Il paraît qu’une fillette a trouvé dans le lac de Dozmary Pool l’épée d’Excalibur. Place ! Place ! Qu’on fasse venir la petite en France, avec son précieux fardeau sur un coussin de velours, comme on le fit, il y a quelque temps, avec l’anneau de Jeanne d’Arc. Car il est un paquet de politiques ramollis, décatis, atones qui, si la jeunesse est un état d’esprit, affichent 80 balais au compteur bien qu’ils soient nés à la fin des années 60 ou au début des années 70, et qui auraient sérieusement besoin qu’elle leur apporte force, courage, jouvence et détermination. Je veux parler des LR.

Il y a Laurent Wauquiez qui tente de bomber le torse : « Je-suis-la-vraie-droite-décomplexée-des-valeurs-qui-n’a-pas-peur-de-revendiquer-son-identité. » Les électeurs voudraient y croire, le garçon est sympathique. Le problème est que Nicolas Sarkozy a chanté la même sérénade, que François Fillon s’y est, somme toute, essayé aussi, et que tout cela sent un peu le recuit, le déjà-vu, la vieille soupe qu’on rallonge alors que l’os à moelle qui trempe tristement dans la marmite est vidé depuis longtemps de sa substance. Et comme d’habitude, Laurent Wauquiez, en guise de préambule, commence par un tir de barrage en direction du FN et de Debout la France, si d’aventure ceux-ci tentaient de faire un geste vers lui. "Noli me tangere." Je serais aussitôt contaminé.

Il y a Valérie Pécresse, menton en l’air et col boutonné jusqu’en haut, qui se drape dans sa vertu de rosière immaculée : ce n’est pas à elle, claironne-t-elle, que l’extrême droite ferait des avances, ça, non, elle est bien trop pure, pffft… et elle veut résolument tourner la page du mariage gay, que l’on ne lui parle plus de ce vieux dossier entériné, tamponné, classé. Même la morale parle pour elle, comme dirait Francis Cabrel. Ne fais donc pas tant la fière, Fleur d’épine, Fleur de rose, on t’a vue il y a quelques années frayer avec LMPT. Tu as même pris la parole au cours d’une manif à Versailles.

Il y a Alain Juppé, qui donne, si l’on en croit Le Canard enchaîné, du "tu quoque mi filia" à Virginie Calmels, depuis qu’elle a rejoint Wauquiez, et s’inquiétait fin août de l’influence de Sens commun au sein des Républicains. Sens commun qui, sur l’échelle des croque-mitaines abominables, moches, laids, vilains, pas beaux, effrayants, joyeusement agités dans le grand guignol de la gauche se situe sur la marche juste en dessous du FN, sans que personne ne s’avise d’oser dire, au sein même de sa propre faction politique : « D’accord, les gars, on s’arrête deux minutes, on met tout sur la table, et vous nous expliquez ce que Sens commun a dit/fait/écrit de si dingue ? »

Mais comment donc recomposer si l’on refuse de toucher un tant soit peu aux pièces d’un puzzle verrouillé ? Si l’on refuse de redessiner les contours et les lignes ? On cite souvent cette réplique du Guépard, lorsqu’on évoque un vieux monde de privilèges qui s’en va préférant encore se suicider que se réformer : "Il faut que tout change pour que rien ne change." Pour rester dans la cinématographie de fin de règne, et puisque ce film s’est retrouvé malgré lui sur le devant de la scène récemment, il y a dans ces figures de LR un peu de l’Ashley Wilkes d’Autant en emporte le vent. Gentil, falot, fatigué, aveuli par le confort, ne comprenant rien à rien, surtout pas aux enjeux bouleversant la donne du monde. Ne voulant ou ne pouvant rien modifier, ce qui à la fin revient au même.

Celui qui saisira l’épée de l’Excalibur sera celui qui aura le courage de vaincre les vieilles peurs fantasmagoriques par lesquelles la gauche règne en maître. Celui qui osera donner le baiser au lépreux. Non pas l’embrasser langoureusement sur la bouche pour adopter toutes ses options - là n’est pas la question - mais pour lever la herse et jeter un pont. Sans lequel aucune recomposition ne pourra avoir lieu.

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06 septembre 2017 à 15:52

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