Florian Philippot est parti, mais les questions qui fâchent ne se sont pas évanouies !
Enfin ! ont dit certains. Enfin, Florian Philippot a quitté le Front national. Et avec lui, une partie des cadres et militants qui partageaient une ligne socialo-souverainiste peu en phase avec les fondamentaux du mouvement. Nombreux sont ceux qui s’en félicitent - sans doute à juste titre. Il ne faudrait pas croire, cependant, que toutes les questions qui fâchent sont purgées. En réalité, ce n’est qu'un premier pas.
Reconnaissons à l’intéressé quelques succès. Il a fortement contribué à l’accroissement du nombre des électeurs du parti, notamment en poussant à la mise à l’écart de Jean-Marie Le Pen. Même si la méthode manquait singulièrement d’élégance, cette exclusion était nécessaire, tant l’homme est imprévisible et capable du pire, emporté par des propos souvent maladroits, parfois douteux. Et le Front national doit sans doute à Philippot quelques centaines de milliers d’électeurs issus des classes populaires, qui ne constituaient pas son vivier naturel. Ceux-là, insensibles à des thématiques plus conservatrices, pourraient bien se trouver orphelins.
Le vice fondamental de Philippot est de n’avoir pas compris que le Front national est un parti ontologiquement de droite. Non pas de droite libérale, ouverte à tous les progressismes - en bref, de « droiche » -, mais de droite traditionnelle : enracinée, souverainiste, identitaire, historiquement antilibérale – en dépit de son détour reagano-thatchérien des années 80 - et conservatrice. La ligne traditionnelle du parti – qui ne s’est trouvé classé à l’extrême droite que par le fameux mouvement sinistrogyre théorisé par Guillaume Bernard - est conservatrice. Ce qui n’est nullement incompatible avec des positions économiques et sociales antilibérales, tant le terme « libéral-conservateur » constitue un oxymore.
Au contraire, Philippot a voulu en faire un mouvement détaché de ses racines philosophiques et culturelles. Un second chevènementisme, en oubliant que son ancien mentor est un homme de gauche, au sens philosophique du terme, et que le combat pour le souverainisme, s’il permet des alliances objectives de circonstance, est insuffisant pour former une coalition. Par ailleurs, ses prises de position sur les sujets de société ont contribué à éloigner du parti nombre d’électeurs potentiels qui ont préféré se rabattre sur les bonimenteurs de l’UMP.
Philippot parti, il reste à Marine Le Pen à comprendre que son parti a besoin d’une profonde refondation. Pas seulement cosmétique, mais idéologique. La manière dont elle a mené sa campagne, ses approximations, son manque de formation flagrant sont sans doute pour beaucoup dans l’échec persistant du parti. Parce que gagner des électeurs est une chose, gagner les élections en est une autre. Et force est de constater qu’en la matière, le parti a à peine décollé.
Débarrassée de l’encombrante présence du Menhir, débarrassée de son mauvais génie Philippot, Marine Le Pen peut désormais se consacrer à faire du Front national une véritable force de droite souverainiste, identitaire, traditionaliste sans outrance, réaliste en économie et conservatrice sur les sujets de société. En bref, ce qu’attendent tous ceux qui rêvent d’une véritable recomposition à droite. Une droite populaire, ouverte à d’autres, sans outrance, sérieuse dans les solutions proposées, capable d’établir un programme de gouvernement en s’appuyant sur des personnalités compétentes. À condition de ne pas les faire fuir par un caporalisme passé de saison, de les écouter et d’en apprendre ce qui est nécessaire pour que, plus jamais, ses électeurs ne connaissent la honte d’un certain 3 mai 2017.
À Marine Le Pen de montrer qu’elle en est capable. Sinon, comme le propose Robert Ménard, il faudra la remplacer. Parce que ce n’est pas le Front national qui est en jeu, c’est la France.
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