Macron se convertirait bien à l’islam, si cela lui rapportait gros !

"À Abou Dhabi, Macron dénonce l’obscurantisme et flatte les Émirats arabes unis", titre Le Monde du 9 novembre. L’emploi du verbe « flatter » est un euphémisme : c’est de flagornerie qu’il s’agit, si l’on en juge par son discours, qu’on peut intégralement lire sur le site de l’Élysée.

Qu’il inaugure ce nouveau musée du Louvre en exprimant sa "volonté de défendre le beau, l’universel, la création, la raison, l’intelligence, la fraternité", passe encore : on veut bien lui accorder qu’il n’a pas le cœur sec comme ses ordonnances et qu’il est sensible à l’universalité de l’art. Encore que, comme le pensent certains spécialistes des monarchies de la péninsule Arabique, cette institution puisse être un outil de communication destiné à dissimuler leur dérive absolutiste.

Quoi qu’il en soit, quand Emmanuel Macron rappelle que "dans cette région tous les grands monothéismes sont nés et que l’islam est né de ce palimpseste de cultures et de civilisations qui font que, de manière indétricotable, irréductible, nos religions sont liées, nos civilisations sont liées", on est en droit de s’inquiéter de la lucidité de notre Président.

Quand il ajoute que "ceux qui veulent faire croire, où que ce soit dans le monde, que l’islam se construit en détruisant les autres monothéismes sont des menteurs et vous trahissent", on peut se demander s’il a quelque connaissance historique de l’islam. Car il ne parle pas seulement des Émirats – ils excluent toute discrimination fondée sur la religion, mais continuent de punir tout prosélytisme envers les musulmans, d’interdire aux citoyens musulmans de changer de religion, et punissent de mort l’apostasie de l’islam – mais de tous les pays de religion musulmane.

Ceux qui ont subi, dans le passé, les effets de l’impérialisme de l’islam, les chrétiens installés au Proche-Orient bien avant la conquête musulmane, aujourd’hui martyrisés, n’existent pas pour notre Président. Ils ont pourtant joué un rôle majeur dans le développement politique, culturel, social et religieux de cette région du monde. Admettons que, par courtoisie, il soit prudent devant ses hôtes : mais ce n’est pas par courtoisie, c’est par conviction qu’il met l’islam sur le même plan que le christianisme et le judaïsme.

Loin de défendre les valeurs judéo-chrétiennes sur laquelle la France et notre civilisation se sont fondées – et l’Europe elle-même –, loin de reconnaître notre héritage chrétien – d’où nous viennent, notamment, le respect de la dignité de la personne humaine, la liberté de penser, la vraie notion de progrès –, Emmanuel Macron fait manifestement le choix d’une société où tout se vaut pourvu que soit respectée la seule religion qui mérite d’être défendue : celle de l’argent.

Derrière ces amabilités prononcées devant plus de quatre cents dignitaires arabo-musulmans, derrière ces contre-vérités historiques se cache la volonté première de faire des affaires. Ce voyage a été l’occasion de signer plusieurs contrats commerciaux dans le domaine de l’énergie et de la finance. Pour les obtenir, on flatte ses clients, on falsifie l’Histoire.

S’il est vrai que des émirats participent à la coalition internationale contre l’État islamique, en contribuant – modestement – aux opérations aériennes en Syrie, ils n’ont guère cherché à maîtriser les excès de l’islamisme qui prospèrent même dans leurs rangs. Ce ne sont pas les flagorneries d’Emmanuel Macron qui les pousseront à se remettre en question. Bien au contraire !

"Ce Louvre de la lumière et du désert, c’est ce message envoyé contre tous les obscurantismes", a-t-il déclaré avec un lyrisme calculé. Si la "beauté [peut sauver] le monde", comme l’écrivait Dostoïevski, l’obscurantisme de l’islam ne pourra s’effacer que si cette religion procède à un véritable aggiornamento.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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