Demander la Lune
En fait, et il faut le rappeler en ce cinquantième anniversaire de l’arrivée d’Apollo XI sur la Lune, c’est le seigneur Pantagruel qui, le premier, visita l’astre de la nuit « pour savoir si, à la vérité, la lune était entière, alors que les femmes en avaient trois quartiers dans la tête ». Nous n’avons pas la date exacte, mais Rabelais en atteste dans ses écrits. Auparavant, Pantagruel avait rompu « quatre dents à Lucifer et une corne au cul ».
Puis il fallut attendre le milieu du XVIIe siècle pour qu’on apprenne que le paradis terrestre était localisé sur la Lune. Cyrano de Bergerac – le vrai, pas celui de Rostand - nous raconte, dans son voyage imaginaire intitulé Histoire comique des États et Empires de la Lune, comment il essaya de rejoindre la Lune à l’aide de fioles remplies de rosée. L’expérience ne fut pas concluante. « Je m’étais attaché tout autour de moi quantité de fioles pleines de rosée, et la chaleur du Soleil qui les attirait m’éleva si haut qu’à la fin je me trouvai au-dessus des plus hautes nuées. » Malheureusement, la Terre tourna et il se retrouva en Nouvelle-France, au Canada. Finalement, il utilisa une fusée et réussit à se poser sur la Lune. Pour revenir sur Terre, il ne reprit pas sa fusée mais se servit du diable comme « voiture ». Le récit ne précise pas s’il s’accrocha à sa queue, ce qui aurait pu être, alors, l’origine de la fameuse expression « Tirer le diable par la queue ». Est-ce à dire, aussi, qu’il avait tenté le diable en visant la Lune ?
Il est vrai que c’est le propre de l’homme que de demander la Lune, d’écouter ceux qui la lui promettent, mais aussi de la décrocher de temps en temps. Promettre la Lune : en voilà, un beau métier d’avenir ! C'est un peu vendre du rêve. D’ailleurs, n’est-ce pas là la principale occupation de cette fainéante de Lune ? Certes, elle s'occupe comme elle peut à ameuter les loups-garous dans la campagne environnante. Elle ne manque pas non plus de dévoiler, très occasionnellement il est vrai, sa face cachée à ces Pantagruel, Cyrano de Bergerac et autres astronautes américains qui peuvent se vanter d'avoir vu la Lune, un beau jour ou peut-être une nuit, comme d'autres d'avoir vu le loup. Mais à part ça, elle n'est finalement bonne qu'à nous inviter à la rêverie. Ce qui est déjà pas mal, n'en déplaise aux lunatiques.
« Ce soir, la lune rêve avec plus de paresse ;/Ainsi qu’une beauté, sur de nombreux coussins,/Qui d’une main distraite et légère caresse/Avant de s’endormir le contour de ses seins… »
Mais je suis dans la Lune ! J'allais oublier de préciser de qui sont ces vers : de Charles Baudelaire, dans Les Fleurs du mal.
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