Retour sur la première étoile vegan de la galaxie Michelin
L’attribution de la première étoile Michelin à la cuisine végétalienne, dans la promotion 2021 du Guide rouge, ne laisse pas indifférent. Elle suscite de nombreux commentaires surpris ou sidérés, amusés ou agacés, enjoués ou affligés. Mais on ne soupçonnait pas encore les connexions métaphysiques de cet événement.
Nous ne sommes pas au bout de notre surprise puisque l’on découvre, grâce à une lectrice qui mérite notre reconnaissance, que le restaurant étoilé ONA (pour « origine non animale ») n’est pas situé dans n’importe quel pâturage. En effet, depuis cinquante ans, la ville d’Arès, située dans le bassin touristique huppé d’Arcachon et peuplée d’environ six mille Terriens, n’attend rien d’autre - à part les touristes argentés - que… les Martiens ! La presse régionale l’a rappelé en 2010 à l’occasion du centenaire de l’aéronautique en Aquitaine. En 1975, des Arésiens, conduits par un électronicien (donc, connecté), avaient obtenu par pétition auprès des autorités municipales, la construction d'une aire de réception pour objets volants non identifiés (OVNI).
Ce premier « ovniport » au monde a été inauguré le jour de la fête de l'Huître, le 15 août 1976. Ne connaissant pas le degré de sophistication des équipements martiens, il était équipé d'une manche à air et de balises. Il était entendu, par les lois de l’hospitalité française tant appréciées par les étrangers de toutes origines, que les extraterrestres seraient exemptés de taxes d'atterrissage et pourraient prendre part aux tournois de pétanque et de patins à vase, planchettes de bois utiles pour ramasser, dans la vase, palourdes et bigorneaux. On peut supposer, sous le contrôle avisé du général (2S) Marc Paitier, oenoconférencier et auteur de l’ouvrage La Mémoire du vin. Entre héritage et transmission, que les fêtards de l’époque n’avaient pas lésiné sur le muscadet nantais, l’entre-deux-mers bordelais, le côtes-de-bergerac dordognais, le chablis yonnais ou le picpoul de Pinet pour accompagner les délicieux mollusques marins – exclus, évidemment, de la cuisine vegan.
À une époque alors moins connectée sur Terre que dans l’éther, cette idée originale de promotion touristique a tout de même créé un véritable buzz planétaire, attirant des ufologues et des journalistes du monde entier. On peut penser qu’une partie des touristes fidèles à la région est encore issue de cette catégorie sociale originale. Avec le premier restaurant vegan étoilé, les visiteurs d’ici et d’ailleurs auront une raison supplémentaire de se poser dans cette station balnéaire, capable d’accueillir dans les meilleures conditions les voyageurs de l’univers - lesquels pourraient être dégoûtés par une nourriture considérée comme cannibale, inter-animale. Du moins, quand la maréchaussée aura reflué des bords du bassin lagunaire pour cesser de chasser le contrevenant non confiné, non masqué, bientôt non vacciné. Ne connaissant pas le lien de cause à conséquence entre cette histoire et l’implantation d’un désormais haut lieu de la gastronomie herbivore et frugivore, ovni dans la cuisine française, on considérera que les Arésiens nous font le coup de l’arlésienne avec ces Martiens improbables.
Plus sérieusement, il faut reconnaître que le couronnement par le très sérieux Guide Michelin d’une cuisine qui rejette tant de bienfaits de la nature n’est pas anodin. Il consacre davantage qu’un mode alimentaire : un mode global de vie dont l’idéologie sous-jacente consiste à interdire, au nom du prétendu respect du vivant, de consommer ou d’utiliser toute matière issue du monde animal - mettant, par là, au chômage les abeilles survivantes des pesticides et au rebut de nombreuses merveilles de l’ingénierie animale. Ces chômeurs seront remplacés par les ouvriers de l’industrie polluante des polymères.
Pour pousser cette logique dans ce qu’elle a d’absurde, avec les connaissances de notre époque qui ont considérablement progressé ces dernières décennies sur le monde des végétaux, herbes, plantes et arbres, les végétaliens devraient songer à renoncer également aux espèces végétales, elles aussi sensibles. Plus radical que vegan, qu’est-ce qu’il y a ? En attendant, l’industrie spatiale assurera son avenir commercial.
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