Les crèches manquent cruellement de personnel. Dans son discours de politique générale, le 6 juillet dernier, Élisabeth Borne s’était donné pour objectif de créer 200.000 places d’accueil. Un arrêté publié le 4 août assouplit donc les conditions de recrutement, permettant, en cas de pénurie, d’embaucher un personnel non qualifié et de faciliter l’embauche de titulaires de diplômes étrangers. Cet arrêté trouble nombre de professionnels de la petite enfance qui craignent de voir leur métier tiré vers le bas ou investi par des filières étrangères… et de parents qui s’inquiètent pour leur progéniture.

Le drame sordide de la crèche de Lyon du 22 juin dernier - une  jeune employée, excédée par les cris, avait fait ingérer un détergent à une fillette de 11 mois, qui en était morte - demeure dans les esprits.

Pour les parents, pourtant, la crèche avait jusque-là cet avantage sur la nourrice d’être plus sécurisante : ce n’est pas un huis clos entre un bébé incapable de faire un compte rendu de sa journée et un adulte de ce fait tout puissant et donc possiblement dissimulateur, mais une armada de salariées qui se contrôlent l’une l’autre et ne peuvent donc être maltraitantes sans (qu'en principe) on s’en aperçoive. Mais désormais, avec cette affaire terrible, comment ne pas s’inquiéter de voir privilégier la quantité sur la qualité et tabler sur un infléchissement du niveau d’exigence pour recruter ?

Une situation inquiétante qui n’est pas sans rappeler, à l’autre bout de la vie, tout aussi vulnérable, celle des EHPAD, brutalement révélée par le livre Les Fossoyeurs. Le constat et les causes larvées sont similaires : une société de moins en moins holiste, de plus en plus individualiste, dans laquelle la charité chrétienne - que l’on appelle, dans sa version laïcisée, la solidarité - s’étiole en même temps que le sens du devoir et la conscience sans lesquels elle ne peut exister. Il se dit que les jeunes cherchent désormais du sens dans leur métier, et l’on s’en extasie comme s’ils étaient prodigieusement altruistes, mais dans le même temps, selon un sondage récent, la moitié d’entre eux seraient prêts à démissionner si le « 100 % présentiel leur était imposé ».

Or, le baby (papy) phone a ses limites : impossible de travailler virtuellement dans une crèche ou un EHPAD par Zoom et Slack interposés. Pourtant, quel métier a plus de sens que celui, profondément incarné et ancré dans le réel, consistant à prendre soin des plus faibles, ceux qui nous sont le plus précieux, nos enfants et nos parents ? Pour leur défense, on a tellement inculqué à cette génération l’amour du lointain aux dépens de celui du prochain, qu’elle tend à croire qu’il n’est de mission humanitaire qu’à l’autre bout du monde quand leur propre grand-mère, à 2 heures de TGV, serait si contente de recevoir enfin leur visite, ou leur tante d’être dépannée temps à autre, à une demi-heure de métro, pour un enfant malade.  Par ailleurs, ayant tous obtenu un simulacre de bac aussi dévalué qu’un assignat de l’an IV mais auquel tout le monde fait mine de croire, comment s’imagineraient-ils destinés à un métier qui ne serait pas hautement intellectuel ?

Le cercle vicieux, absurde, est le même que pour l’Éducation, la restauration, la santé… le métier, mal rémunéré et déprécié, n’attire plus ? Qu’à cela ne tienne, déprécions-le un peu plus pour recruter. Et l’on table bien souvent sur une main-d’œuvre immigrée, dont le peu d’exigence en matière de salaire et d’horaires tient lieu de curriculum vitae - quand ce n’est pas de papiers - pour combler les trous dans le planning. Jamais, sans doute, gouvernement n'aura eu vision plus court-termiste.

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08 août 2022 à 19:21

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37 commentaires

  1. (bis repetita)
    Avec ma compagne nous avons eu 3 enfants et elle est restée à la maison pour s’en occuper ! donc pas besoin de crèches. Je lui ai récemment demandé si elle regrettait. Elle m’a dit que si c’était à refaire, elle referait pareil. Les inepties de la de Beauvoir n’en finissent pas !

  2. Ceci se passe aussi dans les hôpitaux. on a inventé une faute professionnelle grave en disant au personnel médical de ce vacciner sinon il était viré. 15.000 ont refusé. Ils seront remplacés par d’autres venant d’Afrique ou de Syrie, qui ont fui la terreur et la misère, payés moindre mais qui l’accepteront par rapport à ce qu’ils gagnaient chez eux. Les virés eux ne seront jamais repris. On a truqué les chiffre du chômage durant des années en engageant du personnel administratif inutile. Ce système est à saturation maintenant . Il faut donc virer du monde . 9a vient d’être fait. Nous allons vers un asservissement total

  3. Tant que ce gouvernement, comme les précédents, s’obstinera à considérer les métiers de service comme du larbinat, si mal rémunéré, cette situation perdurera. Se mettre au service de l’humain est inenvisageable pour les financiers mondialistes qui nous gouvernent !

  4. Je suis étonnée de constater qu’il n’y a pas de visite médicale du travail imposée plus régulièrement (par exemple tous les 6 mois ?) aux salariés de ces établissements. Y compris à ceux travaillant en intérim, ou aux nouveaux salariés changeant fréquemment d’employeur.
    Notamment pour contrôler la santé psychiatrique et les antécédents. Il ne fait aucun doute que le drame de ce bébé auquel une auxiliaire a fait avaler du Desktop aurait pu être évité.
    On entend tout le temps aux infos l’excuse des désordres psychiatriques pour excuser les crimes. Ca pourrait être mieux surveillé.

    1. Depuis la réforme de l’internat on ne forme pratiquement plus de médecins du travail. Eh oui, pour être interne il faut travailler dans un service de la spécialité. Or il y a très peu de services de médecine du travail. D’annuelle, la visite est d’abord passée biennale, puis confiée à des infirmières (qui n’ont pas compétence pour examiner un patient.) Prochaine étape, un entretien tous les 5 ans avec une infirmière ?

  5. Ce qui est préoccupant, en outre, c’est que l’on n’imagine même plus que certaines mères de famille puissent se consacrer à l’éducation de leurs enfants.
    Ce fut notre choix : 4 années d’études supérieures, 4 ans de travail salarié et 15 ans auprès de nos 5 enfants. Un vrai choix de mode de vie (adieu les loisirs payants entre autres). Bilan : nous serons certainement des retraités pauvres (si le principe de la retraite existe toujours) mais nous aurons fait le meilleur choix pour nos enfants. Dommage que l’État ne sache plus promouvoir ce choix.

    1. Mère ou père de famille … Mais j’approuve, la présence des parents auprès des enfants , surtout dans leur premiere decennie, est essentielle.
      D’autant qu’on ne peut pas dire ni penser que les institutions vont les éduquer. Ce sera tout juste du gardiennage, pas de l’éducation. Et on peut encore moins se fier à l’Education Nationale.
      Mais combien de familles (françaises) ont encore 5 enfants ?

  6. Ben voyons !!! Il ne va pas faire bon de se retrouver en EHPAD. Déjà le prix hors budget (pour moi) voilà maintenant en ligne de mire le personnel mal formé…

  7. Le niveau moral d’une civilisation pouvant être évalué en fonction de l’attention portée aux plus faibles (enfants nés ou à naître, anciens, malades, animaux, … ), le constat est accablant pour nôtre société progressiste. Pour qu’elle soit respectée par ses ennemis, islamistes ou autres, encore faudrait-il qu’elle soit respectable.

  8. Juste une précision : le fait d’être excédé par des cris ne peut pas offrir le début d’une justificatif à l’acte criminel, vicieux et barbare de l’employée de crèche qui à tué la petite fille de 11 mois.
    Elle ne l’a pas secoué ou frappé, elle a tranquillement été chercher un flacon de degouche évier, l’a peut-être transféré dans un flacon plus pratique, puis a forcé une petite fille à l’ingérer.
    Il n’y a ni excuse, ni enfer assez noir pour cette femme.

  9. Malgré la baisse du niveau des examens organisée par l’état depuis longtemps, certains sont toujours trop inadaptés pour s’intégrer en France.
    Après les avoir rangé dans la fonction publique territoriale, puis dans l’armée, on les case de force (pôle emploi sert de prescripteur) dans les crèches, EHPAD, hôpitaux et même éducation nationale. Regardez les nouvelles exigences pour devenir enseignant, on est très, très loin du BAC+5 présenté en couverture…

  10. « la solidarité – s’étiole en même temps que le sens du devoir et la conscience sans lesquels elle ne peut exister. » Et surtout le libre arbitre et la responsabilité individuelle qui devraient l’accompagner.

  11. L’Absurdistan, tout est dévalorisé dans société aliénée par dinutile confinement qui n’ont fait que démontrer que se lever et se déplacer pour aller travaller était ringard.
    Tout n’est que pénurie : profs, pilotes, police, justice, médical et paramédical, etc et pendant ce temps nous avons un gouvernement qui ne pense qu’au bien des lgbtetc et autres minorités agissantes.
    Notre pays sombre sous le regard vide des zélites et de la population…

    1. « Tout n’est que pénurie ». C’est l’évolution inéluctable du socialisme. Et pour le communisme, saint graal du socialisme, c’est la misère, forme aboutie de la pénurie.

    2. …Zélites que les français pas seulement de papiers ont élus et voyez celzéceu qui nous représentent à l’assemblée avec nupes en apothéose, on est mal on est mal!

  12. Avec ma compagne nous avons eu 3 enfants et elle est restée à la maison pour s’en occuper ! donc pas besoin de crèches. Je lui ai récemment demandé si elle regrettait. Elle m’a dit que si c’était à refaire, elle referait pareil. Les inepties de la de Beauvoir n’en finissent pas !

  13. Il faut réduire le sociale comme ça les Français chercheront du travail .
    Il y en a marre de ce pays d’assistanat

  14. Je peux témoigner, de par mon métier, du nombre de collègues qualifiées ( puéricultrice, auxiliaire puer, éducatrice)
    se sentant complètement devalorisées et ne croyant plus en leur métier. Vous n’imaginez pas le nombre d’arrêts maladie pour dépression, le nombre de celles qui songent à démissionner. Le ministre n’y connaît rien. Il faudrait qu’il commence à se demander pourquoi des métiers si estimés autrefois attirent aujourd’hui si peu de gens, voire les font fuir.

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