L’Agence, l’immobilier de luxe en famille, ou la mondialisation heureuse

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Ils ont tout ou presque du gendre idéal. Ils sont jeunes, ils sont beaux, sympathiques et ne comptent pas leurs heures. Martin, Valentin, Louis et Raphaël Kretz ont tous les quatre emboîté le pas de Sandrine et Olivier, leurs parents tout aussi attachants, pour travailler, à leurs côtés, dans l’immobilier. Le couple et ses quatre enfants s’est ainsi spécialisé dans le marché de l’ultra-luxe, tout en participant à une émission de télé-réalité. La saison 4 de L'Agence, l'immobilier de luxe en famille est de retour en streaming sur MYTF1.

Accumulation de beauté

S’il est un vrai plaisir de s’émerveiller, avec eux, dans ces lieux aussi insolites que prestigieux, qu’ils nous ouvrent les portes de propriétés d’exception et nous font rêver, qu’eux-mêmes ne semblent jamais blasés par cette accumulation de beauté, bien que côtoyant un milieu sans doute déconnecté (les budgets de leurs clients se comptent en millions d’euros), l’émission laisse un petit goût amer. Non pas de ne jamais pouvoir s’offrir, un jour, un appartement haussmannien place Vendôme ou la villa de Mel Gibson au Costa Rica. Mais bien que le bonheur se trouve parfois toujours plus loin. Derrière cette aisance relationnelle et matérielle, c’est en réalité tout un modèle de société qui est érigé, celui de la mondialisation heureuse, de la société liquide, nomade et sans frontières…

Ainsi les parents de quitter momentanément leurs enfants pour profiter d’une retraite bien méritée en achetant au Brésil un enfant, s’installant en Espagne, l’autre rêvant de New York quand un troisième regrette amèrement d’avoir obéi à ses parents et ne pas être parti vivre au Portugal. Malgré les liens indéfectibles, et c’est appréciable surtout de nos jours, de voir une famille unie qui s’aime et sait le manifester, ils n’hésitent pas à se déraciner, par épanouissement personnel et professionnel, quittant la grande et somptueuse maison de famille boulonnaise sous le regard attristé de Majo, la grand-mère décomplexée.

L'enracinement contre le déménagement permanent

Il en est de même pour les clients de l’Agence qui passent d’un logement à un autre, en achetant ou vendant leur bien entièrement meublé. Où sont passés les meubles de famille ? Ceux qui racontent une histoire et que l’on se partage de génération en génération ? Oubliés, au profit d’un mobilier haut de gamme mais impersonnel à souhait et complètement interchangeable, à l’instar de ces pied-à-terre destinés aux anywhere (les gens de « n’importe où » décrits par le sociologue David Goodhart). Ainsi, en Loire-Atlantique, un château transmis de mère en fille depuis des générations est mis en vente par le couple, au prétexte qu’ils voyagent beaucoup à l’étranger et n’ont pas le temps de s'y poser suffisamment.

Ces gens-là, qu’ils soient clients ou vendeurs, changent de biens avec un détachement déconcertant. On est bien loin de la « passoire thermique » si joliment décrite dans cette savoureuse nouvelle de Benoît Duteurtre, « cette vieille demeure en pleine montagne », « ce bon foyer avec son tas de bûches et sa cheminée » qu’un jeune loup de l’agence départementale était venu visiter afin d’établir « un bilan vert des propriétés, dans le cadre du PDV, plan de développement vertueux ». Deux salles, deux ambiances, comme on dit. L’enracinement contre le déménagement permanent...

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 17/01/2024 à 16:49.
Iris Bridier
Iris Bridier
Journaliste à BV

Vos commentaires

12 commentaires

  1. Sans fausse modestie je dirais que ceci ne me fait pas rêver . Ma vie matérielle me suffit , après le reste est plus compliqué mais je n’envie personne , je fais parti des, « çà me suffit  » et je n’ai pas honte dêtre si peu ambitieux.
    Je n’ai qu’une patrie et je préfère profiter de mon environnement proche ainsi que de mes proches . Le bonheur est fait de petites choses fugaces . Je ne crois pas au bonheur béat au Seychelles ou Maldives. J’ai été dans quelques pays mais ce qui me gênait c’était la trop grande différence de niveau social entre autochtones et touristes . Je ne peux m’habituer à cotoyer délibérément la misère et me complaire dans le luxe . Quand vous êtes en France ce n’est pas encore le cas . Mais j’ai l’impression que l’on importe le tiers monde dans le pays ce qui change un peu la donne . Mais nous sommes dirigés par des gens hors sol, des nowhere men qui nous prennent pour des tribus comme les autres . Il faudrait les faire redescendre un peu sur terre !

  2. TF 1 , c’est Bouygues ! Ce promoteur opportuniste copain de Mitterrand auquel ce dernier a confié une part du pouvoir politique avec la 1ère chaîne de TV française ! Ce promoteur qui pouvait même se permettre de construire le Viaduc de l’Ile de Ré sans qu’un Résultat d’Appel d’Offres n’ait été prononcé !
    Alors cette émission est à l’aune de ces mentalités : des opportunistes se roulent sans scrupule dans l’or de ces propriétaires dont la fortune est trop souvent d’origine douteuse, sous les yeux de la bobocratie française au cerveau tellement mou qu’il sent le rance.

  3. La photo des quatre frères est édifiante pour ceux qui savent reconnaître l’imposteur de profession .
    Certainement des gens de qualité !

  4. Emission qui présente des biens souvent somptueux (mais pas toujours) par une famille unie et sympathique (seul véritable intérêt). A part cela, constat effectivement navrant : les clients sont « hors sol » , le mobilier souvent moche et impersonnel, le bilan carbone, n’en parlons pas (c’est pour cela qu’on donne des leçons de morale aux plus modestes), et très franchement, les prix sont aberrants. C’est tout le problème, on oscille entre beauté et indécence, et il serait de loin préférable de penser un peu aux autres dans cette société déshumanisée qui reste sur son quant à soi…

  5. j’ai eu le privilège de voir ce « documentaire » (par inadvertance)… j’ai pu assister à la pleine réussite d’une famille de vendeurs de bien immobiliers (beaux,intelligents et argentés, au top niveau). La Nausée, : un étalage de biens totalement inaccessibles aux quidams en recherche de leur chaumière, un snobisme de haute volée : si j’ai pu voir des biens magnifiques, le rêve était absent, un vide abyssal : à quoi rime ce genre d’émission ? j’ai abdiqué avant la fin en pensant à tous les français mal logés et désargentés. C’était (je crois) un dimanche après-midi par grand froid et ciel gris. Navrant

    • C’est, je pense, encore de la provocation, pour rendre le bon peuple, soit jaloux aigri et agressif, soit désespéré. Bon ,cinéma et télé (à défaut des livres) ont toujours vendu du rêve facile au gueux, mais là ça devient de la torture psychologique

  6. Au moins un point positif : celui de nous faire un peu rêver, comme un voyage que l’on ne peut pas s’offrir…

  7. Et oui, effacer l’histoire, petite ou grande des peuples, ainsi commence le  » le Big reset » mis en place par le cercle de Davos.
    Ces oligarques qui font croire aux gens qu’ils seront bien plus heureux de ne rien posséder en consacrant leur temps à des loisirs futiles, se chargent de les dépouiller et de se partager leurs biens, jadis acquis à la force du poignet par leurs aînés.

  8. Ben oui, encore une émission qui fait la part belle aux rêves dont 99% des français n’auront jamais accès en réalité, une façon de distraire le quidam.

  9. C’est leur choix mais rien ne remplace une famille avec plusieurs générations pour passer le plus de temps possible ensemble : grands parents , parents , enfants et petits enfants réunis , quoi de plus beau .

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