Après le doigt d’honneur d’un jeune à Saint-Martin, le pied de nez de Collomb à Macron !

L'événement est presque passé inaperçu, avec la mort de Charles Aznavour – au demeurant un grand artiste – qui fait la une des médias depuis lundi après-midi : Gérard Collomb, le ministre de l'Intérieur, a présenté hier sa démission au président de la République, qui l'a aussitôt refusée. Après le doigt d'honneur de Saint-Martin qui sature les réseaux sociaux, un pied de nez à Macron ?

Notre Président est coutumier des doigts d'honneur. Valeurs actuelles rappelle opportunément qu'en avril 2018, lors d'une visite à Saint-Dié-des-Vosges, un retraité lui en avait adressé un pour protester contre la hausse de la CSG, ce qui valut au coupable une interpellation immédiate et une garde à vue. Mais, quand il s'agit du frère d'un jeune braqueur, nulle réprobation d'Emmanuel Macron, qui justifie ainsi son indulgence : « J’aime chaque enfant de la République, quelles que soient ses bêtises. » Ô démagogie, que de bassesses on commet en ton nom !

Comment a-t-il accueilli la démission de son ministre de l'Intérieur, ce compagnon de la première heure, qui avait déjà osé critiquer le « manque d'humilité » de l'exécutif et reprocher à son protégé de n'être pas monté assez vite au créneau dans l'affaire Benalla ? On sait seulement que le président de la République n'a pas donné suite à sa demande et, si l'on en croit l'Élysée, « lui a renouvelé sa confiance et lui a demandé de rester pleinement mobilisé sur sa mission pour la sécurité des Français ». N'empêche qu'il ne doit pas être spécialement content de cette nouvelle tuile, qui sonne comme un affront !

Gérard Collomb n'a même pas prévenu le Premier ministre Édouard Philippe, en déplacement en Espagne. Il s'est exprimé dans Le Figaro et aura l'occasion, selon son cabinet, de « s'exprimer davantage prochainement ». Il faut dire que, depuis l'annonce de quitter le gouvernement après les élections européennes, les critiques pleuvent sur lui, même dans son camp.

Daniel Cohn-Bendit, le redresseur de torts, n'y va pas par quatre chemins. Sur France Info, il déclare : « Laissez un peu une nouvelle génération faire Lyon ! Qu'est-ce que c'est que cette histoire de ce monsieur qui croit que Lyon est sa propriété privée ? » Il dénonce la « condescendance » de Gérard Collomb, estimant insolemment qu'il a « le droit à la retraite ». Il ajoute cette amabilité : « Qu'il quitte ce ministère, qu'il aille s'occuper de ses petits-enfants, des pâquerettes ! »

Notre ex-soixante-huitard, de deux ans son aîné, devrait se regarder dans une glace. Que ne s'applique-t-il pas cette recommandation ? Lui qui a jonglé entre l'Allemagne et la France, entre le gauchisme et le "boboïsme", pour se forger une carrière politique et se verrait bien aujourd'hui le mentor de Macron pour les européennes, n'a-t-il pas fait son temps ?

Cette démission ratée est un nouvel affront à notre Président, qui ne doit plus avoir envie de tirer l'oreille à ce grognard fidèle qui se met à grogner pour de bon, ni de l'étreindre, comme il aime à le faire avec des personnalités comme avec de jeunes délinquants. Avec sa rentrée marquée par le départ surprise de deux ministres, sa popularité en chute et ses maladresses de communication, il n'avait pas besoin de cela ! À moins que ce ne soit un coup machiné par les deux compères pour renforcer l'autorité contestée du ministre de l'Intérieur – ce qui ne grandit pas, non plus, notre Président.

Les seuls à espérer tirer profit de la situation sont les prétendants à la succession de Gérard Collomb. Il paraît qu'ils se pressent déjà au portillon. Le chouchou d'Édouard Philippe serait Gérald Darmanin. Au concours des lèche-bottes, il ne serait pas mal placé ! Aux dernières nouvelles, Gérard Collomb, dans Le Figaro, maintient sa « proposition de démission ». Affaire à suivre...

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Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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