Que le palais de l’Élysée lance une série de produits dérivés, histoire d’aider à payer les frais généraux et faire plaisir au touriste des journées du Patrimoine qui pourra ainsi s’offrir la tête d’Emmanuel Macron en buvant son café le matin, pourquoi pas.

On fait cela depuis des décennies au Royaume-Uni, avec ou sans l’approbation royale, dans un festival chatoyant, souvent de mauvais goût et toujours renouvelé. Par exemple, pour le mariage de William et Kate en 2011, on trouvait bien évidemment les traditionnels mugs et services à thé, mais aussi des sacs à vomi, sans doute pour le voyage de noces, des stickers pour ongles de toute beauté, tout cela à l’effigie des jeunes mariés. Le top était tout même les boîtes de préservatifs avec Kate et William en médaillon dans… un préservatif, sous la marque "Crown Jewels" ("les joyaux de la couronne"). Il fallait y penser. On imagine le pire pour les funérailles de la reine qui ne manqueront pas d’arriver un jour !

Dieu merci, pas de ça chez nous. Que du bon goût, du classique, du qui va plaire à tout le monde, de la « french touch ». Dans la boutique élyséenne, on trouve notamment un sweat-shirt brodé "Première dame" : très bien pour aller pousser le Caddie® le samedi matin dans sa grande surface. Ou encore un cahier de coloriage avec le couple Macron, histoire peut-être de rappeler qu’ils nous en font voir de toutes les couleurs, ces derniers temps. Mais nous n’allons pas nous transformer en agence publicitaire du Palais en vous faisant la réclame de la boutique.

Donc, que l’on ouvre un bazar à l’Élysée, pourquoi pas : il y en a bien un à l’Hôtel de Ville ! En revanche, qu’Emmanuel Macron se permette de bricoler avec les symboles de la République, avouez que c’est un peu plus dérangeant. Cet emblème, rappelons-le, certes jamais officialisé par un texte, mais consacré par plus d'un siècle d’usage, est composé d’un bouclier sur lequel est gravé le monogramme « RF », du faisceau de licteur, de rameaux de chêne et d’olivier. Or, on vient de découvrir que ce « logo » de la présidence, en fait celui de la République française, a été modifié. Emmanuel Macron y a fait ajouter la croix de Lorraine sur le faisceau de licteur. Ce que n’aurait jamais osé faire le fondateur de la Ve République !

L’idée serait de rendre hommage au général de Gaulle car – ça tombe bien –, durant ce quinquennat, on commémorera les 80 ans de l’appel du 18 juin, les 60 ans de la Ve République et les 50 ans de la mort du grand homme. Vu comme ça, en cherchant bien, on peut en trouver plein d’autres durant ce quinquennat béni des dieux : les 130 ans de sa naissance, les 120 ans de sa première communion, les 110 ans de son entrée à Saint-Cyr, etc. La ficelle du premier de cordée est un peu grosse et révèle, une fois de plus, l’accentuation du caractère autocratique du régime, sans parler, évidemment, de l’aspect récupération. Une récupération qui ne manque pas de sel : s’approprier le symbole de celui qui défendit, toute sa vie, la souveraineté française, alors qu’on a décidé de la passer par pertes et profits dans le grand tout de l’Union européenne, il fallait oser !

Cette récupération est d’autant plus incongrue et prétentieuse qu’elle évoque la marque personnelle apposée sur le fanion de Charles de Gaulle, président de la République. Rappelons, en effet, qu’en vertu d’un décret de 1885, les présidents de la République ont droit à un pavillon tricolore avec leurs initiales brodées d’or sur le blanc. De Gaulle y avait fait broder la croix de Lorraine, Giscard d’Estaing le faisceau de licteur, Mitterrand un arbre mi-chêne mi-olivier. Si vous avez des idées pour la marque personnelle d’Emmanuel Macron, on est preneur…

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14 septembre 2018 à 15:44

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