Politiser les quartiers : la stratégie communautariste de LFI

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Jean-Luc Mélenchon restera comme le politique qui aura le mieux compris et mis en application la stratégie Terra Nova. Le think tank progressiste actait, en 2011, l’abandon des classes populaires par la gauche afin de la mettre plus en conformité avec « la France de demain ». Ce qui se traduisait par un Grand Remplacement de son électorat traditionnel ouvrier en faveur des jeunes, des diplômés, des femmes et surtout des minorités de moins en moins minoritaires des « quartiers populaires ».

Après avoir obtenu 69 % du vote musulman au premier tour de la présidentielle et, lors de législatives, des scores spectaculaires dans des départements comme la Seine-Saint-Denis, Mélenchon et ses alliés communistes et écologistes peuvent se féliciter d’avoir ainsi récolté les fruits de plusieurs années de racolage électoral à destination de la France diversitaire. L’extrême gauche a également profité du travail de ses autres alliés de circonstance, islamistes et indigénistes, qui labourent consciencieusement le bitume et les cerveaux des anciennes banlieues rouges à l’aide d’une rhétorique victimaire et communautariste.

Les « territoires perdus de la République » ne sont donc pas perdus pour tout le monde. Bien au contraire, ils constituent un véritable vivier électoral pour les barons de la NUPES. Dans la revue Regards, le 3 mai dernier, la députée LFI Clémentine Autain expliquait : « La stratégie insoumise part du principe que les mouvements constitués, les partis de gauche et écologistes ne suffisent pas, même en s’alliant, à susciter l’adhésion massive. Nous avons besoin d’aller chercher dans la société elle-même de nouvelles forces, individuelles et collectives, ainsi que de refonder notre projet sur des bases inédites, avec des termes nouveaux, des formes d’expression nouvelles, pour convaincre et gagner. »

Il faut donc « aller chercher » cet électorat potentiel car il se caractérise encore par un abstentionnisme massif et une désaffection à l’égard de la politique.

Aujourd’hui, l’objectif prioritaire consiste alors à politiser les masses en éveillant leurs consciences, non plus de classe, mais de racisés. L’indigéniste Houria Bouteldja avait intitulé son essai polémique Les Blancs, les Juifs et nous (La fabrique éditions). Tout l’enjeu repose sur la capacité à donner une forme politique à ce « nous ». Ce qui nécessite, comme l’indique Clémentine Autain, de renouveler « le logiciel traditionnel de la gauche, basé sur la lutte des classes ».

C’est dans cette perspective qu’il faut comprendre les dérapages très contrôlés de Jean-Luc Mélenchon sur les violences policières, l’islamophobie ou la « créolisation ». L’extrême gauche prenant également soin de cultiver une autre thématique très populaire dans les « quartiers » : l’antisionisme.

Raison pour laquelle, Jeremy Corbyn, ancien leader travailliste anglais accusé de complaisances antisémites, a été sollicité au moment des législatives pour soutenir des candidates LFI. Ou encore, le 13 juillet dernier, le dépôt d’une résolution, par 38 députés issus des quatre groupes de gauche, afin que le gouvernement français condamne « l’institutionnalisation par Israël d'un régime d'apartheid à l'encontre du peuple palestinien ».

Pour aboutir, la politisation des masses ne peut cependant se réduire à quelques déclarations lancées du haut des bancs de l’Assemblée nationale. Comme l’indique Clémentine Autain, « nous devons combiner intelligemment notre engagement dans et hors des institutions ».

Le Figaro s’est récemment fait l’écho d’une nouvelle forme d’activisme utilisée par LFI, le « Community organizing ». D’après Libération, une méthode importée des États-Unis consistant à « aller chercher les colères » dans les quartiers populaires afin d’encourager des « mobilisations citoyennes » autour d’une ou plusieurs revendications. Et contribuer ainsi « à la politisation des classes populaires par la lutte », comme l’expliquait, en 2021, Julien Talpin, chercheur et membre de l’Institut qui a formé les militants de LFI. Or, il se trouve qu’une des premières organisations à avoir utilisé cette méthode en France est Alliance citoyenne, association grenobloise qui est à l’origine des actions d’agit-prop en faveur de l’autorisation du burkini dans les piscines.

On comprend mieux alors cette stratégie clientéliste qui ne consiste pas tant à « aller chercher la colère » mais bien, plutôt, à la fabriquer à partir d’une rhétorique victimaire fondée sur le ressentiment et la désignation de cibles. Puis à l’instrumentaliser médiatiquement afin d’en retirer le maximum de bénéfices politiques.

Frédéric Martin-Lassez
Frédéric Martin-Lassez
Chroniqueur à BV, juriste

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