[Une prof en France] Le tournoi des deux nations

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La Coupe du monde de football a visiblement réveillé les passions d'un peuple endormi par les sodas et les vidéos TikTok. Chez nos élèves, ce fut une frénésie patriote et jamais on ne les avait autant entendus parler de géographie. Cela a même dû leur apprendre l'existence de pays qu'ils ne doivent toujours pas savoir situer sur une carte. Les temps ont changé : quand j'enseignais en banlieue nord de Paris, il y a vingt ans, une de mes collègues avait été insultée par un élève parce qu'elle avait eu l'impudence de soutenir que le Maroc était en Afrique, ce que l'élève marocain avait considéré comme une insulte, tant était grand son mépris des Noirs, seuls « Africains » à ses yeux. Aujourd'hui, tous les médias ont célébré la représentation de l'Afrique en demi-finale. O tempora ! O mores ! comme disait ce vieux réactionnaire de Cicéron.

Au moment de la demi-finale, la tension était palpable dans mes classes. Si les discours des « élites » et des médias dominants tendent à ressembler chaque jour davantage à la caricature qu'en fait Laurent Obertone dans Guérilla, les milieux populaires ruraux restent plus en prise avec le réel et sont souvent moins perméables à la propagande woke et à ses manipulations langagières. Ils viennent donc se confronter directement avec les revendications de plus en plus affirmées de certains jeunes musulmans qui cachent, derrière une identité maghrébine fantasmée, leur désarroi face à une société dans laquelle leur paresse et la médiocrité de leurs compétences ne leur ouvrent guère de portes. Et nous, les enseignants, nous marchons sur des œufs.

M. arrive donc tout excité. 

- « Madame, Madame, vous avez vu ? On est en demi-finale !

- Oui, c'est bien que la France soit en demi-finale. Je n'aime pas le foot, mais je soutiens toujours la France.

- Pas la France ! Le Maroc ! On est les rois ! Moi, j'suis pour le Maroc, j'suis marocain.

- Ah bon ? Vous êtes né là-bas ? Je croyais que vous étiez français…

- J'suis né en France, mais mon cœur est pour le Maroc. C'est mon pays !

- Alors, pourquoi n'allez-vous pas vivre là-bas ? Les portes sont grandes ouvertes ! Rien ne vous empêche d'y aller. Et c'est la France qui vous a élevé, c'est l'école française ici, payée par les Français… Enfin, si vous voulez aller au Maroc, vous êtes libre…

- J'peux pas… mais le Maroc, c'est mieux.

- Mmmm… il y a quand même plus de Marocains en France que de Français installés au Maroc. Il doit y avoir une raison.

- Mouais… si le Maroc gagne, wallah, ça va être le feu ! »

C'est là que ça a failli déraper, quand une élève de la classe, sur un ton un peu agressif, a réagi : « Ils » nous fatiguent avec le Maroc ! Et s'il y avait une guerre entre le Maroc et la France, tu serais pour qui ? »

L'absence de réponse de M. a été éloquente. Murmures dans la salle. Mieux vaut couper court.

- « De toute façon, dans la classe, il me semble que vous êtes tous français, je ne crois pas qu'il y ait des élèves étrangers.

- Moi, j'suis pas français, M'dame ! réplique K.

- Ah bon… D'où venez-vous ?

- De Mayotte !

- Parce que Mayotte, ce n'est pas la France ?

- Ben non… (devant mon regard insistant). Enfin, j'sais pas… C'est la France ? »

- K., vous pouvez me dire combien de gens, dans la rue, si on les interrogeait, ne sauraient pas dire dans quel pays ils sont nés ?… »

Petit laïus sur l'abîme sidérant de leur ignorance, qui va jusqu'à leur propre identité. Puis on passe à autre chose.

Le lendemain, je vois en entretien le père de M., à qui je dois parler du comportement général de son fils et surtout de son absence de travail. Je profite de l'occasion pour lui raconter ce qui s'est passé en cours, sans cacher ma propre réaction. Je ne m'attendais pas à rencontrer un homme de ce genre. Très investi dans la scolarité et l'éducation de ses six enfants - la maman, analphabète, ne peut pas vérifier le travail scolaire de la fratrie et est en adoration devant son unique fils, qui profite autant qu'il le peut de la situation -, il déplore le comportement et les prises de position de son fils, qu'il identifie comme un simple et lâche prétexte pour couvrir sa paresse. « Il n'est quasiment jamais allé au Maroc, il ne sait pas de quoi il parle ! Son pays, c'est la France, c'est là qu'on a eu la chance de tout construire. On a travaillé dur. Mais lui, il ne veut pas travailler ! On n'a pas d'avenir, là-bas. En plus, il parle même pas arabe ! C'est n'importe quoi, tout ça ! ».

Devant ce discours, je reste songeuse. Cela me rappelle l'Éducation nationale : une distorsion spectaculaire entre les principes énoncés et le résultat constaté. Simple « échec » ? Cette distorsion semble plutôt révéler une hypocrisie constitutive, un mensonge profond qui ronge l'ensemble, comme un ver.

Virginie Fontcalel
Virginie Fontcalel
Professeur de Lettres

Vos commentaires

18 commentaires

  1. Les jeunes maghrébins ont du pays de leurs ancêtres une vision fantasmée. Ils n’y ont jamais « trimé » dans un bled. Ils n’y vont que pour les vacances. C’est donc super ! Mais ils restent en France après leur majorité : allocations, HLM, trafic de drogue lucratif, possibilité de vivre sans rien faire, justice laxiste, possibilité d’insulter le pays de résidence sans aucun ennui et d’attaquer les policiers, possibilité de voter pour des gens qui détruisent la France, comme la NUPES. C’est super ! L’été, on va au pays de coeur avec l’argent des alloc. La vie est belle.

  2. Ce n’est pas un job que vous occupez Madame, c’est un sacerdoce !
    J’aime beaucoup lire ce genre de description, de situation, ça laisse songeur.
    Bon courage.

    • Croyez-vous que vous tiendrez jusqu’à 64 ans dans cet établissement ? Il faut souffler aux députés que les enseignants méritent la prise en considération de la pénibilité d’exercice de leur métier.

  3. De toutes façons, pour avoir vécu non seulement au Maroc mais aussi dans d’autres pays alors sous administration française, le seul langage qui tienne et qui est compris par tous c’est celui de la vérité et de la fierté associé à la force de caractère. Tant que les Français de métropole, avachis et endormis dans une repentance totalement injustifiée n’auront pas compris cela et ne le pratiqueront pas au quotidien, il n’y aura aucune rémission, bien au contraire.

  4. Ce sont ceux qui se prétendent nos élites qui sont des irresponsables en voulant toujours plus de repentance. C’est en étant fier de notre culture, en assumant notre histoire que nous saurons donner envie aux jeunes générations d’aimer la France. En effet, on ne peut que constater que c’est l’ensemble de la jeunesse et pas seulement celle issue de l’immigration qui ne sent pas investie par son appartenance à la France. Il nous faut nous réapproprier notre histoire et il faut avant tout que tous ces discours de repentance soient condamnés à tous les niveaux de l’état.

  5. Bien sûr qu’ils ne le feront pas… Ils seraient privés des nombreuses prestations généreusement distribuées en France. Ils seraient obligés de travailler et de rendre des comptes à la justice en cas de délit. Rendez vous compte ! !

  6. Je vis les mêmes scènes quasi quotidiennement dans mon travail. Le pire c’est qu’on doit prendre sur soi et ronger son frein face à de telles inepties. Le lavage de cerveau que subissent ces gamins fait que toute discussion est impossible. La France, ce pays de méchants blancs, n’est pas leur pays. Et nous, contrants et forcés de supporter leur ignorance, leur manque de culture, de respect, ne sommes là que pour servir de réceptacle à la haine infinie qu’ils nourrissent contre notre pauvre pays.

  7. Rien à rajouter, un tableau réaliste du mal qui va entraîner notre pays dans le chaos , un article qui devrait être présenté au sénat et à l Assemblée nationale pour qu ils ne puissent pas dire, on savait pas

  8. Mayotte est une part de France que nous devons à la générosité de Sarkosy (Français de seconde génération) qui nous a conseillé de nous métisser comme lui . L’immense ignorance des élèves de toutes origines africaines est le résultat du manque de savoir des Maîtres et de l’abandon de toute envie d’enseigner par la plupart . Les Français de cette île ne connaissent de l’Hexagone que les Caisses d’Allocation diverse et multiples .

    • « L’immense ignorance des élèves de toutes origines africaines est le résultat du manque de savoir des Maîtres et de l’abandon de toute envie d’enseigner par la plupart » c’est un peu facile d’écrire çà, non ?
      Affirmer que les  » maîtres » seraient dans leur ensemble ignorants au point d’être  » responsable » de l’ignorance des élèves, elle est bien bonne celle là ! Que les enseignants perdent le goût de transmettre dans les conditions qui sont les leurs je peux le comprendre, mais quand vous avez face à vous 30 individus qui non seulement ne veulent pas ni apprendre, ni travailler, et qui en plus conteste ce que vous enseigner, ce sont eux les responsables du vide sidérale qui les habite !
      Ce coté  » tout est de la faute des autres » geignard et compagnie est absolument détestable –

      • Les jeunes ne sont peut être pas tous entièrement responsables du vide qui les habitent. Et certains enseignants n’ont pas grand chose à proposer pour combler le vide.
        La tâche des enseignants est immense, et croît avec l’ immigration.

  9. Il faut avoir les nerfs solides pour être confronté régulièrement à ces situations. Je souhaite à ces gamins, dès qu’ils seront autonomes, de partir vivre dans ce qu’ils appellent « leur pays ». Ils ne le feront pas, bien sûr, quitte à passer leur médiocre vie à critiquer et insulter la France.

    • Bien sûr qu’ils ne le feront pas… Ils seraient privés des nombreuses prestations généreusement distribuées en France. Ils seraient obligés de travailler et de rendre des comptes à la justice en cas de délit. Rendez vous compte ! !

  10. Triste réalité , ils ne savent même pas d’ou ils viennent ni ou se situe leur pays d’origine sauf qu’éffectivement en cas de guerre ils défendront un pays qu’ils ne connaissent pas . Belle reconnaissance face au peuple qui les nourrit et plus .

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