Jadot dans l’église de Calais, Macron au Vatican, mais Zemmour privé de s’exprimer dans l’enceinte de la Bonne Mère

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Ces dernières semaines auraient pu nous faire croire que le mouvement dextrogyre cher à Guillaume Bernard avait atteint une nouvelle étape : il n'y en avait que pour la rivalité Zemmour-Le Pen, la campagne des LR et Emmanuel Macron passait pour le gauchiste de la compétition. Mais cette marginalisation de la gauche, dont Anne Hidalgo est actuellement le symbole, est trompeuse. Et, de même que le phénomène Zemmour n'a fait que combler un espace vide aux confins de LR et du RN, Yannick Jadot vient, ce vendredi, d'occuper habilement un terrain abandonné par les gauches : celui de l'immigration.

Il a en effet bouleversé son agenda de campagne pour se rendre à Calais, pour rendre hommage aux migrants noyés mercredi. Il s'est notamment rendu dans l'église Saint-Pierre où des bougies brûlaient en mémoire des 27 migrants morts, puis il a jeté un bouquet de fleurs sur le rivage. Cette visite de Jadot dans l'église devrait lui rapporter autant de voix que celle d'Emmanuel Macron avec le pape François, au même moment. La concurrence est rude, chez nos présidentiables de gauche et du centre, pour séduire l'électorat catho. On pourrait s'étonner de cet activisme, vu son caractère résiduel. Mais c'est une onction qui compte, et comme cette Église-là se réduit elle-même très souvent à une ONG pro-migrants, il y a là une grande cohérence.

On notera, au passage, que cette Église-là ne semble pas très gênée par les visites de ces deux candidats en pleine précampagne présidentielle. L'idée d'une possible récupération ne l'effraie pas ? En revanche, cette même Église s'est montrée bien plus tatillonne pour un autre candidat, puisqu'elle a cru bon, le même jour, d'interdire à Éric Zemmour de s'exprimer dans l'enceinte de la « Bonne Mère », à Notre-Dame-de-la-Garde : « Ce qui a été demandé à M. Zemmour, c'est que ce point-presse se passe à l'extérieur des grilles du sanctuaire, car il s'agit d'un lieu privé et surtout d'un lieu sacré », a précisé le diocèse à l'AFP. « Qu'il visite Notre-Dame est son droit, mais ce n'est pas le lieu pour une déclaration politique. » Là encore, grande cohérence...

À Calais, Yannick Jadot a donc su trouver la photo et les mots, pour parler à un large éventail de la gauche : « On n'est pas nombreux à dire aujourd'hui que l'immigration n'est pas un problème », a-t-il répété après ses propos au journal de France 2, la veille. On peut ironiser sur la formule, surtout au moment où un sondage IFOP montre que l'immigration en est bien un pour deux Français sur trois, et même pour un sympathisant de gauche sur deux. Il n'empêche que l'électorat de gauche, qui a élu des majorités rouges-vertes dans toutes les grandes villes de France, ne s'est pas évaporé cet automne. Et il pourrait trouver en Yannick Jadot le candidat de ses aspirations. Et Emmanuel Macron un rival sérieux sur sa gauche, car c'est bien à lui que s'en est pris le candidat Jadot à Calais, dénonçant la politique « inhumaine » de l’exécutif, consistant « à arracher les tentes et à confisquer les biens » de personnes « tentées de prendre la mer dans des conditions abominables ». Pour lui, « la France n’est pas à la hauteur de son devoir d’humanité, a-t-il jugé. La France n’est pas à la hauteur de ses obligations d’accueil ; la France n’est pas à la hauteur des obligations de la République. »

Alors, Jadot, le Zemmour de la gauche ?

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Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

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