Orbán, épisode V : la vengeance des élites dépitées et déconfites

ORBAN

Encore raté ! Ni les plus acharnés adversaires de Viktor Orbán à Bruxelles et outre-Atlantique, ni une coalition patchwork de six partis n'ont réussi à déboulonner le Premier ministre hongrois. Pire. Il rafle un cinquième mandat (quatrième de suite) en infligeant une déculottée monumentale à ses adversaires : 54 % des suffrages et 135 sièges sur 199, donc une majorité des deux tiers à son actif. La troisième.

Il suffit de jeter un coup d’œil à la carte électorale pour observer le raz de marée orange (couleur du Fidesz) qui rafle la mise partout sauf à Budapest, Pécs et Szeged, la capitale et deux des plus grandes villes, respectivement. Un signe qui ne trompe pas et qui démontre à quel point Orbán est l’antithèse de Macron : si, en France, les déclassés et les remplacés de la mondialisation sont les grands perdants et les oubliés du Président, en Hongrie, ils gagnent et sont écoutés, compris et défendus par leur Premier ministre.

Certains commentateurs iront chercher dans la communication omniprésente du gouvernement ou la stratégie de prudence sur la guerre en Ukraine les raisons de ce succès retentissant. Ils n’auront pas totalement tort, du moment qu’ils n’oublient pas qu’en premier lieu, Orbán doit sa réélection à son impeccable bilan économique et social. Allocations familiales généreuses, chômage à 3,5 %, salaire moyen qui a pratiquement doublé en douze ans, dette publique sous contrôle à 72 %, impôts au plus bas. Rendons-nous à l’évidence, Orbán est surtout un excellent gestionnaire, et pas seulement parce qu’il y parvient sans remplir les poches de McKinsey au passage.

Un résultat simplement époustouflant, surtout en tenant compte de la pression internationale, y compris celle de Bruxelles, qui ne cesse, depuis des années, de dépeindre Orbán en autocrate liberticide coupable de toutes les phobies possibles et imaginables. Et, nouveauté, avec une campagne insidieuse le caricaturant en « meilleur ami de Poutine », un tyran qui, décidément, a très bon dos. Pro-Poutine, mais pourquoi donc ? Peut-être parce que la Hongrie a accueilli à bras ouverts un demi-million de réfugiés (des vrais, femmes et enfants dans leur immense majorité) dès la première minute ? Ou parce qu’il s'aligne strictement sur toutes, absolument toutes les positions de l’Union européenne et de l’OTAN depuis le début de la guerre ? Ou peut-être parce qu’il a refusé de faire transiter des armes à travers son territoire pour protéger la minorité hongroise forte de 150.000 âmes installée en Ukraine depuis quelques siècles déjà et d’ailleurs fort maltraitée par le gouvernement ukrainien depuis au moins un lustre ?

Mais, voyez-vous, une victoire si éclatante ne pouvait que susciter le dépit et l’amère vengeance de ceux qui ont tout fait pour le désarçonner. La réponse ne s’est pas fait attendre : à peine quarante-huit heures après les résultats, von der Leyen a dégainé la toute nouvelle arme de son arsenal juridique : le règlement flambant neuf dit de « conditionnalité » qui assujettit le versement de fonds européens, quels qu’ils soient, au respect… de l’État de droit, cette notion noble mais qui, dans la panoplie de Bruxelles, sert surtout à instruire des procès bien plus politiques que juridiques. « Orwelliennement » paradoxal, chère Ursula !

En outre, cette vendetta dénote surtout un dogmatisme d’une arrogance et d'une myopie crasses en temps de guerre. L’Union européenne avait répondu d’une seule voix jusqu’à présent, malgré des intérêts divergents et le coût des sanctions. Et il lui reste au demeurant quelques défis de taille à relever dans un avenir proche, notamment sa Défense et sa politique énergétique. Certains pensaient le temps de l’insouciance woke et de la nonchalance géopolitique révolu… que nenni ! La Commission et le Parlement nous rappellent avec fracas que leur agenda idéologique n’a que faire des chars et des bombes russes. Et, surtout, qu’ils n’ont aucun état d’âme à piétiner allègrement la démocratie tout en feignant de la promouvoir au nom de ses « valeurs communes » qui laissent l’Europe au bord du schisme. Orwellien, dites-vous ? Élémentaire, mon cher lecteur.

Diego Valero
Diego Valero
Juriste en droit européen et professeur

Vos commentaires

23 commentaires

  1. Le peuple Hongrois va chèrement payer le fait d’avoir réélu V. Orban, un camouflet que Bruxelles ne va pas digérer, les représailles vont êtres douloureuses.

  2. Il est à souhaiter qu’en cas d’élection que j’espère , Eric Zemmour ne dit pas qu’il faut quitter l’UE mais tentera de la faire fléchir sur beaucoup de points avec l’aide de pays comme la Hongrie ,la Pologne et d’autres qui seraient tenter de transformer cette machine qui n’a rien de démocratique .

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