Conseil constitutionnel : Fabius sur le départ, l’enjeu réel d’une succession

Capture d'écran
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Laurent Fabius est sur le départ : le 7 mars prochain, son mandat de président du Conseil constitutionnel prendra fin, après neuf années d’exercice d’une charge non renouvelable. L’ancien plus jeune Premier ministre de la Ve République, depuis détrôné de ce titre par Gabriel Attal, pourra faire valoir ses droits à une retraite à jouissance immédiate bien méritée. À 79 ans, on a la vie devant soi. Mais dans la catégorie à laquelle appartient le personnage, prend-on jamais sa retraite ? Dans le cursus honorum de la République, il lui restera à accrocher la grand croix de la Légion d’honneur à son palmarès, ce qui, sans nul doute, devrait venir assez vite. L’Académie française ? La rumeur avait couru, l’an passé : il aurait ambitionné le fauteuil de Giscard d’Estaing. C’est le jeune médecin psychiatre et écrivain Raphaël Gaillard, âgé de 48 ans, qui a piqué la place. Rajeunissement des cadres oblige, dans la vénérable maison : ce qui, au plan strict des « ressources humaines », est une sottise car en élisant un jeune à vie, on ne facilite pas le turnover (pardon pour l’anglicisme particulièrement inapproprié pour la compagnie fondée par Richelieu). Mais bon, Fabius, c’est du passé et, au fond, son sort importe peu.

Au cas où Marine Le Pen serait élue…

La question, maintenant, est de savoir qui Emmanuel Macron va désigner pour, non pas remplacer - Laurent Fabius est bien évidemment irremplaçable -, mais lui succéder. La question peut sembler anecdotique, microscopique, voire « microcosmisque », mais elle est de la plus haute importance. Déjà plus d’un an que la question trotte dans la tête de tous les esprits avertis. « Dans l’hypothèse où la victoire du RN en 2027 est envisagée, le futur président du Conseil constitutionnel sera plus important que le futur chef de l’opposition », confiait, en mars 2024, un « conseiller de l’exécutif » au Figaro. Pourtant, en mars 2024, si on se doutait un peu que les élections européennes ne seraient pas un triomphe pour les partis « progressistes », on n’imaginait pas l’ampleur de la déculottée, la dissolution et les plus de onze millions d’électeurs qui voteraient pour « l’extrême droite » aux élections législatives. Dans l’esprit des défenseurs d’un État de droit sacralisé et, de fait, de l’État des juges (« juges constitutionnels », Conseil d'État, Cour de cassation, etc.), il s’agit de s’assurer qu’en cas de victoire de Marine Le Pen en 2027 - hypothèse qui n'a, à ce jour, plus rien de farfelu -, les bonnes personnes seront bien aux bonnes places. Notamment au « Cons' cons ».

Les messages en l'air de Fabius

On a encore le souvenir du torpillage, par le Conseil constitutionnel, de la loi Immigration à la fin 2023. Cette loi n’était pourtant pas une révolution copernicienne ! Les « sages » avaient notamment reproché au texte d’utiliser un « cavalier législatif » inapproprié. Curieusement, les mêmes n’avaient pas été gênés, un an plus tôt, par un autre cavalier législatif, cette fois-ci portant la bonne casaque, employé par le gouvernement, qui faisait passer la réforme des retraites par un projet de loi rectificative de financement de la Sécurité sociale (PLFRSS) pour 2023. C’est technique, tout ça, me direz-vous. C’est surtout pratique et finalement très politique. Lisez le discours des vœux de Fabius devant Emmanuel Macron, le 8 janvier dernier. Un Fabius qui se félicitait de la reconnaissance, en 2018, de la valeur constitutionnelle du principe de fraternité, entravant ainsi la lutte contre l’immigration irrégulière. Un Fabius qui envoie des messages en l’air plus que très clairs à ceux qui voudraient modifier la Constitution par référendum avec l’article 11 et non l'article 89 (passage obligé par les deux assemblées), comme le fit d’ailleurs de Gaulle en 1962 pour l’élection du président de la République… Mais là, vous comprenez, c’est différent ! Les gardiens du système ont les clés bien en main.

L'État de droit, pour ne pas dire « l’État socialiste »

Le Conseil constitutionnel, donc, clé de voûte de l’État de droit. Pour ne pas dire « l’État socialiste », pour reprendre les mots d’Éric Zemmour, en 2022 : « Les socialistes, qui ne représentent plus que 3 % dans le pays, qui dirigent le pays. » Cette manie, chez Zemmour, de toujours tout exagérer : Hidalgo fit 1,7 % deux mois plus tard à la présidentielle ! Effectivement, Fabius au Conseil constitutionnel, Moscovici à la Cour des comptes. On pourrait élargir le spectre en évoquant l’Arcom, dont le pouvoir dépasse de fait ses seules attributions légales, compte tenu du poids des médias dans la vie publique et politique d’aujourd’hui. Son nouveau président, Martin Adjari, fils d’une députée socialiste, fut conseiller dans les cabinets des socialistes Fabius puis Parly (ralliée à la Macronie). Tout cela fait beaucoup de socialistes, particulièrement Macron-compatibles, avec toute la palette de nuances de rose.

Alors, qui pour succéder à Fabius ? Emmanuel Macron n’a sans doute que l’embarras du choix. En décembre dernier, Fabius distillait ses petits conseils dans un entretien au Figaro. Il évoquait doctement « l’exigence de disposer d’une expérience juridique solide ». Est-ce pour cela qu’on entend régulièrement remonter à la surface le nom du fidèle Richard Ferrand, ancien président de l’Assemblée nationale ? Il fut autrefois journaliste et patron d’une boîte de graphisme… Moscovici ? Qui, peu à peu, suit le chemin de Fabius dans la course aux honneurs ? Un non-politique ? Peu importe, au fond. Emmanuel Macron saura bien trouver le mouton à cinq pattes à même de faire les croche-pieds constitutionnels adéquats, le moment voulu.

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

76 commentaires

  1. A-t’on des nouvelles de l’appartement à 7 millions d’euros acheté en plein Paris par le fils Fabius qui touchait le RSA à ce moment ?
    Responsable mais pas coupable de détournement d’aides publiques sous couvert du papa ?

  2. Conseil constitutionnel..! C’est donc bien un conseiller et pas un tribunal….! Ils ne sont pas élus mais choisis…! Donc, cette assemblée si honorable soir elle n’a pas à dicter, imposer, annuler ou supprimer. Elle émet des conseils des avis..!. On suit ou on ne l’écoute pas.! De toutes les façons ses vieux inutiles participants ne sont là que pas connivence par intérêt et bon vouloir de politiciens corrompus. Il faut renverser cette assemblée devenue inique. Elle oeuvre toujours contre le peuple qu’elle n’écoute pas et qu’elle malmène au bon vouloir et au gré de gouvernants illégitimes.. Le peuple doit retrouver sa juste parole et le pouvoir.

  3. Prenez conscience que même après son départ avec ce remplacement de FaFa, Macron continuera son entreprise de destruction pour des années …..

  4. est des fautes politiques qui sont des crimes économiques. Abstenez-vous des unes comme des autres. L’heure est à la baisse des impôts. Pour cela, il est temps de couper dans la dépense publique. C’est là que le Conseil Constitutionnel n’a aucun intérêt, il faut le supprimer il ne sert à rien qu’à alourdir les dépenses des français en puisant dans nos poches ce financement.

  5. ce comité Théodule n’a aucun intérêt. Il faut le supprimer, ou au moins le ramener à ce qu’en avait fait DeGaulle, un simple rôle de conseil. Seul les référendums donnent la voix au peuple.

  6. Certainement que le senceur de BV doit étre très malheureux de voir partir Mr Fabius,j’attend de lire mon commentaire.

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