Emmanuel Macron, pêcheur de voix au Vatican

macron pape françois

L’homme du progrès et du « en même temps » s’accorde un petit crochet par le Vatican. De retour de Croatie et après la signature du traité du Quirinal, Emmanuel Macron a prévu une audience privée avec le pape François, la deuxième depuis le début de son mandat. Dans l’avion qui le conduit à Rome, le Président déclare aux journalistes qui l’accompagnent : « Rendre visite au pape, c’est toujours envoyer un signal aux catholiques. » Ce mantra, il l’avait déjà prononcé à Lourdes, cet été, lorsque pour la date anniversaire des apparitions de la Sainte Vierge à Bernadette Soubirous, le chef de l’État était apparu lui aussi, mais seulement sur le parvis de l’Accueil Notre-Dame, sans jamais s’approcher de la grotte. Emmanuel Macron n’était peut-être pas chargé de nous le faire croire, mais de nous le dire : « C’était important d’envoyer un signal aux catholiques. C’est vrai qu’ils ne sont pas toujours bien traités… » Alors le Président, excellent communicant, touche la corde sensible, il rappelle aux bonnes âmes venues le saluer les mains en Namasté que, chaque année, il venait, enfant, prier avec sa grand-mère. Et en même temps, il ne participera à aucun office, aucune visite de la basilique, ni même « déambulation non mystique ».

Qu’importent les contradictions, Emmanuel Macron soigne sa communication. Aux Bernardins, il déclarait, d’une main : « Nous partageons confusément le sentiment que le lien entre l’Église et l’État s’est abîmé, et qu’il nous importe à vous comme à moi de le réparer. » Quand, de l’autre, il allait porter gravement atteinte à la liberté de culte en interdisant les messes en public. Au nom de « la dignité et de la non-marchandisation du corps des femmes », il se dit opposé à la GPA mais laisse sa majorité voter pour la PMA pour toutes et n'a que faire de la marchandisation de l'embryon en chimère. Il se dit « mal à l’aise », « à titre personnel », sur l’allongement du délai de l’avortement, mais « laisse leur libertés aux parlementaires ». Comme Ponce Pilate, il s’en lave les mains : « J’ai dit ce que j’en pensais, je ne peux pas faire plus. » Étonnamment, cet exercice solitaire du pouvoir dérange moins Emmanuel Macron, cantonnant le reste du temps le Parlement à un rôle de chambre d’enregistrement.

Avec 62 % de catholiques ayant voté pour lui au second tour de l'élection présidentielle, la visite d’Emmanuel Macron au Saint-Siège ne dupe personne, à cinq mois de l’élection présidentielle. Surtout pas Louis Daufresne, s’interrogeant malicieusement, dans Aleteia : « Rome sera-t-il à la politique ce que le Brésil est à la chirurgie esthétique ? Une destination pour se refaire les saints, épaissir les tissus d’une autorité symbolique en berne et faire gagner à son âme les centimètres dont elle aura besoin dans les urnes. » Mais seul un électorat catholique de gauche peut encore croire à cette visite symbolique, y voyant certainement un geste rassurant et peut-être un meilleur avenir pour les migrants. Sauf à perpétuer son théâtral numéro d’équilibriste, le Président progressiste et multiculturaliste, mettant toutes les religions sur le même plan dans le cadre de la lutte contre les séparatismes et imposant la laïcité comme ciment de la citoyenneté, ne peut pas en même temps promouvoir une culture chrétienne et défendre la dignité de la personne humaine.

 

Iris Bridier
Iris Bridier
Journaliste à BV

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