Marine Le Pen quitte le FN ? Logique…

Les institutions de la Ve République - tout du moins ce qu’il en reste - impliquent qu’au moment de briguer la magistrature suprême, ce soit un homme (ou une femme) qui se présente devant le peuple souverain, et non point le dirigeant (ou la dirigeante) d’un parti.

C’est donc très logiquement que Marine Le Pen a abandonné, ce lundi dernier, la présidence du Front national, laissant à Jean-François Jalkh, benjamin de l’Assemblée nationale en 1986 et fidèle d’entre les fidèles, le soin de diriger le parti en question ; CDD ayant vocation à virer au CDI, pour ceux croyant à une possible divine surprise le 7 mai prochain.

Il va sans dire que certains esprits mal intentionnés – souvent issus de son propre camp – y verront une sorte de reculade ou de reniement de ces fameux « fondamentaux » du Front national. L’attaque est d’autant plus aisée que ces derniers présentent l’insigne avantage de n’avoir jamais été clairement déterminés, ce qui permet à tout un chacun de les reprendre à son compte après s’en être fait une idée toute personnelle.

À l’auteur de ces lignes, du temps où il officiait à l’hebdomadaire Minute, Jean-Marie Le Pen avait confié :

Le seul “fondamental” du Front national, c’est l’amour de la France.

On pourrait y ajouter qu’en 1972, l’anticommunisme était également un puissant ciment, mais depuis que Robert Hue soutient Emmanuel Macron, l’eau de la Volga a largement eu le temps de couler sous les ponts.

Après, d’autres personnes ayant rallié le FN y ont apporté d’autres fondamentaux : libéralisme thatchérien, lutte contre l’avortement, tropisme atlantiste reaganien, troisième voie destinée à se situer au-delà de la droite et de la gauche ou défense de la cause animale. Il n’empêche que la définition donnée par le père explique la position de sa fille : un front n’est pas un parti. Pour adhérer aux partis socialiste ou communiste, il convenait d’être socialiste ou communiste. Pour se sentir chez soi au Front national, il suffit de se sentir français ; d’où la multiplicité des visages, des itinéraires, des patronymes de ces Français et Françaises de souche plus ou moins récente, constituant le proche entourage de la désormais ancienne présidente du Front national.

Mieux : cette dernière a compris que le traditionnel échiquier politique français était passé de l’horizontalité à la verticalité. Naguère, il allait de la gauche de la gauche à la droite de la droite ; désormais, il va du peuple d’en bas à la caste dirigeante du haut. D’où la position, elle aussi fort logique, d’un Jean-Luc Mélenchon, populiste de gauche, qui laisse à ses ouailles toute latitude de voter pour qui bon leur semblera dans moins de deux semaines. Et à celle, tout aussi logique, d’un François Fillon qui, après avoir donné dans le conservatisme sociétal, revient à sa classe sociale d’origine en appelant à voter pour Emmanuel Macron.

Ce n’est pas le Front national qui sauvera la France, puisque n’étant jamais qu’un parti parmi d’autres partis. Mais la seule rencontre entre un peuple et un homme, libre de partis pris, si l’on peut dire. Ou d’une femme, en l’occurrence. Il n’est pas interdit d’espérer. C’est même fortement conseillé.

PS : les Femen, qui sont décidément un délice de chaque instant, continueront-elles à se peinturlurer les nichons, alors que leurs vœux les plus chers pourraient bientôt être exaucés : à savoir, une femme à l’Élysée ?

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Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

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