Dans la rubrique des faits divers, deux villes des Pyrénées occupent actuellement le devant de la scène médiatique. Pau, ancienne capitale du Béarn, puis du royaume de Navarre. La ville natale d'Henri IV, aujourd'hui troisième cité du Grand Sud-Ouest après Bordeaux et Toulouse, vient ainsi de défrayer la chronique avec le lynchage, par une bande d'adolescents, d'un jeune Français de 32 ans d'origine burkinabè. Et puis Perpignan, à l'autre bout de la chaîne pyrénéenne. Ancienne capitale continentale du royaume de Majorque, et dernière ville méditerranéenne d'importance avant l'Espagne, qui voit les trafiquants de drogue prendre peu à peu le contrôle de certains de ses quartiers.

Pau a longtemps été une ville tranquille. Jusqu'au milieu des années 1980, la police pouvait y travailler en toute quiétude et aucun de ses quartiers n'était interdit aux forces de l'ordre. Même celui de "l'Ousse des Bois", théâtre régulier de violences urbaines et aujourd'hui répertorié comme site très sensible du point de vue sécuritaire, voyait les patrouilles de police intervenir sans difficultés particulières. Et puis, en quelques années seulement, tout a basculé. Changement de populations, arrivée de nouvelles générations, dégradation généralisée des politiques urbaines et de sécurité. Et la physionomie de la ville s'est transformée. Je fus témoin de ces bouleversements. Aujourd’hui noyautés par le trafic de stupéfiants, plusieurs quartiers sont tenus par les gangs et les dealers. La mort dramatique de ce jeune homme de 32 ans ne manquera pas, soyons-en sûrs, de faire ressortir ce phénomène que les municipalités successives se sont souvent attachées à minimiser. Monsieur Bayrou, actuel maire de Pau, a donc beau jeu de dénoncer maintenant "des faits gravissimes et des actes de violences intolérables et criminels", ainsi que "l'existence de trafics de drogue". Comme si ces faits étaient nouveaux !

Perpignan. Autre exemple d'une grande ville de province en pleine dérive "insécuritaire". Depuis deux ans, les trafiquants, pour nombre d'entre eux encore mineurs, ont envahi le lotissement "Les Oiseaux". Les uns après les autres, les habitants sont partis, dénonçant un enfer au quotidien avec des dégradations, des destructions et des menaces de mort. Seuls sont restés ceux qui n'ont pas les moyens financiers d'aller ailleurs. Ces derniers en sont réduits à vivre terrorisés. Même la police, qui intervient régulièrement, n'arrive pas à venir à bout de ces délinquants qui défient l'autorité de l’État. En cause, des années de laxisme. De politique de la ville où le plus important était de négocier la paix sociale à coups de subventions publiques et où il fallait fermer les yeux pour éviter un embrasement qui, de toute façon, interviendra bien un jour. Celui où il faudra, sous peine d'effondrement total de notre société, regagner ces territoires aujourd'hui perdus.

Pau et Perpignan. Deux villes de province symptomatiques de la dérive insécuritaire française. Deux villes qui renvoient aux échecs successifs et sans appel de modes de gouvernance qui ont privilégié la paix à n'importe quel prix, mais où sévit désormais la loi du plus fort. Deux villes qui, si rien n'est fait, ressembleront sous peu à Marseille, et où les règlements de comptes se feront par les armes.

Dans quelques jours, Emmanuel Macron doit annoncer ses décisions en matière de politique de la ville. Après avoir, à juste titre, balayé le rapport inepte de Borloo, espérons qu'il décidera de la seule mesure aujourd'hui indispensable : restaurer l'ordre républicain partout en France. Mais ne rêvons pas trop.

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21 mai 2018 à 20:36

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