Bloquer les avoirs des personnes portant un nom à consonance russe : en voilà, une idée qu’elle est bonne

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La guerre continue de faire rage. En Ukraine, évidemment. Mais ici aussi, chez nous, dans les cerveaux fébriles et féconds de nos compatriotes, tous prêts à participer à l’effort de guerre, de préférence « en distanciel » plutôt qu’« en présentiel », cela va de soi. Faut dire que, depuis la dernière guerre (celle contre le Covid, notamment à l’époque du Grand Confinement), les Français ont pris des habitudes.

Effort de guerre, donc. Hier, par exemple, et par chez moi, une représentante d’association caritative recherchait des casques lourds ne servant plus et que l’on pourrait envoyer à nos amis ukrainiens ! Le casque Adrian de l’arrière-grand-père Gaston qui avait fait 14-18, celui du GI américain, parti trop vite un petit matin de l’été 44, après une nuit torride avec la tante Lucette qui garda longtemps dans les yeux les étoiles du drapeau yankee et, pourquoi pas, le casque de coiffure de mémé Simone qui tint salon pendant quarante ans face la mairie ?

Effort de guerre, tous azimuts. Aucun domaine, aucun segment, aucun secteur de la société n’y échappe. Cette ingéniosité à riposter aux Russes, sans pitié et là où ça fait mal, a déjà été évoquée sur Boulevard Voltaire. On voit notamment l’efficacité redoutable de nos administrations nationales et internationales à bloquer les fameux avoirs et autres yachts de luxe des tout aussi fameux oligarques. On imagine que le retour d’expérience de cette guerre atroce permettra, lorsqu’elle sera terminée et qu’on aura le temps, de se pencher sur les milliards qui, dit-on, passent sous les radars de la lutte antifraude. C’est bien connu, les temps de guerre sont des occasions de progrès inouïs, immédiatement transposables dans le civil, une fois la paix revenue.

Effort de guerre : un exemple très concret sur le front du tiroir-caisse ? C’est Le Canard enchaîné de cette semaine qui nous en donne un. Ainsi, le président de la Caisse autonome des règlements pécuniaires des avocats (CARPA) des Hauts-de-France, organisme chargé de gérer les fonds déposés par les avocats au nom de leurs clients, vient de décider de bloquer les avoirs des clients dont « la consonance du nom serait slave ». Au nom, sans doute, du fameux principe de précaution. On croit à une blague, mais non, pas du tout. « La rigueur s’impose si vous voulez être efficaces dans cette lutte contre la Russie », a déclaré le président de la CARPA, par ailleurs bâtonnier de Valenciennes, pour justifier sa décision. À la guerre, c’est bien connu, on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs. Alors, zou ! On bloque tous les noms à consonance slave et on fera le tri après. Mais slave comment ? Parce que des Slaves, il y en a pour tous les goûts. Ceux du Sud, par exemple : Croates, Serbes, Slovènes, Bosniaques, Macédoniens. Et puis ceux d’Europe de l’Est : Polonais, Tchèques, Slovaques, etc. Et puis, plus à l’est encore, on a les Biélorusses, les Russes et… les Ukrainiens. Chef, on fait quoi, avec les Ukrainiens ? Pas les Ukrainiens ! Cette diversité slave est, d’ailleurs, un argument de taille pour cet avocat pour contrer ses détracteurs : discriminatoire, cette mesure, voire raciste ? Pas du tout : « La consonance slave regroupe plusieurs États, ça ne peut être discriminatoire », poursuit le président de la CARPA. Bien vu, mais un peu léger, peut-être, non ? On ne sait pas combien de personnes représente ce tri des clients portant un nom à « consonance slave ». Espérons seulement qu’il n’y a pas trop de descendants de mineurs polonais ou de princes russes ayant fui le bolchevisme. Il n'empêche, nous dit un ami avocat, que cette affaire secoue la Conférence nationale des bâtonniers et que cet avocat pourrait risquer des poursuites pénales.

Cependant, bien bordée, l’idée est à creuser. On se demande, d’ailleurs, pourquoi on n’y avait pas pensé plus tôt. Par exemple, lors des guerres en Irak et en Libye, ou encore au plus fort des combats contre l’État islamique. Paraît que ça brassait pas mal d’argent, aussi, dans le coin. Au principe, bien évidemment, que « la rigueur s’impose si vous voulez être efficaces ».

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

55 commentaires

  1. on pourra plus tard raconter à nos petits enfants nos actes de bravoure et de résistance pendant l’horrible période du Grand Confinement

  2. C’est plus facile de déverser sa haine contre les Russes, que contre un vrai ennemi. L’ennemi facile, depuis son canapé…

  3. Michel… Michel… Ne serait-ce pas un.nom à consonance slave? Plusieurs Grands Ducs ou Czar ayant porté ce nom!
    MDR! Si ce n’était pas si triste de bêtise, d’inculture et tout simplement de racisme… Imaginons le même traitement pour les juifs pendant la guerre… Combien seraient morts, combien auraient échappé à leur sort sur des présupposés imbéciles…
    Et quand on pense que ce sont des juristes, des spécialistes de la Loi qui proposent cela!

  4. Quand on constate toutes les inepties qui s’abattent sur nous, depuis la guerre du Covid et aujourd’hui avec celle d’Ukraine, mais qui devaient être en latence, on se dit que si après avoir échappé à la destruction par le Covid on devait succomber à un big bang nucléaire déclenché par une ineptie de plus, on l’aurait peut-être bien mérité.

  5. Ou par exemple simplement l’arrière ou arrière petit fils de russes blancs réfugiés en France après la Grande-guerre. Dont l’aïeul était chauffeur de taxi parisien, le grand-père résistant, le père ingénieur dans une entreprise française, toutes ces générations n’ayant rien eu à voir avec l’Union Soviétique, qu’elles avaient fuit, scolarisées en France et de nationalité française, mais portant le nom russe de leur ancêtre! Quelle géniale idée de les sanctionner pour les actes de Poutine!

  6. Quand Dissonance rime avec Consonance….
    Attention, en France, la Consonance arabe ou africaine peut aller loin !

  7. Curieuse proposition qui suppose pouvoir faire la différence (du moins je le suppose) entre les noms russes et les noms ukrainiens très souvent d’origine russe. Ceux qui énoncent de telles stupidités devraient savoir que l’Ukraine est la province mère de la Russie de Catherine II
    Vers l’an 1000, le mariage d’Anne de Kiev avec Henri 1er fit d’elle la Reine de France, renforçant les relations entre notre pays et l’Empire Russe
    Mon grand’père, né en Ukraine avait un passeport russe

  8. Quel est l’abruti qui a encore pondu ça et pourquoi pas contre ces pays musulmans après chaque attaque terroriste ? Là on fait moins le malin .Alors les courageux on commence par expulser les clandestins , les fauteurs de troubles et on vide les prisons, wouah que d’économies pour ce pays .Allez au boulot .

  9. Le président de la CARPA, par ailleurs bâtonnier de Valenciennes devrait avoir honte.
    La Russie ne nous fait pas la guerre. Alors de quoi se mêle-t-il ? Encore un Macron au petits pieds qui cherche à emmerder une partie de la population française.

  10. « La rigueur s’impose si vous voulez être efficaces dans cette lutte contre la Russie »

    entendu ce matin, la coopération spatiale Russie-France pour Mars, est arrêtée. Motif ? « On ne peux pas faire autrement ». En clair, Bruxelles a décidé, et on se plie.

    Comme Bruxelles a décidé de bombarder de noms féminin nos bâtiments, et vu « qu’on ne peut pas faire autrement », on va faire.

    ça s’appelle esprit moutonnier

  11. Et bien entendu, le même procureur n’hésitera pas à mettre en prison un individu qui commettra le crime de faciès.
    La connerie n’a plus de limites.

  12. Aïe! Aïe! Aïe!
    Ça va craindre pour la pension militaire du sieur Yakovlev!
    Ancien Officier de la Légion Étrangère, brillant représentant de la France au SHAPE, Général de Corps d’Armee (2s), la vindicte anti- russe pourrait-elle l’atteindre?
    Qui plus est, cas aggravant: Le père Michel (Yakovlev) affilié au Dassault russe, j’ai nommé le fabricant historique des avions de chasse YAK, va-t-il devoir rendre sa cravate de la Légion d’Honneur?
    Le peuple craintif s’interroge….

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