C’est fait, il a démissionné. Ce lundi matin, on chuchotait qu’il tiendrait jusqu’après les fêtes. Mais, surprise stratégique : Jean-Paul Delevoye rend son tablier de haut-commissaire. Et cette fois-ci, cette démission est la bonne, celle du gouvernement, pas de l'association des boulistes de Bapaume.

Son communiqué est, en tout cas, un petit chef-d’œuvre du fameux « en même temps ». Saluant la richesse du dialogue social avec les partenaires sociaux, les parlementaires et les citoyens, ainsi que l’investissement des administrations qui a permis de nourrir les débats entre ministres, Jean-Paul Delevoye évoque une « confiance réciproque ». Mais il ajoute aussitôt : « Aujourd’hui, cette confiance est fragilisée sous les coups d’attaques violentes et d’amalgames mensongers. » Cette confiance n’aurait donc pas été trahie par les omissions du ministre dans sa déclaration d’intérêts, mais « fragilisée » par – pour faire court – la rumeur de la ville. Un député de La République en marche, chargé de la pompe funèbre de Jean-Paul Delevoye sur BFM TV, évoque même une démission « sous pression médiatique ». Il a remboursé les sommes qu’il n’avait pas le droit de cumuler avec son traitement de ministre, alors passons l’éponge ! Comme on voit que dans l’esprit de la Macronie, on bascule tout doucement dans une société à l’américaine : je rembourse, donc, en quelque sorte, ça efface la faute. Bah non, ça marche pas comme ça, en droit français. Il s’avère que cumuler une activité professionnelle avec une charge ministérielle est interdit par la loi. Il paraît même que ce serait contraire à la Constitution. Il paraît aussi que le Président est garant de cette Constitution… Mais revenons au communiqué. M. Delevoye serait donc, en quelque sorte, une victime : « attaques violentes, amalgames mensongers »...

En même temps, à la fin de son communiqué, l’ancien haut-commissaire avoue. « Mon erreur est d’une légèreté coupable. » Intéressant, comme formule. Il n’avoue pas une faute mais une erreur et ce n’est pas lui qui est coupable mais sa légèreté. Nuance. Enfin, il conclut ainsi : « C’est la dure loi de la responsabilité, de l’exemplarité et de la transparence qui doit s’appliquer à tous et à moi en particulier. » C’est beau et c'est vrai, certes. Mais il semblerait aussi que cela soit la dure loi de la République. La loi tout court. Bref, la loi.

Une retraite de Jean-Paul Delevoye à point nommé ? Les prochains jours le diront.

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16 décembre 2019 à 18:22

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