Les 50 ans du Québec libre. Et après ?

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Le 24 juillet 1967, le général de Gaulle, en tenue militaire, du haut du balcon de l’hôtel de ville de Montréal, lance, au milieu d’une incantation, quatre mots qui vont créer une immense polémique : "Vive Montréal, vive le Québec (ovation), vive le Québec libre (très longue ovation), vive le Canada français, vive la France !" (ovation à nouveau).

"Vive le Québec libre !" : ces quatre mots sont aussi célèbres que ceux prononcés, quatre ans plus tôt, par le président Kennedy : "Ich bin ein Berliner." Quelle mouche a donc piqué le président de la République française pour lâcher ce tonitruant appel au Québec à s’éloigner du Canada, devant 15.000 personnes massées places Jacques-Cartier, et pour beaucoup favorables au Rassemblement pour l’indépendance nationale ?

Beaucoup disent qu’il a eu un moment d’égarement, que sa langue a fourché, qu’il a été porté par l’enthousiasme de la foule et d’un voyage où il a, à chaque étape, été accueilli en héros, cette foule lui lançant : "Vive de Gaulle ! Vive la France !" L’ancien ministre Alain Peyrefitte assurera, quelques années plus tard, que ce "Vive le Québec libre" n’a "pas plus été improvisé que l’appel du 18 juin 1940". Il est vrai que, ce 24 juillet, en remontant le long du "Chemin du Roy" reliant Québec à Montréal par la rive nord du Saint-Laurent, il avait lancé à Donnacona : "Vous êtes un morceau du peuple français qui ne doit dépendre que de lui-même." À Trois-Rivières, il avait dit : "Nous sommes à l'époque où le Québec redevient maître de son destin." C’est sans doute ce qui explique l’attitude du Président français quelques heures plus tard à Montréal.

En fait, de Gaulle n’aurait jamais dû prendre la parole en public, ce soir-là. Mais avisant un micro débranché sur le balcon, il insiste pour s’en servir. Un technicien le branche et de Gaulle se lâche : "Je vais vous confier un secret. Ce soir, ici et tout le long de ma route, je me trouvais dans une atmosphère du même genre que celle de la Libération" (ndlr : 1944/45), déclare-t-il avant de lâcher sa bombe sur le Québec libre.

Le Canada fédéraliste et anglophone juge les propos de De Gaulle "inacceptables […] Les Canadiens sont libres, chaque province du Canada est libre. Les Canadiens n'ont pas à être libérés", s'emporte ainsi le Premier ministre Lester Bowles Pearson, qui ne goûte guère cette ingérence. Il voit d’un mauvais œil ce cri de ralliement qui donne une impulsion au mouvement indépendantiste balbutiant. Le soutien du chef de l’État français à la cause des souverainistes québécois leur procure du baume au cœur et une immense joie.

Les relations avec Ottawa, sans être rompues, sont tendues et reprennent leur cours normal après la démission (1969) puis la mort du Général (1970).

Si les souverainistes québécois sont requinqués, ils doivent cependant déchanter lors des deux référendums de 1980 et de 1995, perdus de peu il est vrai. Une prochaine consultation pour rendre le « Québec libre et indépendant » pourrait se dérouler en 2022 : pour les 55 ans de l’anniversaire de l’annonce de De Gaulle. Comme pour mieux ancrer la prémonition ?

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/01/2020 à 16:58.

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