Avec sa « Chambre introuvable », Macron va-t-il déchanter comme Louis XVIII ?

Bien entendu, il ne faut comparer que ce qui est comparable. 1815 n’est pas 2017, tout comme 1967 n’est pas 1981. Cependant, il arrive que l’Histoire repasse parfois les plats. Ce sera sans doute le cas le 18 juin prochain avec l’arrivée, au palais Bourbon, d’environ 400 députés La République en marche (LREM). Du jamais vu depuis 1815 et l’élection de la Chambre introuvable de Louis XVIII. En effet, la première législature de la Seconde Restauration porte à la Chambre des députés, composée de 400 députés, pas moins de 350 parlementaires royalistes contre 50 représentants dits « constitutionnels » que l’on appellerait aujourd’hui "réformateurs". Le suffrage est, à l’époque, censitaire : seuls les hommes payant un certain niveau d’impôts sont autorisés à voter pour les représentants du peuple. Les élections ont lieu les 14 et 22 août, c’est-à-dire un peu plus d’un mois après le retour en France de Louis XVIII, qui succède à Napoléon défait à Waterloo. Ce scrutin se déroule dans un contexte de Terreur blanche et d’épuration des éléments bonapartistes.

Surtout, sur les 350 députés, plus du tiers (130) ont moins de 45 ans ! Seuls 61 ont connu une ou plusieurs législatures précédentes. Louis XVIII ne peut pas rêver d’une Assemblée plus favorable, qui lui soit plus dévouée. "C’est une Chambre introuvable", dit-il pour exprimer son émotion. Mais il va vite déchanter. Car cette majorité se révèle, au fil des semaines, nettement plus royaliste que le roi. En fait, elle va à contre-courant de la volonté d’apaisement du monarque. Celui-ci, intégrant les "acquis révolutionnaires", tente une politique de réconciliation nationale. La nomination du modéré duc de Richelieu à la tête du gouvernement en est l’un des signes. Mais les députés, forts de leur nombre, votent une série de lois contre-révolutionnaires : loi de sûreté générale (avec le retour d’une conception modernisée des lettres de cachet), loi sur les discours et écrits séditieux, rétablissement des cours prévôtales, etc.

Le 18 juin 2017 au soir, la France risque de se retrouver dans une configuration politique presque identique à celle de 1815 : une Chambre introuvable, avec la promesse de 400 députés estampillés La République en marche (LREM). Mais la comparaison va-t-elle s’arrêter au nombre ? Les députés ultras d’il y a deux cents ans étaient mus par la volonté de restaurer les ors, us et coutumes de l’Ancien Régime. Mais quelles idées portent et guident les 400 futurs parlementaires permettant d’asseoir la gouvernance du Président Macron ?

Depuis deux cents ans, les codes ont changé : l’initiative parlementaire n’appartient plus aux députés (et encore moins aux sénateurs). Elle est détenue par l’Union européenne et par le gouvernement. Le Parlement n’est plus, aujourd’hui, qu’une chambre d’enregistrement des textes communautaires et des traités internationaux. Les représentants du peuple ont, finalement, moins de pouvoir en 2017 qu’ils n’en avaient en 1815… Et si la promesse d’une Chambre introuvable n’était finalement qu’un leurre ? D’ailleurs, celle de 1815 n’a pas duré un an !

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