces trente imams isolés et réunis petitement samedi sur les Champs-Élysées pour une pompeuse « marche des musulmans contre le terrorisme » sont, malgré eux, la preuve que cette identité européenne n’est pas une évidence et qu'il va falloir beaucoup marcher pour la trouver.

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