Emmanuel Macron en Amérique : derrière le bagou et les bisous, que des clous !
Le Président français est un bon comédien, capable de s'adapter aux spectateurs et de se faire applaudir aussi bien au Capitole qu'à l'université George-Washington. La mise en scène et son déroulement sont toujours très soignés. Les difficultés commencent lorsque le partenaire, qui n'est jamais dans un rôle de composition, en fait trop, époussette l'épaule de son "visiteur d'État", le tire par le bras comme on emmène un enfant à l'école ou en rajoute dans les accolades qui deviennent des bisous assez ridicules. Ces fausses notes nous font quitter la forme pour le fond, qui est moins glorieux.
D'abord, il y a au-delà des hyperboles habituelles de Trump des caresses verbales appuyées envers la France et son Président, la première magnifique et le second formidable, un calcul qui consiste à tirer parti de cette visite pour améliorer son image auprès des Américains en leur montrant que la démolition qu'il subit à l'intérieur n'est pas partagée à l'extérieur, par le représentant d'un pays, certes bien affaibli, mais qui pourrait s'améliorer avec un chef d'État aussi américanophile.
De plus, ce débordement d'affection, cette insistance sur la qualité des relations personnelles, chargées d'affectivité, trahissent une certaine condescendance, comme celle de Clinton à l'égard d'Eltsine, partant dans un grand fou rire complice avec celui que, ne craignant plus, il ne respectait plus. Les États, comme le rappelait Nietzsche, sont "les plus froids des monstres froids". Les embrassades excessives doivent toujours éveiller des soupçons sur leur sincérité.
Or, sur les trois points importants de divergence, d'accord, il n'y en eut pas ! Macron voulait faire bouger Trump sur le nucléaire iranien. Non seulement le président américain n'a pas renoncé à déchirer le "Plan d'Action global conjoint" entre l'Iran et les cinq puissances nucléaires plus l'Allemagne, le 12 mai prochain, mais c'est Macron qui a fait un pas en direction de Trump en parlant d'un nouvel accord, prolongeant l'actuel au-delà de dix ans, incluant un contrôle et une limitation de la production de lanceurs par l'Iran, et imposant une solution politique globale pour le Proche et Moyen-Orient, c'est-à-dire notamment la Syrie. L'Iran a déjà fait connaître son opposition. On ne voit pas comment ce recul français pourrait faire avancer les choses. Fin de non-recevoir, également, de la Maison-Blanche sur le commerce et sur l’environnement.
Mais l'analyse du contenu de ses prises de parole est plus préoccupante encore. Les formules creuses y abondent : il s'agit d'aller plus loin, de continuer à avancer, de construire des ponts pour la paix. Les contradictions y sont légion : le représentant de la France veut faire rayonner le français mais parle en anglais dès qu'il le peut et truffe ses discours en français d'anglicismes qui trahissent la caste à laquelle il appartient ; il évoque un accroissement de la participation française en Syrie, mais en semblant la concentrer contre Daech, comme si la rébellion syrienne n'était pas dominée par les islamistes, et notamment ceux d'Al-Qaïda ; il veut faire de la SNCF un "modèle de gouvernance du rail en Europe". Ce dernier exemple est révélateur d'un travers national. La France n'a pas su réformer à temps et offre aux yeux du monde entier l'image de ses blocages structurels, mais elle va continuer à se prétendre meilleure que les autres. Le Paul Reynaud du "Nous vaincrons parce que nous sommes les plus forts" est réincarné.
La déclaration la plus consternante de Macron concerne l'immigration. À propos de l'islam, il ose dire : "Notre population ne sait pas comment se comporter avec cette religion." Et il ajoute qu'il ne faut pas refuser l'autre. Comme s'il n'est pas nécessaire de refuser l'autre qui vous refuse, alors qu'il s'invite chez vous, et comme si c'était au peuple français d'apprendre à se comporter avec les immigrés plutôt qu'à ceux-ci de s'adapter à la population du pays où ils s'installent !
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